Aujourd’hui, nous vous diffusons l’émission du pain et des parpaings diffusé sur radio pikez a Brest.
Pour notre 10ᵉ épisode et 1ᵉʳ de cette nouvelle saison, on quitte temporairement la campagne pour venir questionner la place qui est aujourd’hui laissée aux formes alternatives d’habiter une ville, un lieu. Depuis quelques années, la gentrification de certains quartiers de Brest comme le port de commerce et Saint-Martin est de plus en plus tangible.
L’expulsion violente en juillet 2023 du squat de l’Avenir, un espace autogéré emblématique et fruit d’une lutte historique d’usager.es pour la sauvegarde de cet espace fait résonner cette question : que reste-t-il de notre droit à la ville, à prendre part aux décisions quant à son aménagement, à faire hors des chemins imposés par les normes et les usages marchands ?
On revient sur la nécessité d’expérimenter des formes communes au sein d’espaces autogérés avec les collectifs Pas d’avenir sans Avenir et Fun Club Rade de Brest pour que continuent de vivre des manières plus autonomes d’habiter la ville, dans ce qui s’y fait et dans ce qu’il s’y passe.
Depuis le vendredi 24 novembre 2023, “une trêve” dans les attaques de la bande de Gaza a été négociée en vue d’un échange entre les otages détenus depuis le 07 octobre en Palestine et des prisonnier-es palestinien-nes. Afin de mieux comprendre les enjeux liés à cette question et le rôle de la prison en tant qu’ outil du colonialisme, nous avons réalisé un entretien avec un membre du réseau international de solidarité avec les prisonier-e-s palestinien-ne-s Samidoun le dimanche 26 novembre dernier, que nous vous diffusons aujourd’hui.
Fondé en 1982, le lycée autogéré de Paris est gratuit pour les élèves et financé par l’Éducation nationale.
L’expérimentation au sein du service public d’éducation, un groupe d’enseignant·e·s et d’élèves militant·e·s s’est formé autour du projet de « changer l’école ».
Installé au 393 rue de Vaugirard, dans le 15ᵉ arrondissement de Paris, le LAP, avec ses 240 élèves et ses 25 professeur·e·s, fonctionne de manière autonome et sans chef d’établissement : tous les membres du lycée se partagent responsabilités, tâches du quotidien et prises de décisions, en plus des activités pédagogiques.
L’éducation à la démocratie y est ancrée dans la pratique quotidienne : élèves et professeur·e·s sont amené·e·s à exprimer leurs points de vue et à décider ensemble du fonctionnement collectif.
Une mise en autonomie pour les élèves à qui l’enseignement traditionnel ne convenait pas.
Sont créés quatre établissements expérimentaux : le Lycée expérimental de Saint-Nazaire (LXP), le Centre expérimental pédagogique et maritime d’Oléron (Cepmo), le Collège-lycée expérimental d’Hérouville-Saint-Clair (CLE) et, sous l’impulsion de Jean Lévi, le Lycée autogéré de Paris (LAP).
En juin 2022, le Recteur de l’Académie de Paris a refusé de renouveler la convention qui depuis 2010 encadrait le statut dérogatoire du lycée et permettait ce fonctionnement alternatif : suite à une évaluation sommative, rédigée sans critères ni aucune période d’observation, le rectorat remet en question le fonctionnement autogestionnaire du LAP, notamment le principe de libre fréquentation et l’absence de hiérarchie, et veut placer le collectif sous l’autorité de la proviseure du lycée de rattachement Jean Lurçat.
En juin 2023, en réponse à une question écrite de la députée Eva Sas, le ministre Pap Ndiaye remettait en cause plusieurs aspects du fonctionnement du Lycée autogéré de Paris sans qu’aucune évaluation ni observation de terrain n’ait été réalisée par le rectorat.
En juillet 2023, quelques jours avant les vacances d’été, le rectorat a annoncé la suspension « sine die » de notre procédure de cooptation, pourtant presque finalisée et imposé des affectations d’enseignants n’ayant aucune connaissance de notre projet. Pour la première fois depuis 40 ans, tous les membres de l’équipe n’ont pas le même statut. Cette situation a très largement déstabilisé la rentrée de l’équipe et des élèves.
Une enquête administrative a été diligentée. Elle a porté sur les mêmes questions et, après une série de convocations et d’entretiens au Rectorat, vient de se terminer. . Le nouveau ministre Gabriel Attal va ainsi se prononcer sur l’avenir du Lycée autogéré de Paris alors que son fonctionnement autogestionnaire est déjà fortement altéré et son projet remis en cause.
Pour parler de l’avenir du Lycée autogéré de Paris, nous recevons en direct dans nos studios : Eric, enseignant, Luhane et Lounes élèves au Lycée autogéré de Paris.
Avec le développement du Service national universel et des classes de défense, le gouvernement veut assujettir les élèves et les enseignants à la politique de militarisation de la société.
Lorsque le 28 mai 1996, le président Chirac décide la suspension du service national obligatoire, il s’agissait pour l’État de concentrer ses forces et ses ressources sur le renforcement de l’armée de métier et de ses équipements. Ces choix ont révélé différents problèmes du point de vue des gouvernements :
• l’insuffisance du recrutement professionnel de « qualité » (et des non-renouvellements de contrats ou des démissions jugées trop nombreuses) ;
• le désintérêt, voire le rejet de la jeunesse vis-à-vis de l’État coercitif, de l’armée et de la préparation de la guerre, et dont les révoltes demeurent une menace pour l’ordre bourgeois ; d’autant plus que l’utilisation de l’armée est parfois envisagée pour réprimer les mouvements sociaux et quadriller les quartiers populaires ;
• la nécessité qu’une armée de métier puisse s’appuyer non seulement sur le consentement de la société en cas de conflit, mais aussi sur le contrôle de la population civile et de l’économie.
La multiplication des « classes de défense » vise notamment à répondre aux besoins de l’armée de métier ; le développement du Service national universel, à l’intérieur même de l’Éducation nationale, vise à renforcer le contrôle du pouvoir sur la jeunesse, renforcer sa militarisation.
Le gouvernement accélère la généralisation de son dispositif d’embrigadement de la jeunesse, en rendant de fait obligatoire, pour tous les jeunes qui ne trouveront pas de stage, la participation au séjour dit “de cohésion” ou à la “mission d’intérêt général”.
À noter : la Loi de Programmation Militaire 2024-2030, adoptée au Parlement le 12 juillet 2023, prévoit un budget de 413 milliards d’euros sur sept ans, qui fait de la Défense le premier budget de l’État. Le SNU dispose de moyens spécifiques : 140 millions d’euros en 2023 (inclus dans le budget de l’Éducation nationale).
Dans ce contexte, le collectif Non au SNU Région Parisienne organisait le 18 novembre 2023, a la Bourse du travail de paris, une réunion publique d’information pour amplifier la mobilisation contre le Service National Universel. Dans l’émission de ce jour, nous vous proposons l’écoute d’une grande partie de cette réunion publique.
Un collectif d’éleveurs du Pays de Redon, sur les trois départements d’Ille-et-Vilaine, de Loire-Atlantique et du Morbihan, ont organisé le samedi 9 septembre 2023 la “Journée mondiale de l’agriculture normale”.
L’objectif est desensibiliser le grand public à l’impact des normes de biosécurité qui s’appliquent de la même manière aux élevages industriels comme à tous ceux qui élèvent quelques animaux dans leur jardin, au risque d’asphyxier les élevages de plein air.
Dès 8 h 30, présence du collectif sous les halles de Redon pendant le marché.
De 10 h 30 à 12 h 30, déambulation dans le centre-ville de Redon, qui finira dans l’amphithéâtre urbain. Des prises de parole et témoignages d’éleveurs confrontés aux normes de biosécurité sont prévues devant la sous-préfecture.
Sur l’heure du midi. Le collectif prévoit de la restauration avec cochon grillé, kebab d’agneau et tajine de poulet, à prix libre.
À 14 h, théâtre forum avec saynètes jouées par des éleveurs. « Nous aimerions faire en sorte que le public s’implique, en le confrontant à des situations vécues. Il s’agira de réfléchir à ces situations et voir comment elles pourraient se dérouler autrement », expliquent les organisateurs.
À 17 h, projection du film “Sacrifice paysan” (55 mn) en présence de la réalisatrice Gabrielle Culland. Noémie Calais, éleveuse du Gers y dédicacera son livre “Plutôt nourrir” sur le quotidien des éleveurs de porcs et de volailles face à ces normes.
À Redon, plus de 200 personnes ont manifesté pour défendre l’élevage plein air.
Plus de 200 personnes ont manifesté samedi 9 septembre 2023 à Redon (Ille-et-Vilaine), en musique et sous une pluie de plumes, pour défendre l’élevage plein air. Les éleveurs dénoncent la multiplication des normes imposées par les autorités sanitaires pour enrayer les épidémies de grippe aviaire et de peste porcine africaine.
« J’ai été confrontée à une perte d’animaux comme jamais après avoir enfermé mes volailles, les mâles agressaient les femelles, et en même temps à un burn-out. » Une éleveuse de volailles bio en plein air de Laillé témoigne de ce qu’elle a vécu en 2021. Après un contrôle, elle a été forcée de confiner ses animaux, une norme de biosécurité imposée à tous les élevages de volailles par les autorités sanitaires pour enrayer l’épidémie de grippe aviaire. Elle a manifesté samedi 9 septembre 2023 à Redon (Ille-et-Vilaine) pour défendre l’élevage plein air et dénoncer les normes qui ont changé sa façon de travailler, « fait de pression des contrôles » mais aussi de réorganisation de son exploitation, « j’ai fait évoluer mon cheptel de volailles de chair à pondeuses pour baisser le nombre d’animaux ».
Une autre éleveuse a comptabilisé « une baisse de ponte de 30 à 40 % après la claustration », mais aussi constaté « des comportements de cannibalisme, ça stress les animaux ». Un éleveur de Loire-Atlantique se confie, quant à lui, sur un de ses cheptels décimé par la grippe aviaire et l’euthanasie de ses autres bêtes voisines en bonne santé, « j’ai été sidéré ».
Un cortège emmené par un tracteur et fermé par un autre tractant les cochons en train de cuire à la broche – en prévision du repas paysan du déjeuner – a répandu des kilogrammes de plumes dans le cœur de ville. Mais aussi fait du bruit. « Liberté pour les poulets ! », « Liberté pour les cochons ! », sont des slogans qui ont résonné.
Sur les pancartes, mais aussi dans les slogans, c’est la liberté pour les volailles et les cochons plein air qui était demandée.
Les banderoles des éleveurs traduisaient leur état d’esprit. Pour beaucoup, les normes de sécurité empêchent l’exercice de leur métier.
La manifestation était l’action phare de la Journée de l’agriculture normale, imaginée par les organisateurs pour interpeller sur ces normes « qui obligent à investir, qui compliquent notre travail et mettent en péril les élevages plein air », explique un éleveur de porcs en plein air du pays de Redon.
« Des obligations absurdes pour l’environnement et l’agronomie »
« Je ne peux plus entrer dans mon élevage sans changer mes bottes, j’ai dû créer un sas, installer une triple clôture pour être certain que mes cochons n’entrent pas en contact avec un sanglier », détaille-t-il. Des obligations « absurdes » environnementalement et agronomiquement parlant, selon l’éleveur. « Avec de telles installations, je ne peux plus faire de rotation entre mes cochons et mes champs de maraîchage alors que les cochons enrichissaient la terre pour les légumes. »
Ce qui est absurde aussi pour ces éleveurs, c’est qu’en termes de normes de biosécurité, « aucune différenciation ne soit faite entre les petits élevages plein air et les fermes usines ».
Autant de raisons qui, selon eux, participent « à décourager les installations, en plus des nombreux paysans qui cessent leurs activités ».
Après avoir présenté la Bande dessinée Les Algues Vertes et avoir invité à diverses reprises Inès Léraud, Morgan Large et Pierre Philippe et dans le cadre de la 8ᵉ rencontre des lanceurs et lanceuses d’alerte qui se tenait les 10, 11 et 12 novembre 2023, avait lieu la projection du film « Les algues vertes ».
En présence de Morgan Large, journaliste à radio KREIZ BREIZH et pierre Philippe, médecin, qui ont suivi cette affaire.
Dans cette seconde partie d’émission, nous entendrons les échanges qui ont suivi la projection sur les questions que soulève cette affaire sur l’environnement et le modèle agroalimentaire.
On constate que le traitement de cette affaire par le monde politique national, régional, local ou par les services de l’État met en lumière des méthodes que l’on retrouve dans de nombreux dossiers d’alerte.
Le tourisme, l’économie et l’immobilier justifient-ils l’omerta et le classement sans suite ?
L’échange après le film a permis d’aborder la difficulté de travailler en Bretagne sur ces sujets
La pauvreté progresse en France et l’aide aux plus démunis se développe essentiellement sur la base du bénévolat. Depuis 2016, la loi interdit de détruire les denrées alimentaires et impose de donner aux associations d’aide alimentaire les produits proches de la péremption ou jugés comme invendables par les producteurs ou distributeurs. En contrepartie de ces dons, l’État octroie des déductions fiscales.
Les associations d’aide aux plus démunis font face à une forte augmentation du nombre de bénéficiaires et se substituent bien souvent aux services sociaux. Elles sont aujourd’hui dans une situation telle qu’elles réduisent les denrées distribuées ou refusent des personnes qui devraient bénéficier de l’aide alimentaire.
Pourtant, elles reversent la TVA à l’État, administrent pour le compte de l’État des aides sociales en nature et assument la responsabilité de valider les reçus fiscaux de L’ampleur des aides distribuées, les sommes défiscalisées et les mécanismes d’optimisation fiscale associés alertent les acteurs associatifs qui « gèrent » la crise alors que d’autres en profitent. Le fonctionnement du Fonds Social Européen n’est pas exempt de critiques.
La 8ᵉ Rencontres Annuelles des Lanceurs d’Alerte qui se déroulait les 10, 11 et 12 novembre 2023 a débattu sur cette question et les les intervenantes et intervenants était : Bénédicte BONZI, Docteure en anthropologie sociale, Chercheuse associée au LAIOS ;Philippe BREUVART, citoyen engagé ; Jean-François COULOMME, Député de la Savoie et Stéphanie FONTAINE, Journaliste. Voici pour l’émission de ce jour
Tout d’abord, avant de commencer cette émission, nous tenons à préciser qu’il n’est pas question pour nous de sous-estimer ou banaliser la question de la violence faite aux femmes. Nous ne prenons pas à la légère son traitement, bien au contraire.
Nous, qui nous interrogeons sur la pertinence de l’existence des prisons, nous souhaitons interroger l’une de ses justifications ; la violence faite aux femmes. Nous saluons le courage de l’Observatoire international des prisons (OIP) qui s’est saisi du dossier dans son numéro d’avril 2023 et qui va nous permettre de nous confronter à la question ; est-ce que la prison est la solution ?
Nous parlons de courage tant la seule réponse aux crimes et délits inscrits dans la loi semble être de nature sécuritaire, les peines ne sont jamais assez lourdes pour condamner les agresseurs et soigner les victimes. La protection des unes passe-t-elle nécessairement et uniquement par la répression des autres ?
Pour parler de cette question, nous recevons, Prune Missoffe, membre de l’observatoire international des prisons
Environ 30 % des condamnés détenus le sont pour des violences conjugales[1] ou sexuelles. Ils étaient ainsi plus de quinze mille hommes à être emprisonnés pour ces motifs au 31 décembre 2022[2]. C’est presque quatre mille de plus qu’en 2020[3]. L’augmentation du nombre de condamnations à de la prison ferme ces cinq dernières années (voir graphique) reflète d’abord celle du nombre d’affaires enregistrées par la justice (+27% entre 2015 et 2021), dans le sillage du mouvement #MeToo et de la dénonciation croissante des féminicides.
Elle traduit aussi un changement de politique pénale, surtout en matière de violences conjugales, le Grenelle étant passé par là à l’automne 2019.
Ainsi, 63 % des affaires poursuivables ont fait l’objet de poursuites pénales en 2021, contre 55 % en 2015. Dans le même temps, les alternatives aux poursuites, dont les possibilités ont été réduites par le législateur[4], ont baissé de dix points, passant de 41 % en 2015 à 31 % en 2021[5]. En matière de violences sexuelles hors cadre conjugal, l’augmentation des poursuites, comme celles des condamnations, est bien moindre[6], en raison sans doute, des particularités de ce contentieux (lire page 23).
« À la permanence générale, les violences conjugales, c’est notre plus gros contentieux avec les délits routiers. Le nombre de gardes à vue a explosé, témoigne Anne Laure Le Galloudec, vice-procureure chargée des violences intrafamiliales au tribunal de Lille. Qui dit plus de gardes à vue, dit aussi plus de réponses immédiates : on a près d’un an et demi de délai pour les jugements par convocation. On ne peut pas se le permettre sur ce type d’affaires. »
Alors que 3600 faits de violences conjugales avaient été jugés par comparution immédiate en 2016 au niveau national, ils étaient près de 9500 en 2021. Ce traitement n’est toutefois pas systématique, nuance la magistrate, et est généralement réservé aux personnes ayant des antécédents et aux cas de violences relativement graves[7]. Reste que ce contentieux arrive massivement devant les tribunaux correctionnels.
Si les magistrats prononcent majoritairement des peines de sursis[8], le plus souvent probatoire[9] (celles-ci pouvant donner lieu à révocation et incarcération, en cas de non-respect d’une interdiction de contact par exemple), les peines fermes pleuvent aussi et ont été presque multipliées par deux en cinq ans[10].
En prison, une prise en charge dispersée et lacunaire
Malgré cet afflux, il n’existe pas, à l’heure actuelle, de politique de prise en charge structurée en milieu fermé s’agissant des auteurs de violences conjugales, de l’aveu même de la Direction de l’administration pénitentiaire (Dap). « On reste sur un nouveau public spécifique pour l’administration pénitentiaire, avec un dispositif dont le pilotage national est relativement récent puisqu’il date de 2020, et qui a été largement mobilisé par le développement du bracelet antirapprochement (lire page 22) et celui du contrôle judiciaire avec placement probatoire (lire l’encadré) », reconnaît Romain Emelina, chef du département Parcours de peine.
« Notre priorité actuellement est d’avoir une analyse plus fine de ce qui se fait sur le terrain, pour identifier les bonnes pratiques et travailler à leur diffusion », complète Laetitia Bercier, référente nationale sur le sujet. Ainsi le choix de proposer ou non des formes de prises en charge spécifiques est-il, jusqu’à aujourd’hui, laissé à l’initiative des services pénitentiaires d’insertion et probation (Spip), sans que la Dap ne soit « en capacité de fiabiliser les données » s’agissant du nombre de personnes qui pourraient avoir été touchées par ce type d’action.
Les résultats partiels d’une étude actuellement menée par le Centre interdisciplinaire de recherche appliquée au champ pénitentiaire (Cirap) permettent néanmoins de se faire une idée : sur les 128 Spip ayant répondu à l’enquête (soit un peu moins de la moitié d’entre eux), seulement 60 % proposeraient des prises en charges collectives sur cette thématique – 47% des répondants intervenant uniquement en milieu ouvert[11].
Leur organisation vient en outre se rajouter à la charge de travail déjà lourde des conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation, si bien que leur fréquence, et donc le nombre de personnes touchées, est souvent très faible. Leurs formes et leurs contenus sont par ailleurs très hétérogènes.
Il peut s’agir d’actions de « sensibilisation » ou « responsabilisation » – souvent confiées à des associations extérieures, de groupes de parole ou encore de programmes de prévention de la récidive. « Généralement, l’approche privilégiée est l’approche cognitivo-comportementale. Celle-ci soutient l’idée qu’une modification durable du comportement est possible par l’apprentissage de pensées et de comportements tels que le développement de la maîtrise de soi ou de stratégies d’évitement.
Ces programmes mettent l’accent sur la responsabilité individuelle. Mais ce faisant, les causes psychologiques, subjectives ou inconscientes de ces violences, de même que leurs facteurs sociaux, structurels sont sous-exploitées dans la majorité des programmes », explique Lucie Hernandez, enseignante-chercheuse en psychologie, qui pilote l’étude menée par le Cirap. Toujours dans cette approche cognitivo-comportementale, la Dap expérimente actuellement dans deux établissements pénitentiaires un outil de réalité virtuelle, censé s’insérer dans une prise en charge globale.
Concrètement, il s’agit d’un casque de réalité virtuelle, dans lequel est projeté un film d’une douzaine de minutes, « qui place d’abord le spectateur dans la peau de l’auteur, puis dans celle de la victime, et enfin de l’enfant du couple, ce qui permet à l’auteur de ressentir les émotions des victimes lors des scènes de violences », explique Laetitia Bercier.
Pour Lucie Hernandez, si ce type de programme et d’outil peuvent permettre de lancer une réflexion et d’amorcer une prise de conscience chez les auteurs, « il faut que des suivis psychologiques prennent le relais » si l’on veut espérer agir réellement et durablement sur les problématiques.
Les psychologues font cependant cruellement défaut en détention, si bien que peu de personnes peuvent bénéficier d’un réel suivi[12]. Le constat est le même s’agissant des addictologues, alors même que de nombreuses situations sont sous-tendues par une addiction à l’alcool ou à d’autres produits stupéfiants[13].
Enfermés dans un univers quasi exclusivement masculin, où les rapports de force et la violence sont quotidiens[14], sans autre forme de prise en charge qu’un suivi criminologique et médico-psychologique erratique – quand il n’est pas inexistant : difficile, dans ces conditions, d’espérer une remise en question des condamnés (lire page 31). « La difficulté c’est qu’en maison d’arrêt, en tous cas au centre pénitentiaire de Fresnes, l’accès aux soins est extrêmement limité notamment du fait de la surpopulation carcérale, donc de fait, les personnes souvent n’évoluent pas ou peu pendant leur détention, rapporte Lorraine Cordary, représentante du Syndicat de la magistrature et juge de l’application des peines à Créteil. Or, pour accorder un aménagement de peine, on leur demande d’évoluer, qu’un vrai travail introspectif soit entrepris. C’est le serpent qui se mord la queue… »
Concilier objectifs de réinsertion et protection
De manière générale, les juges de l’application des peines interrogés estiment être aujourd’hui plus exigeants qu’ils ne l’étaient auparavant avec ces condamnés. Les aménagements de peines sont d’autant moins facilement accordés que de récentes modifications législatives viennent encore en compliquer l’octroi dans ce type de contentieux. Un décret du 24 décembre 2021, adopté à la suite du drame d’Epinay-sur-Seine[15], oblige désormais l’autorité judiciaire à aviser la victime de toute sortie de détention d’un auteur de violences conjugales.
Une prise en compte de la personne victime salutaire, qui a néanmoins des effets pervers. « Cette obligation d’information s’impose à nous à la fois pour les libérations temporaires et pour les sorties aménagées et définitives. Donc quand un condamné fait une demande de permission de sortir, même pour une durée très courte, il faut aviser la victime, ce qui n’est pas toujours simple – et peut en outre être assez anxiogène pour elle (lire page 26), souligne Ludovic Fossey, membre de l’Association nationale des juges de l’application des peines (Anjap). Pour garantir cela, il faut prévoir une quinzaine de jours entre l’examen en commission d’application des peines et la date de la sortie, ce qui peut être compliqué quand ce sont des rendez-vous avec des structures d’accompagnement, avec Pôle emploi, etc. Cela rend aussi presque impossible d’autoriser une sortie en urgence, lorsque survient un décès dans leur famille par exemple. »
Pour ce magistrat, « le risque, c’est de ne plus accorder de permission de sortir aux gens condamnés pour ces faits-là pour ne pas avoir à informer la victime. Et dans ce cas, on se retrouve avec des sorties sèches, pas préparées. Il faut trouver un équilibre entre la protection des victimes et les objectifs de réinsertion », conclut-il.
Les deux ne s’opposent d’ailleurs pas forcément : les études montrent en effet que plus une fin de peine est préparée et accompagnée, moindre est le taux de récidive[16]. Une autre recherche d’ampleur, belge cette fois, dresse un autre constat : en matière de violences conjugales, « au plus la décision judiciaire est lourde, au plus également le taux de récidive est élevé »[17]. Celui-ci est ainsi évalué à 24 % en cas de classement sans suite, à 36 % en cas d’alternative aux poursuites, à 44 % en cas de détention provisoire et à 53 % après une condamnation, « avec dans ce dernier cas des résultats très similaires pour l’amende ou l’emprisonnement ».
S’il est probable que des caractéristiques spécifiques à chacun des groupes considérés puissent expliquer en partie ces résultats, « l’hypothèse selon laquelle la réaction judiciaire mettrait un frein au cycle de la violence conjugale ne trouve en tout cas aucune confirmation statistique, au contraire », souligne la chercheuse, rejoignant les constats d’autres travaux menés à l’étranger[18]. Si l’incarcération peut, dans certaines situations d’urgence, permettre de protéger une victime provisoirement, cette « solution » est donc loin d’être sécurisante sur le long terme.
Dépasser l’approche répressive
Ces dernières n’en sont parfois que trop conscientes (lire page 26). Telle cette femme dont le compagnon purge actuellement une peine de dix-huit mois de prison pour des violences verbales et dégradations matérielles à son encontre commises sous l’effet de l’alcool. Ce n’était pas la première fois. Elle dresse des précédentes condamnations de son partenaire un bilan amer : « La prison n’empêche pas la récidive. Elle détruit mais ne résout pas les problèmes psys, les addictions… La sortie est “sèche”, pas assez de contrôle, de soutien. » « J’aurais préféré qu’il y ait des soins, un suivi, pas de la prison ferme car ça n’arrange rien du tout », confie une autre femme, dont le conjoint a écopé, en comparution immédiate, d’une peine de dix-huit mois pour des violences à son encontre.
Une interdiction de contact a aussi été prononcée. « J’en ai souffert, témoigne-t-elle. J’aurais préféré qu’il n’y ait rien de tout ça. Si c’était à refaire, je ferais les choses différemment. Ça été trop vite et trop sévère. »
Si ces témoignages peuvent poser la question de l’emprise, ils n’en sont pas moins à prendre au sérieux pour ce qu’ils disent du traitement encore trop souvent exclusivement répressif de ces situations. Le risque qui se lit en filigrane : que dans le futur, les victimes préfèrent passer sous silence des violences, si celles-ci venaient à se reproduire.
« Parmi les dossiers classés que j’ai pu examiner, il y a des plaignantes qui se désistent de la procédure, notamment dans le cadre conjugal, parce qu’elles ne veulent pas aller jusqu’à envoyer leur conjoint, amant, petit ami devant une cour d’assises et en prison. Parce qu’elles l’aiment, que c’est le père des enfants, qu’elles estiment qu’il a compris, ou qu’il a surtout besoin d’aide, d’être soigné. Peut-être que si le viol était passible d’une moins lourde peine que celle dont il est passible aujourd’hui, il y aurait plus de plaintes ? », s’interroge ainsi la sociologue Véronique Le Goaziou, à l’issue d’un long travail d’enquête sur le traitement des viols par la justice (lire page 23).
Aussi, c’est bien la nécessité impérieuse d’une prise en charge globale qui émerge de tous ces témoignages – ce que tente d’ailleurs bien souvent de faire la justice à travers certaines alternatives aux poursuites ou peines en milieu ouvert. Mais le maillage territorial en matière d’accompagnement psychologique, médicosocial et socioprofessionnel est loin d’être optimal et les structures sont bien souvent saturées.
À ce sujet, le Grenelle contre les violences conjugales a permis une avancée, en impulsant la création de centres de prise en charge des auteurs de violences conjugales un peu partout en France (lire page 28). Ces derniers ont pour ambition de structurer et visibiliser l’offre d’accompagnement sur les territoires. Afin d’amorcer un travail sur toutes les facettes de la problématique, y compris hors du cadre judiciaire.
Sur ces situations comme sur bien d’autres, la justice ne peut pas tout – et fait même parfois plus de dégâts (lire pages 23 et 38). Aussi y a-t-il urgence à inventer d’autres formes d’interventions, soucieuses à la fois des besoins des auteurs et de ceux des victimes. C’est également à un important travail de prévention et de déconstruction des rapports de genre et des masculinités qu’il s’agit de s’atteler (lire page 33). En ce domaine-là, le chemin est encore long.
Le 17 octobre, des travailleurs sans papiers, soutenus par les syndicats, collectifs, associations de solidarité aux sans-papiers et activistes écologistes, ont occupé le chantier des JO Arena Bouygues pour exiger leur régularisation. Cette action coup de poing, coordonnée depuis des mois, a permis d’obtenir une rencontre avec Bouygues et la ville de Paris et la promesse de régularisations de 630 salarié.es.
Le combat des travailleuses et travailleurs sans papiers relève de la justice sociale et écologique : défense des droits humains, droits du travail, droit à la santé, lutte contre l’exploitation des terres, des femmes et des hommes partout dans le monde.
Les victoires montrent que la mobilisation porte ses fruits. C’est aussi une bonne nouvelle pour le milieu militant dans son ensemble alors que passage de la loi Immigration au Sénat à partir du 6 novembre augure le pire dans un contexte où la droite et l’extrême droite assimilent immigration, délinquance et terrorisme.
Dans ce contexte, se tenait, le 8 novembre dernier, une soirée de soutien aux grèves des sans-papiers, au cirque électrique et dans l’émission de ce jour, nous entendrons les prises de parole des grévistes et leurs soutiens.
Dans cette émission, vous pourrez entendre les interventions ayant eu lieu lors de la journée internationale de solidarité avec les peuples autochtones des Amériques, le 14 octobre dernier, organisée par le Comité de solidarité avec les Indiens des Amériques dans le cadre de l’action globale “LE SUD RÉSISTE !”. Ainsi, en première partie d’émission, vous pourrez entendre lors de la première table-ronde : “Peuples autochtones en défense de la Terre-Mère et de l’eau face aux Mégaprojets”, des militants des peuples maya, cheyenne et yukpa. Puis, en seconde partie d’émission, ce sera une autre lutte amérindienne qui sera à l’honneur. Mais cette fois-ci en France, avec une délégation du peuple des kali’na, venue de Guyane.
Dans l’émission de jours, vous allez entendre la présentation du livre : antisionisme, une histoire juive, qui se tenait le 8 novembre 2023 au maltais rouge à paris. La présentation de cet ouvrage était assurée par les autrices : Béatrice Orés, Michèle Sibony et Sonia Fayman. Ce livre est publié aux éditions syllepse.
Lors de la cérémonie officielle commémorant le 75ᵉ anniversaire de la rafle du Vél d’Hiv, le président français déclarait devant le chef du gouvernement israélien, Benyamin Netanyahou : »Nous ne céderons rien aux messages de haine, nous ne céderons rien à l’antisionisme, car il est la forme réinventée de l’antisémitisme ».
Cette affirmation est le point d’orgue d’un processus d’assimilation de toute critique de l’État d’Israël à l’antisémitisme et qui ignore délibérément l’opposition d’intellectuel·les, de rabbins, de militant·es et d’organisations juives au projet puis aux objectifs, faits et méfaits de l’État israélien.
On retrouvera dans ce recueil les prises de position venues de divers horizons intellectuels, toutes contestant, pour des raisons morales ou politiques, la légitimité, l’intérêt et les conséquences du projet sioniste.
Hannah Arendt, Daniel Bensaïd, Judith Butler, Hilla Dayan, Isaac Deutscher, Henryk Erlich, Karl Kraus, Ilan Pappé, Maxime Rodinson, Abraham Serfaty, ou encore Michel Warschawski sont quelques-uns des noms qui jalonnent ce recueil de textes courant de 1885 à 2020 où se fait entendre la diversité des voix – religieuses ou révolutionnaires, libérales ou humanistes – qui se sont élevées contre le sionisme en Occident, au sein du monde arabo-musulman et en Israël même.
La maire d’Aubervilliers, Karine Franklet, annonçait en plein conseil municipal, Le 28 septembre dernier, vouloir fermer la Bourse du travail le 31 décembre 2023 et mettre fin à la convention de mise à disposition des locaux, pour en confier la gestion au service municipal de la vie associative et priver travailleur·ses et habitant·es de cette commune de 100 000 habitant·es d’un lieu de défense des droits, de rencontre et d’organisation collective. Une mobilisation s’organise pour contrer ce projet antisocial !
Le 7 novembre, une réunion pour la mise en place d’un comité de défense de la bourse du travail a été appelée par l’intersyndicale 93 et deux jours plus tard un rassemblement intersyndical se tenait place de la mairie à l’occasion du conseil municipal. Et aujourd’hui, dans cette émission, nous vous proposons l’écoute du reportage réalisé ce jeudi 9 novembre à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis).
Suite à la demande de rendez-vous, une délégation de syndicats est ressortie du rendez-vous qui s‘est déroulé ce vendredi, en fin de matinée, avec la maire UDI d’Aubervilliers, Karine Franclet, dépité. En effet, la ville a confirmé aux syndicats sa position, notamment liée au coût que représente le lieu. Et elle a réaffirmé qu’elle mettrait fin à la convention de mise à disposition des locaux, au profit de la vie associative et avec la possibilité pour les organisations des travailleurs de réserver des salles.
D’autres actions sont prévues dans les semaines à venir pour poursuivre cette mobilisation et faire plier la municipalité :
vendredi 17 novembre : projection du film Douce France, de Mogniss H.Abdallah et Ken Fero et auberge espagnole à 19 h à la Bourse du travail, 1 rue des 21 appelés, Aubervilliers
samedi 25 novembre : manifestation à 10 h Mairie d’Aubervilliers en direction du Fort d’Aubervilliers
vendredi 1ᵉʳ décembre : manifestation nocturne à 18 h de la Mairie d’Aubervilliers à la Bourse du travail, suivie d’une cantine
Contact mail : boursedutravail.aubervilliers@orange.fr
Aujourd’hui nous vous diffusons le montage d’un débat intitulé : Libertés d’expression et associative : l’ordre et la liberté font-ils bon ménage ? Ce débat se déroulait dans le cadre des 8ᵉ rencontre des lanceurs d’alerte qui avait lieu à la plaine st Denis les 10, 11 et 12 novembre 2023.
Dès 2021, nous alertions sur la question des libertés associatives et des tentatives de limitation des actions associatives, notamment en référence au rapport parlementaire visant à « juguler les entraves aux activités légales » qui, au moment où se discutait la protection des lanceurs d’alerte, invitait le gouvernement à criminaliser des actions permettant d’alerter la population.
Cette année 2023, les déclarations criminalisant les actions de préservation de l’environnement, les convocations devant les tribunaux ou par les commissions d’enquêtes parlementaires d’associations cherchant à médiatiser leurs messages, voire encore la dissolution des « soulèvements de la terre » (suspendue par le Conseil d’État), marquent probablement le franchissement d’une étape dans le traitement politique des libertés associatives.
La Ligue des Droits de l’Homme a été particulièrement ciblée, y compris par le ministre de l’Intérieur, pourtant garant des droits de l’Homme comme de la force publique sous son contrôle. La déclaration du Préfet Nuñez considérant que des manifestations d’extrême droite radicale ne sont pas un problème dès lors qu’elles ont lieu dans l’ordre… n’est pas plus rassurante sur la gestion des libertés publiques…
Qu’il faille s’interroger sur la liberté d’expression constitue déjà une alerte dans un pays où des Maires demandent à ceux qui veulent distribuer des tracts de se déclarer pour les y autoriser, alors que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen et la Charte des droits fondamentaux de l’Union Européenne s’imposent…
Intervenants : Nathalie TEHIO Lucie SIMON Julien PORCHER Julien TALPIN
Le lundi 6 novembre de 19h à 21h se tenait à la bourse du travail de Paris une réunion d’information sur la réforme du RSA, organisée par Stop précarité. Les invités pour en causer étaient Alain Guezouqui qui est au RSA et qui sait de quoi il parle et Sophie Rigard du Secours Catholique.
Prochaine rencontre : Lundi 4 décembre, sur les Prudhommes, avec comme invité : Hélène Meynaud (universitaire) et Rachel Spire (avocate), à la bourse du Travail de Paris 85 rue Charlot salle Petite Congrès.
Stop Précarité (evelyne.perrin6@orange.fr) tel 06 79 72 11 24, et Changer de Cap (contact@changer2cap.net). L’examen à l’Assemblée nationale de la réforme du revenu de solidarité active s’est conclu dans l’indifférence générale. Loin d’une politique ambitieuse de retour à l’emploi, elle conduira à des radiations massives, dénonce le député de La France insoumise Hadrien Clouet.
Alors que l’Assemblée nationale a achevé mardi 4 octobre l’examen de la loi dite « pour le plein emploi », qui sera adoptée par un vote solennel le 10 octobre, le député insoumis de Haute-Garonne, Hadrien Clouet, par ailleurs sociologue du travail et coauteur de Chômeurs, vos papiers ! (Raisons d’agir), revient sur les conséquences de l’adoption des quinze heures d’activités obligatoires pour les allocataires du revenu de solidarité active (RSA).
Outre un risque accru de radiation massive pour des millions de personnes vivant aujourd’hui de cette aide, il y voit l’accomplissement d’une « offensive néo-conservatrice » démarrée sous Nicolas Sarkozy. Et à laquelle la gauche a de plus en plus de mal à s’opposer.
Mediapart : La semaine dernière, l’Assemblée nationale a voté l’imposition de 15 heures de travail obligatoire pour les allocataires du RSA. Cette mesure est-elle applicable au vu du manque de moyens dévolus à l’accompagnement des allocataires ?
Hadrien Clouet : Tout le texte est une usine à gaz largement inapplicable. Rappelons que son point d’entrée, c’est d’abord l’inscription automatique de tout le monde comme demandeurs d’emploi. Cela veut dire que demain, il y aura, en plus des chômeurs, deux millions d’allocataires du RSA, mais aussi leurs conjoints et leurs conjointes – puisque le RSA est versé au ménage –, et également les personnes en situation de handicap qui devront pointer à Pôle emploi.
Cette inscription généralisée des personnes dans la catégorie « demandeurs d’emploi » se fait à la fois dans une optique de contrôle – il s’agit de recenser tout le monde dans le même fichier pour mieux lutter contre la fraude –, mais aussi dans l’idée de faire signer à tout le monde, y compris aux allocataires du RSA, des « contrats d’engagement » qui créent une obligation nouvelle : celle d’accepter des heures d’activités obligatoires, sous peine de suppression totale de l’allocation.
Que recouvre concrètement le terme d’« activités » ?
Justement, on n’en sait rien ! Durant les débats dans l’hémicycle, on nous a dit que ce serait à la discrétion des agents de Pôle emploi qui décideraient de quelle activité ils attribueraient à untel ou unetelle.
Au commencement des discussions, Olivier Dussopt [ministre du travail – ndlr] nous expliquait qu’il s’agirait d’activités socioculturelles. Puis Paul Christophe, le rapporteur du texte, a bien spécifié qu’il s’agirait de stages, de mises en situation professionnelles, de méthodes de recrutement par simulation, bref, d’activités qui sont en fait du travail. Au passage, cette obligation d’activité en échange de l’allocation signifie aussi que la formation n’est plus rémunérée, ce qui était un acquis depuis 1945.
Une fois dit cela, tout reste flou. Qui peut assurer que les gens trouveront quinze heures d’activité ? Qui va décider du contenu des 15 heures : les directions d’agences, les conseillers Pôle emploi, les agents du contrôle de la recherche d’emploi qui font tout à distance, sans jamais voir les bénéficiaires ? Quelles activités seront proposées
À La Réunion [où a eu lieu une expérimentatio?n des heures d’activités obligatoires – ndlr], on s’est aperçu que les allocataires faisaient du réassort dans un magasin pour les soldes d’hiver… Là, on est clairement dans une déstabilisation du salariat, qui crée des logiques de dumping.
La loi précise qu’il y aura des exemptions, par exemple pour les mères isolées…
Là encore, c’est le grand flou ! Et ce n’est jamais bon : puisque le principe des quinze heures est passé, il suffira de décrets et de circulaires pour exclure ou inclure les gens dans le dispositif et ce sera donc discrétionnaire. C’est la même chose pour ce qui concerne les sanctions : le gouvernement met le principe dans la loi, et renvoie aux agents en première ligne la tâche de déterminer les cas. Il s’agit de créer des situations dérogatoires au salariat pour baisser le coût du travail.
L’individualisation du suivi n’est-elle pas préférable à des règles imposées d’en haut ?
Personnellement, j’ai confiance en l’humanité des conseillers de Pôle emploi qui n’ont d’ailleurs jamais vraiment appliqué la loi sur « l’offre raisonnable d’emploi » instaurée par Sarkozy, puis poursuivie par Hollande et Macron. Mais ce qui m’inquiète, c’est que, puisqu’il n’y aura pas assez de conseillers Pôle emploi, on va voir se développer les plateformes à distance et se renforcer l’intégration des opérateurs privés de placement au sein même du service public de l’emploi – c’est ce que permet la transformation de Pôle emploi en « France Travail ».
Je crains que la logique de gestion par des plateformes automatisées et par le privé aboutisse au contournement du « filtre » des conseillers, et que le nombre de radiations se multiplie pour un oui ou pour un non. Soit parce que les gens ne peuvent pas se payer un billet de train ou parce qu’ils ont un pépin de wifi, ce qui les empêche d’honorer des rendez-vous par exemple.
D’ores et déjà, la plupart des 300 000 personnes radiées par semestre du chômage le sont pour des histoires de rendez-vous ratés, pas par quelconque volonté de nuire des conseillers Pôle emploi. Le fait d’intégrer les allocataires du RSA à ce système va rajouter des tracasseries administratives à des gens qui n’arrivent déjà pas à gérer leur vie au quotidien et conduire à des radiations de masse.
En quoi cette réforme du RSA s’inscrit-elle dans un projet politique global ?
Pour moi, le fil rouge depuis le début de l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir, c’est le développement du travail gratuit. On le retrouve à plusieurs endroits, que ce soit dans le SNU [service national universel – ndlr], dans le service civique, dans l’activité obligatoire pour toucher le RSA, dans la promotion du bénévolat…
Il y a aussi eu la réforme de l’assurance-chômage, l’an dernier, qui a fait perdre des revenus aux gens. Et on retrouve aussi cette logique dans le projet de loi sur l’immigration : les régularisations sur les métiers en tension ne vaudront en réalité que pour un an, ce qui fait que les gens resteront prisonniers de leur travail, dans un secteur sous-payé, et ne pourront pas évoluer professionnellement. Dans tous ces cas, il s’agit de créer des situations dérogatoires au salariat pour baisser le coût du travail. On est face à une offensive néo-conservatrice qui consiste à dire que les pauvres coûtent cher et qu’on doit décider de leur vie à leur place.
N’y a-t-il pas un discours à tenir, à gauche, sur l’accompagnement vers l’emploi ? La droite vous accuse souvent de ne rien proposer pour sortir les gens des minima sociaux.
Il y a deux choses. D’abord, nous considérons qu’on a le droit à la survie dans ce pays. Mon courant politique historique, celui de la Révolution française, me fait dire que la société doit garantir un minimum de dignité à ses membres, et que cela doit être inconditionnel. Quand bien même je ne suis pas du tout rocardien, je dois reconnaître que le RMI [revenu minimum d’insertion – ndlr] était en cela une vraie avancée.
Ensuite, sur le retour à l’emploi, je crois que, contrairement à ce que pense la droite qui voit des « assistés » partout, tout le monde veut travailler, ne serait-ce que parce que le Smic, c’est le double du RSA ! Mais il faut comprendre la difficulté des gens : le fait d’être pauvre n’aide pas à aller au travail, car il faut de l’argent pour prendre les transports, mettre des habits corrects pour les entretiens d’embauche, etc. C’est parce que les gens ont de l’argent qu’ils trouvent du boulot.
Il faut donc une politique qui permette de faciliter l’accès à l’emploi. Cela passe par la lutte contre les discriminations à l’embauche – il n’y a pas que le nom de famille qui compte : les exigences en matière de qualification sont énormes, alors que les deux tiers des postes ne nécessitent pas de formation initiale pour les tenir –, ou encore par l’amélioration des conditions de travail : plein de boulots ne sont pas pourvus car les salaires sont trop bas, que les horaires sont infaisables, ou qu’il faut déménager et cela coûte cher de déménager…
Pendant les retraites, on a vu la gauche parlementaire très vindicative contre le projet du gouvernement… Le contraste est saisissant avec les discussions sur cette réforme du RSA : l’hémicycle était presque vide, et la gauche a échoué à bloquer l’article 2 sur les 15 heures d’activités à trois voix près… Comment l’expliquez-vous ?
Il y a dix ans, cette réforme du RSA aurait suscité un tollé à gauche. Mais désormais il y a ce vieux discours qui revient d’opposition factice entre « la gauche du travail » et « la gauche des allocs ». C’est absurde, car il faut comprendre que c’est par les allocations qu’on trouve du travail.
Depuis Sarkozy, puis Hollande et Macron, on est face à une offensive néo-conservatrice qui consiste à dire que les pauvres coûtent cher et qu’on doit décider de leur vie à leur place.
Alors que franchement, le RSA ne coûte rien à l’État, ce discours infuse, y compris chez certains élus locaux de notre camp, qui abdiquent face aux discours sur l’assistanat qu’ils entendent dans leur circonscription par des gens qui répètent ce que dit le Rassemblement national (RN)…
Le RN était d’ailleurs largement absent de l’Assemblée nationale pendant les discussions…
Le RN était très mal à l’aise, d’où leur absence lors des débats. Dans le fond, les députés sont pour davantage de contrôle et de sanctions, sauf qu’une partie de leur électorat, dans le Nord, est au RSA, donc ils ont été obligés de voter contre. Plus étonnant en revanche : le RN a refusé l’exemption des 15 heures obligatoires pour les agriculteurs.
Le texte peut-il encore être modifié ?
Il pourra y avoir encore quelques changements en commission mixte paritaire, où LFI et Les Républicains seront majoritaires. Nous pourrons peut-être nous opposer au changement de nom de Pôle emploi en France Travail qui va coûter énormément d’argent pour rien du tout.
Le Collectif Changer de Cap, créé en 2019 par des gilets jaunes et militants alternatifs partout en France (voir son site https://changerdecap.net) est mobilisé depuis le début de l’année sur les dérives numériques, éthiques et politiques des Caisses d’allocations familiales. Le recueil de témoignages, les analyses menées ont mis en lumière une véritable maltraitance institutionnelle envers les personnes en situation de précarité, quand les CAF ne sont pas carrément hors-la-loi.
Nous travaillons activement pour que l’humain retrouve sa place centrale au sein de l’administration et des organismes de protection sociale. Nous mènerons avec vous allocataires, la lutte contre les pratiques illégales et discriminatoires qui résultent de la gestion actuelle des CAF, donnant la priorité à la réduction des coûts, et des objectifs de contrôle social sur lesquels repose cette gestion aux dépens des plus précaires. Nous travaillons avec des juristes et avocats en vue de rédiger un petit guide de défense des allocataires. D’autres acteurs, collectifs, syndicats et associations travaillent aujourd’hui activement pour faire connaitre les dangers et les conséquences de la dématérialisation des services publics (voir notamment les travaux : Accès droit sociaux, ATTAC, Emmaüs Connect, Fondation Abbé Pierre, Fondation Gabriel Péri, Le Mouton numérique, la Quadrature du net, etc…).
La militante palestinienne Mariam Abudaqa a été interpellée pendant la nuit de mercredi à jeudi à Paris, quelques heures après la validation de son expulsion par le Conseil d’Etat, a appris l’Agence France-Presse (AFP) de sources policières et auprès de son avocate. Le Conseil d’Etat a donné son aval mercredi à l’expulsion de la militante du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP), une organisation de gauche radicale qualifiée de « terroriste » par Israël et l’Union européenne. La plus haute juridiction administrative française a ainsi infirmé une décision du tribunal administratif de Paris, qui avait suspendu l’arrêté d’expulsion pris par le ministère de l’intérieur. La militante a été arrêtée dans le 13e arrondissement, puis placée sous le régime de la « retenue administrative », elle sera assignée à résidence ou envoyée en centre de rétention, a précisé son avocate. Elle possède, selon cette dernière, un billet d’avion pour l’Egypte réservé pour le 11 novembre. Mme Abudaqa, qui est âgée de 72 ans, avait obtenu au début d’août à Jérusalem un visa de cinquante jours pour se rendre en France, où elle devait participer à diverses conférences sur le conflit israélo-palestinien. Arrivée en septembre, elle a donné deux conférences malgré leur interdiction et a manifesté pour la libération du militant du FPLP Georges Ibrahim Abdallah, condamné à la perpétuité en 1987 pour l’assassinat de diplomates américain et israélien.
Mariam Abudaqa est une militante palestinienne de longue date. Elle souhaite expliquer son implication obstinée pour la défense des femmes palestiniennes, faisant face sur deux fronts, l’occupation de leur pays et les structures patriarcales de leur société. Gazaouie et femme, elle décrit la situation tragique immédiate dans la bande de Gaza. Elle milite pour les droits des Palestiniennes dans les prisons israéliennes; les droits des femmes rurales, des femmes réfugiées et des étudiantes vivant sous l’occupation et l’encerclement. Elle situe son combat dans les luttes des femmes à l’échelle internationale.
Le mardi 7 novembre 2023 à 11 h, les associations «Association France Palestine Solidarité » (AFPS) et « Union Juive Française pour la Paix » (UJFP) organisait une conférence de presse au Centre international de culture populaire (CICP), 21ter Rue Voltaire, 75011 Paris, dans laquelle elle prenait la parole. Dans cette émission nous vous diffusons cette conférence en intégralité.
Les chantiers des JO ont commencé malgré la crise sanitaire et les résistances locales, et les retards accumulés accélèrent leurs cadences et dégradent les conditions de travail. Les conséquences sont nombreuses : quartiers irrespirables (accélération de la bétonisation et de la pollution), inabordables (spéculation immobilière, entraînant l’expulsion des pauvres et des modestes), policés (imposition des normes des investisseurs et du tourisme, surveillance et répression), implantation de grandes enseignes, réduction des espaces publics et des parcs, disparition d’espèces protégées… et la liste est encore longue. Les différents saccages engendrés par les Jeux Olympiques ne font qu’accélérer les problèmes écologiques et les injustices sociales dans nos villes, et nous privent des moyens de décider collectivement de ce qui nous entoure.
Vendredi 29 septembre, lancement de la carte des Saccages des Jeux Olympique et Paralympique 2024 conçues avec de nombreux·ses camarades et collectifs.
Dans cette émission, nous débuterons par le reportage réalisé ce 29 septembre 2023 sur le Toxic tour à vélo, qui partait devant le village des athlètes en construction, vers différents sites du chantier.
La seconde partie, nous mènera à la Bourse du travail de Saint-Denis ou se tenait, le même jour, la présentation de la carte et où de nombreux collectifs s’expriment sur la manière dont ils et elles s’organisent contre les JOP 2024.
Le 4 novembre 2023, s’est déroulée la première manifestation autorisée en soutien à la résistance palestinienne, depuis le 7 octobre, à l’appel du collectif Urgence Palestine. Le Collectif Urgence Palestine rassemble des citoyen-ne-s, des organisations et mouvements associatifs, syndicaux et politiques mobilisés pour l’auto-détermination du peuple palestinien. Solidaires, nous menons une lutte commune contre l’oppression coloniale et les guerres impérialistes. Mobilisés dans l’urgence, nous organisons, autour des Palestinien-ne-s en tant que premiers et premières concerné-e-s, la lutte pour la constitution d’un front large, populaire, démocratique, défendant les exigences et les mots d’ordre suivants :
Pour un cessez-le-feu immédiat et la fin du blocus.
Halte au massacre, Halte au siège.
Halte à la complicité du gouvernement français avec les crimes israéliens.
Non à la répression de la solidarité avec la lutte du peuple palestinien.
Ensemble, résistons à l’occupation, au colonialisme et à l’apartheid !
En appel à la prochaine manifestation du 11 novembre prochain, à 15h, au départ de la place de la République, nous diffusons aujourd’hui les enregistrements que nous avons pu réaliser le 4 novembre dernier.
Image présentant les bâtiments de psychiatrie de l’hôpital Saint-Maurice menacés par le projet immobilier, par le « Collectif pour l’avenir des Hôpitaux de Saint-Maurice, les Murets », CC BY-SA 4.0 Deed
Dans cette émission, il sera question tout à la fois de psychiatrie, du soin plus généralement, d’architecture, de défense du patrimoine et d’écologie. Une association et une articulation assez rare pour être relevée, alors que les luttes hospitalière, trop souvent, se confinent dans un champ restreint. Cette conjonction est portée par le « Collectif pour l’avenir des Hôpitaux de Saint-Maurice, les Murets ». Il s’agit d’un collectif aux composantes plurielles, regroupant soignant-es, usager-ères, riverain-es, associations écologistes, syndiqué-es et élus, qui s’est constitué en mai 2023 à l’occasion d’un projet immobilier, porté tout à la fois par la direction (Direction de Groupement Hospitalier de Territoire 94 Nord), par l’Agence Régionale de Santé et par la mairie de Saint-Maurice.
En première partie d’émission, vous pourrez ainsi entendre un des morceaux choisis d’intervention du collectif ayant eu lieu dans le cadre des Semaines de la Folie Ordinaire, articulées avec des interviews réalisées lors d’une manifestation locale, à Saint-Maurice, deux jours plus tard, le mardi 17 octobre. Y sera développé les différentes dimensions de la lutte en cours. La seconde partie d’émission quant à elle, se focalisera sur des réflexions plus spécifiques aux luttes dans la psychiatrie, au travers de discussions en présence du « Collectif pour l’avenir des Hôpitaux de Saint-Maurice, les Murets ». Lequel reviendra sur son expérience.
Pour plus d’informations, ou demander à être inscrit à la liste de diffusion, contactez : collectifavenirhsmmurets@gmail.com
Prochaines dates : – Réunion publique en présence du « Collectif pour l’avenir des Hôpitaux de Saint-Maurice, les Murets », le mercredi 8 novembre 2023 au 12 Rue Paul Verlaine, à Saint-Maurice. Voir aussi Agenda militant – Conférence par l’architecte Eric de Thoisy dans le cadre d’un séminaire sur le thème de l’architecture et du care (soin), où seront présents des membres du collectif. Il se tiendra le jeudi 9 novembre, sur le bateau l’Adamant. Ce dernier est amarré quai de la Rappée au niveau du pont Charles de Gaulle. Voir aussi la première conférence sur ce le même sujet : https://chaire-philo.fr/rester-vertical-partie-1-2/
Le groupe Casino ou Casino Guichard-Perrachon est une entreprise française de grande distribution, fondée le 2 août 1898 Le groupe Casino ou Casino Guichard-Perrachon est une entreprise française de grande distribution, fondée le 2 août 1898
Outre les magasins Casino, le groupe Casino exploite les magasins : monoprix, Franprix, vival, spar, sherpa,Naturalia, leader price et la plate-forme en ligne Cdiscount. En 1997, le groupe Casino passe sous la direction de Jean-Charles Naouri. Le siège de Casino est situé à Saint-Etienne.
Sous la direction de Jean-Charles Naouri, PDG du groupe Casino, connaît une situation catastrophique liée à une dette très élevée de 6 milliards d’euros. Cet état de fait ne peut être imputé qu’au PDG qui a mis en place la stratégie économique et financière qui a conduit l’entreprise à des résultats déficitaires ces dernières années.
Pour renflouer les caisses afin de diminuer la dette, deux principaux et potentiels repreneurs, le milliardaire Daniel Kretinsky et 3F (composé du trio Xavier Niel, Matthieu Pigasse et Alexandre Zouari qui est l’actuel dirigeant du groupe TERACT) ont fait des propositions. La proposition de 3 F de 450 millions d’euros en montant converti en fonds propres n’apporte pas plus de garanties.
Pour parler de la situation dans le groupe Casino, nous recevons dans l’émission de ce jour en direct : Dominique, Adama et Alain, tous les trois salarié-e-s et syndicalistes à Monoprix.
En fin d’émission, nous serons avec un syndicaliste, qui nous parle du projet de la mairie d’Aubervilliers qui annonce vouloir fermer la Bourse du travail et des mobilisations à venir. Les organisations syndicales invitent tou-tes celles et ceux qui souhaitent contribuer à la mobilisation pour défendre la Bourse du travail : mardi 7 novembre 2023 à 18 h, lancement du comité de défense de la Bourse du travail d’Aubervilliers, 1 rue des 21 Appelés 93300 Aubervilliers.
Jeudi 9 novembre 2023 à 18 h, rassemblement Place de la Mairie d’Aubervilliers à l’occasion du Conseil municipal
Vous allez entendre la présentation du livre de Mathieu Bellahsen paru le 31 août aux éditions Libertalia. La politique d’invisibilisation, de déshumanisation, d’enfermement, d’isolement et de contention est une logique qui dépasse largement le secteur psychiatrique. Sous couvert de réduction budgétaires, de gestion performante, elle colonise nos cerveaux et nos pratiques.
La lecture du livre de Mathieu Bellahsen ; Abolir la contention, est un bon moyen pour interroger nos réflexions et nos actes en se nourrissant des nombreux exemples de résistances qui y sont décrits.
« Quoi qu’on en dise, attacher une personne à un lit n’a jamais été et ne sera jamais thérapeutique. La contention est un contrôle physique témoin d’un corps-à-corps brutal qui touche en premier lieu l’intégrité des psychiatrisé·es. La contention est le symptôme du système contentionnaire, réagencement de l’univers asilaire à l’heure de la e-santé mentale et de ses promesses virtuelles.
Là comme ailleurs, la dématérialisation annoncée s’accompagne de matérialités renforcées. Moins de relations humaines, c’est plus de sangles et de contraintes. Le système contentionnaire a sa mécanique d’entraves. Contention du corps social par l’imaginaire sécuritaire. Contention des soins par des pratiques sans âmes, « cérébrologiques ». Contention du langage par des euphémisations, des banalisations, des renversements des mots et du sens. Contentions financière et législative adaptées au corsetage néolibéral.
Rompre le silence et les complicités autour de la contention est une nécessité pour ne plus laisser le sadisme ordinaire et les abus s’instituer au grand jour comme si de rien n’était. Abolir la contention est une première brèche dans le système contentionnaire. Notre expérience en témoigne. Il est possible de ne pas attacher. Il est possible, collectivement, de faire autrement, que ce soit au niveau des pratiques que dans la société. »
Le réseau Stop précarité né en 2001 à l’initiative et en soutien à de jeunes salariés de la restauration rapide et du commerce en grève chez Macdonald, Pizza Hutt, Maxi-livre ou la Fnac, a décidé de s’organiser face à la précarité du travail. Cette précarité n’a cessé de se développer sous de multiples formes : sous-traitance, auto-entreprenariat, contrat, ubérisation, emploi sans titre de séjour, etc Les luttes se multiplient et obtiennent des victoires, mais le droit du travail ne cesse de reculer. Connaître le droit du travail, ce qu’il en reste, permet de mieux se défendre, face à son patron, d’organiser la solidarité avec ses collègues car la lutte permet seule de conserver ses droits au travail et d’en arracher de nouveaux. Et depuis 2004, des juristes du travail, des syndicalistes, CGT, CNT, Solidaire, proposent bénévolement des cours mensuels gratuits de droit du travail, droit social, ouverts à tous et toutes sans inscription préalable. Nous nous sommes rendus le lundi 2 octobre 2023 pour écouter l’un de ces cours organisé par Luc Chevalier qui est à Sud emploi et Yoann Pikto qui est de la CGT pôle-emploi. Le thème : les chômeurs face à France Travail.
France Travail obligatoire
Cette réforme fait partie d’une logique générale d’augmenter les bénéfices des patrons, précariser toujours plus les travailleurs, désencadrer le travail. Faire disparaître les droits, les principes, pour mettre chaque travailleur potentiel à la merci des patrons et de l’État. Plonger chacun d’entre nous dans l’insécurité. Les plus précarisés, comme les allocataire du RSA seront obligé·e·s d’accepter des emplois dégradés (contrats 0 heures, auto-entreprise, pénibilité, salaires dérisoires, accidents du travail etc.), ce qui permettra au patronat de recruter sans devoir offrir des conditions de travail décentes, affaiblissant la situation de tous les travailleur·se·s. Cet objectif se retrouve dans la réforme des retraites, la réforme du lycée professionnel, ou encore dans une loi comme le projet « travail-immigration » permettant la régularisation temporairement de sans-papier, à conditions qu’ils et elles acceptent les emplois dont personne ne veut plus. Et citons la récente réforme de l’assurance chômage, qui fait varier nos droits en fonction du taux d’emploi dans la région, c’est à dire qu’elle fait de nous, et de nos droits des variables d’ajustement économique.
France Travail et la loi dite « pour le plein emploi »
Le projet de loi « pour le plein emploi » dont le vote est prévu le 10 octobre à l’Assemblée Nationale, après un vote en juillet au Sénat qui l’avait déjà durci, est une nouvelle attaque d’une gravité extrême pour tous les chômeurs, précaires, dont les allocataires du RSA. Il pousse encore plus loin la restriction de l’accès au RSA et aux allocations de chômage, et renforce la « chasse aux chômeurs » en augmentant les sanctions, une orientation mise en œuvre par Hollande avec la loi El Khomri, poursuivie à charge forcée par Macron. Cette politique avait commencé en réalité sous la présidence de Sarkozy, avec la fusion opérée entre les ANPE (agences accompagnant les chômeurs) et l’ASSEDIC (organisme collectant les cotisations des salariés et versant les allocations aux privés d’emploi). Au nom du plein emploi, il s’agit d’imposer aux privés d’emploi des conditions d’indemnisation de plus en plus impossibles à réunir, et de les obliger à accepter n’importe quel emploi mal payé et précaire. La devise est « Chômage = business ! »
1er point : l’inscription obligatoire à France Travail :
La loi imposera à tous les inscrits à Pôle emploi (qui va devenir France Travail), mais aussi à tous les allocataires du RSA et leurs conjoints, de signer un contrat d’engagement les obligeant à consacrer 15 à 20 heures par semaine aux activités d’accompagnement proposées par Pôle emploi et des boites privées. Seuls les invalides et handicapés en ont été exonérés selon un dernier amendement.
Ceci sans augmenter les moyens en personnel du service public de l’emploi, au contraire les agents de ce service seront mis en concurrence pour inscrire le plus de personnes « aptes à travailler » dans ce fichier, et les contraindre à travailler. Il s’agit bien d’une chasse aux « oisifs ». Concernant les jeunes, il faudra repérer ceux qui ne sont ni en emploi, ni en formation, avec l’aide d’organismes publics mais aussi privés. Quant aux travailleurs handicapés, en AAH ou suivis par les MDPH, la reconnaissance handicapé sera généralisée, et assortie d’une présomption d’activité en milieu ouvert, sous le contrôle des médecins du travail s’il s’agit d’accidents du travail, mais sans moyens de suivi…
Ainsi nul n’est inemployable et tous les travailleurs potentiels sont mis en concurrence. Le contrat d’engagement n’a plus rien à voir avec le projet personnel. Il se voit adopté après des expérimentations du nouveau RSA dans plusieurs départements, mais sans qu’aucun bilan n’en ait été tiré. Or ces expérimentations ont eu des résultats très variés selon les départements.
Autre point qui pose problème : Le contrat d’engagement est censé être réciproque. Or la loi en cours d’examen ne précise absolument pas les engagements du service public.
2. France Travail est un portail unique d’inscription ouvert à des opérateurs privés.
Pôle emploi offre ainsi sa base de données à tous les opérateurs privés, dont les agences d’intérim ! Déjà en 2005 Pôle emploi avait perdu son monopole. En 2022, les acteurs privés ont bénéficié de 286 millions et ce chiffre a doublé en cinq ans. Les agences d’intérim pourront employer des travailleurs en POE (préparation à l’emploi) sans qu’ils obtiennent un contrat de travail à la fin. Les chômeurs et précaires deviennent un gisement d’exploitation et de travail forcé, un business pour les organismes privés. D’ores et déjà on a assisté à une fuite massive de données personnelles d’inscrits à Pôle emploi, il n’y a aucune garantie de confidentialité.
Des agences Pôle emploi vont également fermer et seront remplacées par des agences locales d’insertion (ALI) qui se sont vues reprises par le groupe ARES, dont le CA est passé de 24 à 37 millions en deux ans, et qui a reçu le suivi des allocataires du RSA en Seine St-Denis.
3. Vers une contra-cyclité des allocations selon la conjoncture.
L’assurance-chômage met déjà les gens dans la misère. Suite aux réformes successives qui ont durci les conditions d’accès, seule 36 % des inscrits à Pôle emploi touchent une allocation, et 40 % d’entre eux perçoivent moins de 250 euros par mois. Mais cela ne suffit pas au gouvernement qui veut aller toujours plus loin, tout en prétendant faire baisser le taux de chômage, calculé sur les seuls inscrits en catégorie A, c’est-à-dire sans aucune activité. Par exemple en s’inspirant de ce qui se fait au Canada, où la durée d’indemnisation varie de 14 à 45 semaines selon le taux de chômage régional. La logique est d’ores et déjà de diminuer la durée d’indemnisation en fonction du taux de chômage. La négociation entre partenaires sociaux devient impossible, et le chômage est géré par décrets. Le gouvernement prétend qu’il y a trop d’offres d’emploi non satisfaites. C’est oublier que ce qui reste disponible sur le marché de l’emploi, ce sont des emplois de plus en plus précaires ; On trouve 1.1 million d’offres d’emploi disponibles sur le site pôle-emploi.fr, mais 80 00 seulement sont à temps plein et payés au SMIC en CDI. Le projet France Travail est avant tout idéologique, il exprime une volonté de mettre en place un contrôle social total. C’est pourquoi nous nous y opposerons par tout moyen.
Infos pratiques : Les cours de droit du travail ont lieu tous les premiers lundi du mois, d’octobre à juin, de 19h à 21h à la Bourse du Travail, 3 rue du Château d’Eau, ou 85 rue Charlot, ou 67 rue Turbigo. A suivre : – Lundi 6 novembre : Le nouveau RSA sous contrainte, Aain Guezou, au RSA, Sophie Rigard, Secours Catholique, Alain Coudert, AC !63 – Lundi 4 décembre : Les Prudhommes, Hélène Meynaud (universitaire) et Rachel Spire (avocate) – Cours prévus en 2024 sur l’intelligence artificielle, le télétravail, la maltraitance institutionnelle, le droit d’alerte…
Depuis le 7 octobre 2023, la lutte palestienne est remise sur le devant de la scène médiatique. L’ensemble des puissances internationales s’emparent de la question de sorte à négocier de futurs accords entre les unes et les autres, et le gouvernement français y voit une occasion d’accélérer sa politique intérieure sécuritaire. Rien ou très peu de choses sur le contexte politique au global, aussi bien en Israël qu’en Palestine. Encore moins sur les responsabilités occidentales d’une genèse coloniale qui s’applique aujourd’hui en Palestine.
Dans cette émission, nous vous diffusons donc un ensemble de témoignage, prise de parole et interviews qui nous semblent nécessaires pour dessiner les contours d’un mouvement international de solidarité. Tout d’abord vous pourrez entendre le témoignage d’une rescapée du kibboutz de Beeri. Ensuite, nous diffusons l’interview de Pierre Stanbul, représentant de l’Union des Juifs Français pour la Paix. Puis, vous entendrez une prise de parole réalisée au Vigan lors d’un rassemblement de solidarité avec le peuple palestinien interdit. Enfin, nous terminerons avec l’interview de Guy Dardel, membre du Mouvement Immigration et des Banlieues, qui reviend sur l’histoire des mobilisations de solidarité avec la Palestine depuis les années 90.
Le 7 octobre dernier, le Hamas a lancé une offensive d’envergure contre Israël, la plus importante depuis plusieurs années. Cette offensive cause plus de 800 morts et 2 400 blessés, ainsi que la prise d’une centaine de personnes comme otages. En réponse, le gouvernement israelien à lancé une offensive faisant plus de 5 000 morts à Gaza ces deux dernières semaines.
Dans le même temps, les interdictions de toute expression de solidarité avec la Palestine se multiplient en France.
Cette année, la manifestation pour la libération de Georges Abdallah devait réunir à Lannemezan plusieurs milliers de personnes venues de toute la France et d’autre pays, en solidarité avec la Palestine. Initialement interdite par la préfecture de Haute-Pyrénées, celle-ci a pu se tenir ce samedi 21 octobre, suite à la suspension de l’interdiction à la dernière minute par le Tribunal Administratif de Pau, grâce au recours porté par le Collectif 65 pour la libération de Georges Abdallah.
Dans ce contexte, nous vous proposons une émission qui revient la question des interdictions des manifestations de solidarité avec la Palestine. Le meeting du 18 octobre 2023, a la bourse du travail de Paris a été interdite. En réaction, les organisateurs, ont tenu une conférence de presse. Ils reviennent sur le fait que la manifestation de soutien à Georges Ibrahim Abdallah, avait dans un premier temps été interdite. Ensuite, nous vous rediffusons, un reportage du 18 juin 2023 à Paris lors de la journée de soutien aux prisonniers politiques et à Georges Ibrahim Abdallah.
Le 11 octobre dernier, lors du déchargement d’un camion approvisionnant le magasin Decathlon du quartier de La Madeleine à Paris, Un intérimaire est mort. Le 13 octobre, un rassemblement se tenait, devant le magasin Decathlon Madeleine. Dans cette première partie d’émission, nous entendrons la parole d’une salariée de Decathlon, présente lors de ce rassemblement, qui nous décrit les conditions de travail de son magasin.
Poursuite judiciaire contre un lanceur d’alerte
En seconde partie d’émission, il sera question de la sureté nucléaire.
Depuis septembre 2018, Arnaud Bégin est soudainement victime, sur le site nucléaire de Chooz (08) où il travaille, d’actes de harcèlement moral, de discrimination et d’intimidation après 25 ans à EDF à des emplois en lien avec la sûreté nucléaire.
En 2021, il comprend que ces méthodes de destruction sont la suite des contrôles trop gênants lorsqu’il était cadre à l’Inspection Nucléaire, notamment sur le site du Tricastin en 2015 et 2018, et sur le site de Dampierre en avril 2017.
Il a dénoncé le fait qu’à son avis le directeur du site et l’ASN (L’Autorité de sûreté nucléaire) minimisaient l’importance des incidents. Les quatre syndicats majoritaires (CFE, CGT, FO et CFDT) au niveau des sites nucléaires recevront l’ordre, directement de la direction d’EDF, de ne pas l’aider. C’est encore et toujours le cas aujourd’hui.
Après 5 ans de maltraitance au sein de son entreprise, Arnaud Begin était convoqué le mardi 10 octobre devant le Conseil de discipline d’EDF à Saint-Denis. Seul le syndicat SUD le soutien.
Nous entendrons dans ce reportage, la réaction d’Arnaud Begin, a la sortie du conseil de discipline.
Les Vieux·et Vieilles Campeurs·euses pour les Terres Nourricières
Les vieux et vieilles campeur.euse.s pour les terres nourricières du collectif pour le triangle de Gonesse – qui, depuis le 1ᵉʳ octobre, campent et vivent, sans autorisation, dans la Zone d’Imagination pour un Aménagement Concerté (ZIAC) qu’ils et elles ont créé à Villiers-le-Bel dans le val d’Oise – font signer la pétition contre l’implantation de la cité scolaire avec internat sur les terres agricoles du Triangle et pour une concertation publique sous l’égide de la CNDP sur le choix du lieu de son implantation.
Ce vendredi 20 octobre, nous nous sommes rendus sur le campement et c’est l’entretien que nous allons entendre sur la suite de cette occupation.
Depuis le 12 septembre, les conducteurs de bus du dépôt Keolis de Montesson (78) sont en grève reconductible afin de récupérer une prime annuelle de 700 euros qu’ils ont perdus en 2023.
Ils sont en grève pour conserver leurs primes dans le transfert de filiale qui s’effectue tous les cinq ans lors d’appels d’offres que se partagent principalement Keolis-SNCF, Transdev-CDC. Dans un contexte de dégradation des conditions de travail.
Pour les collègues du dépôt de Montesson, ceux-ci sont passés de Transdev à Keolis au 1ᵉʳ janvier 2022. Au passage, une prime annuelle de 700 euros versée en deux fois a été supprimée. Or cette prime payée l’été était particulièrement attendue pour ces salariés aux revenus modestes.
La Direction n’a cédé sur aucune revendication, au contraire le vendredi 6 octobre, une dizaine de grévistes ont été assignés au Tribunal judiciaire de Versailles. En effet, alors que les grévistes s’étaient rendus au siège de Keolis à la Défense afin d’ouvrir des négociations, la seule réponse apportée a été la menace de poursuites judiciaires. Ce qui fut fait dès le lendemain par courrier.
Le 12 octobre dernier, les salariés en grève du centre bus Keolis de Montesson, dans les Yvelines, étaient au tribunal de Versailles, accusé de dégradation de l’outil de travail soit des bus en y jetant des œufs à leurs piquets de grève. C’est l’émission que nous vous proposons aujourd’hui.
Nous entendrons, outre les prises de parole, mais également des entretiens avec des conducteurs de bus, qui nous parlerons des conditions de travail à la RATP puis du passage à la concurrence via les appels d’offre et nous terminerons par le verdict du tribunal.
Pour rejoindre le piquet de grève. 156, avenue Paul Doumer à Montesson (78)
Depuis le mardi 17 octobre 2023, un mouvement de luttes de travailleur sans-papier à débuter pour leur droit à la régularisation, a paris et en région parisienne et notamment le 17 octobre par l’occupation du chantier de l’Arena à paris. Obtenue grâce à la coopération entre collectifs de sans-papiers (CSP75, Droits devant, Gilets Noirs, CSPM, CSP20), le syndicat CNT-SO et différents réseaux.
L’émission de ce jour, sera consacré à ce mouvement. Dans un premier temps, nous serons sur l’occupation de chantier de l’aréna. Par là suite, nous entendrons le reportage réaliser le 18 octobre, car la veille, la CGT organisait des piquets devant une quarantaine d’agences intérim de la région parisienne pour réclamer des CERFA pour les travailleurs sans papiers.
Il ne restait plus le 18 octobre que 13 agences qui ne s’étaient pas régularisées. Ce même jour, nous nous sommes rendus à celles de porte Clichy chez Mistertemp.
Communiqué de laMarche des Solidaritésdu mercredi 18 octobre 2023
Occupation chantier des JO : Cette victoire obtenue par la lutte n’est qu’un début !
La Marche des Solidarités se félicite de la victoire de l’occupation du chantier de l’Arena obtenue grâce à la coopération entre collectifs de sans-papiers (CSP75, Droits devant, Gilets Noirs, CSPM, CSP20), le syndicat CNT-SO et différents réseaux.Les grévistes vont être régularisés. Plus encore, tous les sans-papiers qui ont travaillé pour les 3 sous-traitants concernés et ont été licenciés parce que sans-papiers seront réintégrés. Plus encore, tous les sans-papiers travaillant pour ces sous-traitants ont 3 mois pour se signaler aux syndicats pour que leur situation soit régularisée.
Une délégation sera reçue au ministère du Travail pour exprimer l’opposition à la loi Darmanin et exiger la régularisation de tous les sans-papiers.Au-delà, la victoire obtenue aujourd’hui démontre, si besoin en était, qu’il n’y a pas besoin de nouvelle loi pour régulariser les sans-papiers. Seule la lutte et la solidarité sont nécessaires. Le roi est nu : le projet de loi Darmanin apparaît ainsi pour ce qu’il est, un projet raciste et sécuritaire qui n’a d’autre but que de ´mener la vie impossible pour tous les étrangers et étrangères’ dans ce pays. Et d’amplifier la précarisation de tous et toutes les travailleurs aux conditions du patronat.
Cette victoire obtenue par la lutte n’est qu’un début. Nous l’avons dit, on ne recule plus. Nous appelons à apporter tout soutien aux camarades en lutte sur les piquets organisés par la CGT, tout comme nous exigeons la régularisation des grévistes de Chronopost, DPD et Emmaüs. Nous appelons toutes et tous à venir le lundi 23 octobre à la réunion de la Marche des Solidarités à la Bourse du travail de Paris à 19 h pour organiser la suite de la lutte.
Cette émission du mercredi 18 octobre 2023 sera toute entière consacrée au contrôle, à la répression et à la surveillance d’état. A la surveillance d’État numérique, technologique dirons-nous. Dans ce cadre-là, vous pourrez entendre des interventions choisies ayant pris place dans une réunion publique organisée par la Quadrature du net et traitant de la criminalisation du chiffrement à l’œuvre dans l’affaire du « 8 décembre ». Laquelle y “transforme les pratiques numériques des inculpé·es en « preuves » d’une « clandestinité »”, qui trahirait selon les renseignements l’existence d’un projet terroriste. Puis en seconde partie d’émission, c’est de plateformes, d’opérateurs et de navigateurs internet dont il sera question, l’État français cherchant à contrôler et à censurer la toile. Nous terminerons enfin par deux brèves d’actualité se focalisant là aussi sur les moyens de surveillance de l’État français, à travers l’enquête des Predator files¹ d’une part, et à travers l’espionnage de manifestants pendant et après le mouvement des gilets jaunes² d’autre part.
¹ Lien vers des articles d’Amnesty international accès libre) et de Médiapart (sur abonnement) concernant l’enquête Predator files. L’enquête a été réalisée par le réseau d’investigation journalistique European Investigative Collaborations, en collaboration avec les experts du Security Lab d’Amnesty International. ² Interview de Vincent Nouzille, auteur du livre “Le côté obscur de la force – Enquête sur les dérives du ministère de l’Intérieur et de sa police”, par Ariane Gressiel, en date du 9 octobre, sur France inter.
Lien vers l’article de la Quadrature du net sur le droit au chiffrement et à la vie privée, en cause lors du procès du « 8 décembre ». Ledit procès se tiendra du 3 au 27 octobre 2023.
L’affaire du 8 décembre : “L’affaire du 8 décembre 2020 est une opération antiterroriste commanditée par le Ministère de l’Intérieur contre des militant·es désigné·es par ce dernier comme des « activistes d’ultragauche » et mis·es en examen pour « association de malfaiteurs terroristes ». La DGSI, accompagnée d’unités de polices militarisées (GAO, RAID), a procédé à l’arrestation de neufs personnes – que nous réunissons sous la bannière « libertaires » – dont les engagements politiques étaient divers et dans des régions différentes: soutien aux familles réfugié·es, projets d’autonomie et de lieux collectifs à la campagne, soutien aux victimes de meurtres d’État, squat d’activités politiques et contre-culturelles, écologie et défense de la cause animale, implication dans des Zones A Défendre, activisme dans la scène punk, féminisme, etc. Ces neuf personnes ne se connaissent pas toutes. Certaines ne s’étaient côtoyées qu’une fois dans leur vie (pendant le confinement). Mais toutes avaient comme point commun une personne, Libre-Flot, ciblée par la DGSI depuis son retour du Rojava en 2018 où il avait participé à la lutte contre DAESH. […]” Lire la suite sur le blog des comités du 8/12
De février à août 1996, à Paris, des centaines d’étranger·e·s « clandestins » sortent en pleine lumière, occupent des églises, des gymnases, un entrepôt de la SNCF pour obtenir leurs papiers. Ils et elles seront expulsé·e·s violemment de l’église St Bernard par la police le 23 août 1996 mais celles et ceux qui se sont renommé·e·s « Sans-papiers » sont sortis de l’ombre sur tout le territoire soutenus par des centaines de milliers de personnes. Depuis 27 ans, les Sans-papiers organisés en collectifs, continuent de lutter, se retrouvant chaque année devant l’église St Bernard.
Cette année, la manifestation qui se déroulait le samedi 26 aout 2023 en direction de St Bernard s’intitulait “DARMANIN NE FERA PAS SA LOI – Contre le racisme et contre le fascisme – Et en souvenir de St Bernard !”. En effet, depuis bientôt un an, le gouvernement met en avant un projet de “loi asile et immigration” pour “contrôler l’immigration et améliorer l’intégration”, qui accélère les procédures d’expulsions et en précarise avec la régularisation par le travail avec la notion de “métier en tension”. Contre ce projet aux contours flous, l’ UCIJ (uni-e-s contre l’immigration jetable), qui réunie collectifs de sans papiers associations et syndicat, et qui s’était formée contre la réforme du droit d’asile CESEDA, s’est reformée et organise la mobilisation. Cette date de mobilisation était donc une occasion de remettre en avant l’histoire de la lutte de st Bernard, et de faire le lien avec la mobilisation actuelle.
Dans cette émission, nous vous diffusons donc un montage contenant plusieurs extraits de reportage réalisés lors de cette manifestation; et, un interview de Bchira, militante au CSP75 et à la marche des solidarités, qui revient sur les différents aspects de ce projets et ses conséquences.
Illustration issue de https://formesdesluttes.org/
Le 15 mars dernier, lors de l’examen du projet de loi immigration, a été voté au Sénat un amendement visant à supprimer l’Aide Médical d’État(AME) au profit d’une aide ne couvrant uniquement que les soins urgents et vitaux.
Suite à une proposition des Républicains (LR) de supprimer l’AME pour “la transformer en aide médicale d’urgence”. La question de l’AME figure dans le texte sur l’immigration, étudié au Sénat à partir de novembre.
Cette attaque contre ce dispositif n’est pas la première et elle s’inscrit dans une série de réformes qui visent à spécifier et à restreindre progressivement l’accès aux soins des personnes étrangères en situation irrégulière en France : exclusion de la Sécurité Sociale en 1993 avec la « Loi Pasqua », qui introduit une condition de régularité de séjour ; isolement au sein de l’AME, conçu comme dispositif spécifique aux « sans-papiers » dans les années 2000 ; restriction de l’offre de soin et de son accès via des reformes successives qui n’ont cessé de dégrader cet outil de soin.
Aujourd’hui, l’AME reste le seul véritable filet de santé publique pour les étrangers en situation irrégulière.
Alarmés par l’évolution que prendra le projet de loi immigration, des professionnels du Centre Hospitalier de Saint-Denis se mobilisent pour pouvoir continuer à soigner les patients et patientes
Dans ce contexte, se tenait le 26 septembre dernier, A l’hôpital Delafontaine, de Saint-Denis, une réunion d’information et d’échange sur l’avenir de L’aide médicale d’État.
Dans l’émission de ce jour, nous vous proposons l’écoute de plusieurs interventions issue de cette rencontre.
Le 22 et 23 septembre 2023 dernier se tenait la rencontre annuelle de l’association Technologos, en association avec Sciences Critiques. Cette rencontre portait sur le rôle et la place de la science dans notre société. Et se donnait comme intention plus concrète d’en interroger les fondements, l’organisation mais aussi la finalité, essayant d’apporter une critique à l’institution scientifique, alors même que cette dernière, peu à peu, devient ou deviendrait incritiquable. C’est en ce sens que vous pourrez écouter au cours de cette émission, tout d’abord en première partie, des extraits choisis d’interventions sur l’histoire populaire de la science et sur une histoire de la subjectivité — celle-ci, au prisme de l’épistémologie. La seconde partie d’émission quant à elle, sera consacrée à la question de la continuation ou non de la recherche scientifique. François Graner, pourtant directeur de recherche au CNRS, y apportera son point de vue argumenté. Cette intervention sera enfin suivi d’extraits traitant de la question de la démocratie dans la science.
Le mardi 19 septembre 2023, avait lieu un “Apéro Critique” à la Maison ouverte, 17 rue Hoche à Montreuil, intitulé ” Avenir de L’Afrique : fin de la Francafrique?”. Lors de ce débat autour des coups d’état militaire au Sahel. A cette occasion, nous avons pu écouter Allasane Dicko membres d’ Afrique Europe Interact, David Mauge, membre de Survie et contributeur de l ouvrage Une histoire de la Francafrique : l’empire qui ne veut pas mourir, et Bruno Jaffre membre de Survie et auteur d’un blog sur le Burkina. Dans cette émission, nous vous diffusons une partie des prises de paroles réalisées à cette occasion.
A l’occasion du procès de Rédoine Faïd et de onze accusés soupçonnés d’être impliqués dans son évasion de la prison de Réau, en juillet 2018, qui s’est ouvert en septembre et dont le verdict sera rendue le 25 octobre 2023, nous avons décidé de réaliser une émission autour des conditions de vie en quartier d’isolement et du droit à l’évasion. Pour cela nous sommes en direct avec Yazid Kherfi, qui rend visite à Redoïne Faïd depuis plusieurs années et qui suit le procès; et Kyu, ancien détenu et animateur de L’Envolée ( émission de radio et magazine anti carcérale).
Jusqu’ en 2003, en France, les évasions « simples » ou « dépouillées », c’est-à-dire accomplies sans violence, ni effraction, ni corruption, étaient alors impunies. Il était en quelque sorte admis qu’existait un droit naturel à recouvrer la liberté. Cette clémence était justifiée par l’instinct de liberté qui domine tout être vivant. « Il existe chez l’Homme une aspiration naturelle à la liberté d’aller et venir parfaitement inaliénable, et qui ne peut être détruite par une décision judiciaire de privation de cette liberté. en 2009, 21 évasions. Cependant, l’évadé « simple » n’échappe pas à toute répression. Il est déjà l’objet de sanctions disciplinaires pénitentiaires et encoure notamment jusqu’à 45 jours de cellule disciplinaire, voire de sanctions quasi disciplinaires (notamment isolement administratif et/ou transfèrement imposé). De plus, il fait généralement l’objet de sanctions d’application des peines (retrait de crédits de réduction de peine, rejet, du moins pour un temps, de toute demande d’aménagement de peine…).
Aujourd’hui, un tel droit n’existe plus ; la loi dite Perben II a en effet mis un terme à la tolérance vis-à-vis de l’évasion simple». Ainsi, l’article 434-27 du Code pénal, modifié par la loi du 9 mars 2004, indique que « constitue une évasion punissable le fait, par un détenu, de se soustraire à la garde à laquelle il est soumis. » Les anciens éléments constitutifs du délit sont désormais des circonstances aggravantes ; la loi Perben II augmente la durée de la peine encourue dès lors que l’évasion a été commise « avec violence, effraction ou corruption ». Pour l’évasion simple, la peine encourue est de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende 7 (Code pénal, article 434-27, alinéa 2). Elle est aggravée par l’usage de la violence, de l’effraction ou de la corruption. La peine encourue est en effet alors portée à cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende (Code pénal, article 434-27, alinéa 3). Mais le législateur a encore prévu deux autres seuils d’aggravation à l’article 434-30 du Code pénal ; la peine passe à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende, lorsque l’infraction est commise « sous la menace d’une arme ou d’une substance explosive, incendiaire ou toxique ». De plus, la peine est portée à dix ans d’emprisonnement et 150 000 euros d’amende lorsqu’il « a été fait usage d’une arme ou d’une substance explosive, incendiaire ou toxique », ou encore lorsque les faits ont été commis « en bande organisée, que les membres de la bande aient été ou non détenus ». La sévérité de la répression de l’évasion ne se manifeste toutefois pas seulement par les peines qui peuvent être prononcées. Il faut préciser que ces peines dérogent au droit commun du non-cumul des peines ; en effet, l’article 434-31 du Code pénal précise que « les peines prononcées pour le délit d’évasion se cumulent, sans possibilité de confusion, avec celles que l’évadé subissait ». Lorsque l’évadé est repris, il doit subir d’abord sa peine, et, ensuite la peine qu’il purgeait précédemment, laquelle est reprise là où elle avait été laissée. Ajoutons, enfin, que ces sanctions pénales ne sont pas les seules à venir punir l’évadé repris. En effet, l’évasion constitue une faute disciplinaire de premier degré, laquelle fait encourir un maximum de 45 jours de cellule disciplinaire. Des sanctions quasi-disciplinaires peuvent s’y rajouter : « transfèrement » vers un autre établissement, souvent à régime de sécurité plus élevé, placement à l’isolement, destiné à briser la résistance du détenu et à rendre plus difficile la commission d’une nouvelle tentative d’évasion ; réticence du juge à accorder des aménagements de peine, retrait des crédits de réduction de peine précédemment accordés…
L’évasion est toujours une victoire, une prouesse technique, la marque de courage ; mettant sa vie en jeu pour recouvrir sa liberté . Celui qui s’évade est déjà une énigme, le seul fait d’avoir traversé des murs le présente comme un homme à part, un être insaisissable, fuyant, tout-puissant, défient l’autorité. Il a connu la mort et en a réchappé, il appartient au monde de l’ombre et ose agir en pleine lumière. Souvent repris mais toujours libre. Il y a deux éléments fondateurs dans la gestion des prisons : 1) la prévention de l’évasion ; 2) le maintien de l’ordre au sein de la prison. Ça ne change pas. L’autre mission, qui, par contre, a perdu du terrain, c’est la resocialisation, la réinsertion, la vie (suicide, morts suspectes). Selon la règle pénitentiaire européenne n° 51.4, « chaque détenu est (…) soumis à un régime de sécurité correspondant au niveau de risque identifié ». En France, l’administration pénitentiaire dispose d’un ensemble de moyens préventifs ou répressifs dont le régime de sécurité varie en fonction de la mesure employée. Elles sont au nombre de cinq : la mise à l’isolement, le placement en quartier de haute sécurité (remplacé par l’isolement renforcé), le confinement, la mise en cellule disciplinaire et les rotations de sécurité. La mise à l’isolement Souvent proche du quartier disciplinaire, un quartier d’isolement est prévu dans chaque prison. Il permet au chef d’établissement d’écarter à titre préventif du reste de la détention, pour une durée de trois mois pouvant être prolongée jusqu’à deux ans, des détenus gênants, suspects ou meneurs. Il permet aussi de protéger des détenus qui pourraient subir les agressions de leurs codétenus ou provoquer un certain désordre par leur présence (délinquants sexuels, policiers, détenus célèbres, etc.).
Cette mesure concerne environ 3 000 personnes incarcérées chaque année. Bien que l’isolement « ne saurait (…) s’assimiler à un mode normal d’exécution de peine », les personnes réputées dangereuses effectuent la quasi-totalité de leur peine sous ce régime contraignant. En atteste d’ailleurs l’observation formulée par l’Inspection générale de l’administration pénitentiaire et l’Inspection générale des services judiciaires dans leur rapport conjoint d’avril 1993 : « conçue comme une mesure temporaire destinée à faire face, plus ou moins ponctuellement, à une menace identifiée, l’isolement tend à devenir un mode durable de gestion de la détention d’un certain nombre de détenus jugés particulièrement dangereux par l’administration ». La personne placée à l’isolement se voit privée de tout contact avec le reste de la détention, ses déplacements au sein de l’établissement se font toujours accompagnés d’un ou plusieurs surveillants et demeurent limités. Elle ne peut également participer à aucune activité collective (travail, formation, enseignement, office religieux, etc.) et ses « occupations » se résument souvent à la promenade quotidienne d’une ou deux heures, seule, au milieu d’une petite cour couverte de grilles et de rouleaux de barbelés empêchant de voir le ciel et atténuant la lumière du jour. Ainsi, même si celon les textes « la mise à l’isolement ne constitue pas une mesure disciplinaire » au sens de l’article D283- 1-2 alinéa 1 du Code de procédure pénale (CPP), elle est vécue par ceux qui la subissent comme une véritable sanction, « une torture blanche », dont les effets physiques et psychologiques à long terme ne font qu’exacerber la dangerosité des détenus.
Les effets sur la santé mentale des détenus : idées de persécution, de préjudice, un sentiment de menace , idées délirantes ou par des réalités hallucinatoires . apathie chronique, instabilité émotionnelle, difficulté de concentration et diminution des facultés mentales . L’isolement a des conséquences sur l’état physique des personnes détenues : troubles oculaires à long terme du fait de l’espace réduit de la cellule et de l’éclairage souvent insuffisant et artificiel ; perte de facultés olfactives et gustatives due à la monotonie des odeurs ; atrophie musculaire du fait du manque d’activité. C’est également une mesure qui exclut le détenu de tout dispositif d’aménagements de peine « dans la mesure où il est privé de toute activité, de travail, de formation et ne peut acceder au dispositifs qui permettent d’y avoir droit. En définitive, l’isolement consiste à placer les détenus sous un régime dont l’objet est « tout à la fois de réduire tout ressort rebelle en brisant [leurs] résistance[s] et de rendre plus difficile la commission d’une nouvelle tentative d’évasion, ou à résister par des mutineries». La mise à l’isolement Cette mesure peut être prononcée selon quatre motifs (par mesure de protection, de sécurité, à la demande du détenu ou d’office). Elle est prise, dans un premier temps, par le directeur de l’établissement pouvant décider d’un isolement pour une durée maximum de trois mois renouvelable une fois. Au-delà, c’est au directeur interrégional des services pénitentiaires (DISP) de décider, sur rapport du chef de l’établissement, de la prolongation de la mesure. Sa décision est également renouvelable une fois. Au terme d’un an d’isolement, c’est au ministre de la Justice d’en apprécier le maintien pour une durée de quatre mois renouvelable une fois. L’article D. 283-1-7 du CPP prévoit que l’isolement ne peut être prolongé au-delà de deux ans ; néanmoins il peut être fait dérogation à cette règle « si le placement à l’isolement constitue l’unique moyen d’assurer la sécurité des personnes ou de l’établissement ».
Laurent jacqua s est evadé Le 9 octobre, c’est la date anniversaire de l’abolition de la peine de mort, c’est donc une date symbolique. J’ai choisi cette date pour dire : « Vous me condamnez à mort en me mettant des années et des années de prison, moi je m’évade ce jour-là pour souhaiter un bon anniversaire à l’abolition de la peine de mort ». Je me suis donc évadé le 9 octobre 1994 en souvenir de l’abolition de la peine de mort, et ça m’a porté chance puisque j’ai réussi. Michel Vaujour : accepter la peine ? La question ne se posait même pas. En fait, pour moi,l’administration pénitentiaire et cie n’avaient aucune légitimité ; le mot « légitimité » n’avait aucune résonance en moi. Je n’ai jamais pensé qu’il y avait une justice ou autre chose comme ça. Je ne voyais pas pourquoi ces gens-là se permettaient de prendre ma vie. Point barre. J’étais en colère, parce que c’était ma vie. Je croyais que l’expression du pouvoir, c’était ce qu’il y avait autour de moi. Et ce qui m’entourait, franchement, ce n’était pas vraiment une référence morale. Le quartier de haute surveillance, c’est une ignominie.
Paradoxalement, le renforcement de l’arsenal sécuritaire dans les prisons françaises, puisqu’il est néfaste pour les conditions de vie des détenus, va dans le sens d’un recours accru à l’évasion. Là encore, on assiste au perpétuel affrontement entre les deux fonctions de l’administration pénitentiaire, la sécurité et la réinsertion, l’une faisant obstacle à l’autre. Éviter à tout prix les évasions a un coût. Miradors, dispositifs de surveillance électronique des murs d’enceinte, grilles, filins antihélicoptères, brouilleurs de téléphones portables… Ces investissements dans la sécurité se font bien souvent au détriment des politiques de réintégration. Pour prévenir le phénomène rarissime qu’est l’évasion, l’administration pénitentiaire contribue malgré elle, à force de fouilles, de contrôles, à augmenter l’insupportable quotidien au sein de la détention, « incitant » les personnes détenues à faire le choix de l’évasion pour échapper à l’intolérable. Il faut ajouter à cela la politique pénitentiaire qui ne cesse d’augmenter la durée moyenne des peines de privation de liberté. La durée des périodes de sûreté (pendant lesquelles il n’est pas possible d’obtenir une remise de peine) donnent le vertige ; la création de la rétention de sûreté en 2008, qui permet le maintien en détention de certains détenus après la fin de leur peine, bouche un peu plus l’espoir de sortie des longues peines. Quelles sont les issues possibles pour un détenu qui a comme perspective de passer vingt, voire trente ans en prison ? Parmi celles-ci, l’évasion est sans aucun doute envisagée, même si elle n’est parfois jamais mise à exécution. Ceux qui sont passés à l’acte sont presque toujours repris et subissent des sanctions d’une exceptionnelle dureté qui ne les encouragent, en définitive, qu’à renouveler encore leurs tentatives.
A l’heure actuelle, en Belgique un détenu ne peut pas être condamné pour s’être évadé, sauf dans le cas où il commettrait d’autres méfaits pour arriver à ses fins (violence, menace, vol, destruction de matériel, prise d’otage…). Dans notre pays, l’évasion est même considérée comme un “droit” : celui d’aspirer à la liberté. Cette législation belge s’explique par l’idée inspirée du XIXe siècle, en pleine vague de romantisme et d’expression post-révolutionnaire, qu’on ne peut demander à un homme de renoncer à sa liberté. “L’idée de l’enfermement est de base contre-nature, développe l’avocat Pierre Chomé. Et on ne peut pas en vouloir à un être humain de vouloir retrouver cette liberté, pour autant qu’il ne fasse de mal à personne et ne commette aucun délit.” Ainsi, de nombreux cas d’évasion “par ruse” n’engendrent aucune condamnation comme profiter d’une porte ouverte, de la distraction d’un gardien ou escalader les murs d’enceinte de l’établissement pénitentiaire. En Suisse, s’évader n’est pas une infraction. Si toutes les infractions commises lors de l’évasion sont punissables (dommages à la propriété, vol, prise d’otage, lésions corporelles, etc.), la simple fuite ne l’est pas. Elle renvoie à une passionnante question philosophique : peut-on reprocher à un homme enfermé son goût pour la liberté ?
En dépit de l’abandon du projet EuropaCity, des élus d’Ile-de-France, dont M. Blazy, maire de Gonesse, et Mme Pécresse, présidente de la région IDF, s’obstinent à vouloir construire une gare sur la ligne 17 nord au milieu des champs du Triangle de Gonesse.
Comme personne – pas une entreprise, pas une administration – ne veut jusqu’à présent s’y installer, ils ont décidé, sans consultation publique, d’y envoyer des élèves du territoire avec un projet de cité scolaire (collège et lycée avec internat). Ce choix exprime un profond mépris envers eux et les habitant·es de l’est du Val d’Oise.
Le dimanche 1ᵉʳ octobre 2023, se tenait une ZADimanche, comme a chaque début de mois, sur le triangle de Gonesse. Suite à cette ZADimanche , nous nous sommes dirigés vers Villiers-le-Bel ou un campement sans autorisation, sur le terrain municipal de cette même ville, à proximité de l’ancien hôpital, a vu le jour.
L’émission de ce jour, sera consacré à cette occupation et au début de cette ZIAC : Zone d’Imagination pour l’Aménagement Concerté.
Nous entendrons les différentes prises de parole de ce dimanche puis un entretien réalisé avec les occupantes et occupants le vendredi 6 octobre au 5ᵉ jour de cette ZIAC: Zone d’Imagination pour l’Aménagement Concerté.
Les Vieux·et Vieilles Campeurs·euses pour les Terres Nourricières Communiqué de presse du mardi 3 octobre 2023
Les vieilles branches de la ZIAC de Villiers-le-Bel (95) prennent racine. Qu’elles fleurissent de mille initiatives !
Voilà maintenant plus de 48 h que nous, les Vieux et Vieilles Campeur·euse·s pour les Terres Nourricières, avons installé notre campement, surnommé ZIAC, comme Zone d’Imagination pour un Aménagement Concerté, sur un terrain municipal de l’hôpital désaffecté de la ville de Villiers-le-Bel dans le Val-d’Oise.
Ces premières 48h sont une première victoire. Les autorités n’ont pas osé nous en déloger et, maintenant, notre occupation sans droit ni titre de ce terrain est devenue une occupation de fait. Autrement dit, les vieilles branches de la ZIAC prennent racine. La ZIAC est maintenant officiellement notre domicile. Et, depuis notre nouvelle maison commune, nous allons faire fleurir mille initiatives jusqu’à ce que notre revendication obtienne satisfaction.
Notre exigence est simple. Le ministère de l’Éducation nationale doit organiser, sous l’égide des garants de la Commission nationale du débat public, une concertation publique sur l’emplacement de la cité scolaire avec internat (voir ci-dessous le rappel du désastre annoncé de la cité scolaire sur le Triangle de Gonesse). C’est d’ailleurs ce qui a été fait pour un projet de centre pénitentiaire dans le Val d’Oise. Cela a conduit à l’abandon du site de Goussainville en raison de sa proximité avec l’aéroport de Roissy.
Samedi 7 octobre au soir, nous appelons les marcheur·euse·s contre le projet de tronçon autoroutier, le BIP – qui détruirait des dizaines d’hectares d’espaces naturels et agricoles pour déverser des flots de camions et grossir les flux logistiques entre les entrepôts Garonor, ceux de Fedex et DHL à Roissy, et le port de Gennevilliers avec son projet d’entrepôt géant Green Dock – à se retrouver à la ZIAC pour un moment festif et délibératif.
Dimanche 8 octobre après-midi, retrouvons-nous tous et toutes pour continuer les discussions et la fête de la veille. Nous vous tiendrons informés par la suite du programme détaillé du week-end. N’hésitez pas à venir avec votre tente et votre maillot. Vous profiterez de la piscine municipale et de ses douches qui jouxtent la ZIAC !!
Rappel du désastre annoncé de la cité scolaire sur le Triangle de Gonesse La cité scolaire avec son internat serait située au bout des pistes des aéroports de Roissy et du Bourget. À 500 mètres de là où le Concorde s’est écrasé il y a 20 ans. De même, l’effondrement climatique qui a commencé – selon les mots même du secrétaire générale des Nations unies – exige que des terres agricoles aussi fertiles que celles du Triangle de Gonesse soient préservées. Il en va de notre souveraineté alimentaire.
À 6 km du Triangle, l’hôpital désaffecté de Villiers-le-Bel est l’un des sites déjà artificialisés de l’est du Val-d’Oise qui, grâce à sa situation exceptionnelle (près d’une gare de la ligne D, près de champs, près d’un complexe sportif…) pourrait idéalement accueillir la future cité scolaire que nous appelons d’autant plus de nos vœux qu’elle inclut un lycée agricole.
Pour rejoindre la ZIAC : Au bout de l’avenue du Champ Bacon, à Villiers-le-Bel, à 10 min à pied de la gare RER D Villers-le-bel/Arnouville/Gonesse
Dix travailleurs sans papiers, ayant travaillé sur les chantiers des jeux olympiques 2024, assignent des géants du BTP devant le conseil de prud’hommes de Bobigny (Seine-Saint-Denis). Ces ouvriers pointent le fait d’avoir travaillé sur les chantiers des JO, notamment le village olympique, sans contrat de travail, sans fiche de paie, sans congés payés ni heures supplémentaires.
Dans l’émission de ce jour, réalisé en direct dans nos studios, nous recevons Richard Bloch, défenseur syndical a la CGT qui suit les dossiers des dix travailleurs. En sa compagnie, nous sommes revenus sur cette affaire et plus globalement sur la situation dans le BTP
Hanane Ameqrane, documentaliste au lycée Angela Davis est convoquée le 5 octobre 2023 au rectorat de Créteil pour : “avoir manifesté ostensiblement vos opinions notamment votre intention de vote pour les élections professionnelles ; ainsi que vos opinions politiques“ et “avoir tenu des propos portant atteinte aux valeurs de la République”.
Face à cette répression anti-syndicale un comité de soutien s’est constitué et à organiser le 27 septembre, à la Fléche d’or, une réunion publique intitulée “École de la souffrance, quelles résistances ?” avec Hanane Ameqrane, (sud éduc 93, “sois prof et tais-toi”), Fatou Dieng (réseau d’entraide Vérité et justice), Amanda, (vérité et justice pour Safyatou, Salif et Ilan), Pierrette Pyram ( Diivines LgbtqiA+), le collectif d’action judiciaire, la marche féministe Antiraciste, le collectif “touche pas à mon abaya”, la FIDL et des personnels et élèves mobilisé.e.s
Dans l’émission de ce jour nous vous diffusons le montage d’une partie des prises de paroles réalisées lors de cet événement.
Le 25 août dernier arrivait à Orléans le Convoi de l’eau, une manifestation itinérante partie de Sainte-Soline quelques jours plus tôt. Ce convoi, rassemblant tracteurs et vélos, était organisée par Bassines Non Merci, la Confédération Paysanne et les Soulèvements de la Terre ; avec pour objectif l’Agence de l’Eau, où devait se dérouler une négociation autour d’un moratoire sur les “méga-bassines”. Mais c’est de Paris que vous pourrez entendre les différents enregistrements de cette première partie d’émission, une délégation s’étant dirigée vers la capitale le jour suivant, le samedi 26 août, suite à l’échec des négociations. Avait alors lieu un rassemblement et une manifestation à vélo, avec pour point de chute, le festival des Digitales à la Parole Errante, organisé par le squat la Baudrière. Nous ferons remarquer concernant ce dernier, qu’iels avaient été expulsé-es quelques jours plus tôt mais avaient anticipé, en déplaçant le lieu de leur festival. En seconde partie d’émission, vous pourrez retrouver une intervention ayant eu lieu dans ce même festival, où Andrea, juriste et activiste chilienne, faisait part du conflit historique du peuple Mapuche pour la défense du fleuve Pilmaiquén, et ce contre trois centrales hydroélectriques.
Rencontre avec Nedjib Sidi Moussa pour la sortie de “Le Remplaçant : journal d’un prof (précaire) de banlieue présenté à la librairie quilombo Le 7 septembre 2023 dans le XIe de Paris.
Le malaise des enseignants, les difficultés de recrutement ou encore la désillusion des contractuels, thèmes désormais familiers du paysage politico-médiatique, ne sont que les symptômes d’une crise profonde – celle de l’éducation -, qui interroge notre capacité à « prendre soin, préserver et admirer les choses du monde » (Hannah Arendt).
Ce récit singulier et sensible, à rebours des plaidoyers lénifiants pour une école postmoderne ou des complaintes anxiogènes sur les « territoires abandonnés » de la République, invite les lecteurs à suivre les pérégrinations d’un professeur contractuel nommé dans un collège de la banlieue parisienne afin d’apprendre aux enfants des classes laborieuses l’histoire et la géographie – sans oublier l’enseignement moral et civique.
En passant du rire aux larmes et de la compassion à la révolte, “Le Remplaçant” offre une chronique saisissante de la France contemporaine.
Il raconte aussi l’histoire d’une jeunesse perdue, celle d’un fils d’ouvrier à l’orée de ses quarante ans, celle d’un ancien sorbonnard durablement installé dans le précariat, comme tant d’autres aujourd’hui.
Dans l’émission de ce jour, nous entendrons intervention de l’auteur de l’article Mayotte / Comores : Généalogie d’une politique du pire paru dans le numéro de Courant Alternative. Il a répondu aux remarques, demandes de précision et interrogations sur la situation à Mayotte et aux Comores. Cette présentation se tenait dans le cadre des rencontres libertaires du Quercy qui se déroulait du 18 au 23 juillet 2023 . Elle s’appuyait sur un article publié dans Courant Alternatif du 11 juin 2023 que nous vous diffusons :
“L’opération militaro-policière Wuambushu menée actuellement par l’État français dans la colonie départementalisée de Mayotte, sous les prétextes officiels d’une destruction de l’habitat précaire et d’une lutte contre la délinquance, amalgamée à la présence jugée illégale de « Comoriens » issus des trois autres îles de l’archipel, s’inscrit dans un contexte régional tout à fait particulier dont cet article se propose d’esquisser sommairement les coordonnées historiques, politiques et sociales.
Perspective historique Outre un substrat linguistique commun, des échanges commerciaux, alliances matrimoniales ou réseaux confrériques (d’obédience sunnite) établissent des rapports multiséculaires de réciprocité entre les quatre îles de l’archipel des Comores (1). Le Protectorat français que devient Mayotte à partir de 1841 prélude à la domination coloniale que la France exerce sur l’archipel de 1886 à 1974 (2). À la décision prise en 1958 par l’État français de transférer la capitale administrative du Territoire, de Dzaoudzi (Mayotte) à Moroni (Grande Comore), suscitant la méfiance à l’égard des élites grand-comoriennes et anjouanaises, soupçonnées de favoriser leurs îles au détriment de celle de Mayotte, répond en novembre de la même année un Congrès des notables qui initie à Tsoundzou le mouvement procolonial en faveur de « Mayotte française », amplifié et structuré à partir de 1963 par le Mouvement Populaire Mahorais (MPM), matrice historique du départementalisme dont la classe politique mahoraise contemporaine est en quelque sorte l’héritière, du député LR Mansour Kamardine (adepte de la théorie du grand remplacement dans sa version mahoraise (3)) à la députée LIOT Estelle Youssouffa (aux arguties racistes délibérément criminogènes (4)), en passant par le 1er vice-président du Conseil départemental, Salime Mdéré (apprenti-provocateur de la rhétorique génocidaire (5)).
En plus d’un lobbying tenace auprès des autorités françaises, appuyé notamment par l’Action Française (sans oublier les réseaux françafricains de Jacques Foccart), l’activisme du MPM se déploie durant les années 1960-1970 à travers des milices populaires (les soroda, pour soldats), notamment féminines (les « chatouilleuses »(6)), que la perspective rapprochée de l’indépendance incite à la persécution systématique de tous ressortissants des trois autres îles (mais également de Mahorais), jugés favorables à l’unité politique de l’archipel (les serrelamen, ceux qui se tiennent la main). Dans le contexte du référendum d’autodétermination de décembre 1974 (63% des Mahorais s’y opposent) et de l’indépendance unilatéralement proclamée des Comores en juillet 1975, plus d’un millier de « Comoriens » sont expulsés ou fuient avec l’assentiment complice de l’État français, lequel promulgue une loi qui entérine le principe d’un décompte différencié des votes, séparant de fait Mayotte du reste de l’archipel (7) en contradiction avec le principe d’intangibilité des frontières coloniales, appliqué partout ailleurs au moment des indépendances, notamment africaines (depuis, la France a été maintes fois condamnée par l’Assemblée générale des Nations-Unies, sans effet…). Dans la foulée, un coup d’état fomenté par les Services français renverse dès le mois d’août 1975 le président comorien Abdallah : où le mercenaire Bob Denard inaugure vingt années de politique françafricaine aux Comores (dont l’assassinat de deux présidents, en 1978 et 1989).
« Comoriens » et « clandestins » Depuis lors, une dissociation intime travaille la géographie humaine et mentale de l’archipel. De même que l’État comorien, sous l’influence de Paris, n’exploite le sentiment d’inachèvement territorial de la nation qu’à des fins démagogiques en matière de politique intérieure, de même un spectre hante la conscience mahoraise, dans son rapport contrarié à l’État français (entre angoisse de l’abandon et affirmation du Département) : celui de cette altérité « comorienne » qu’elle s’acharne à refouler d’elle-même. Dans ce cadre, l’histoire du « clandestin » est celle de sa fabrique procoloniale, entre fiction administrative et politique schizophrène de l’identité. À cet égard, l’instauration en janvier 1995 d’un visa préalable d’entrée à Mayotte (Visa Balladur) pour les ressortissants des trois autres îles de l’archipel, officialise l’alliance objective de l’État français avec les discours du MPM et de l’extrême-droite dans leur criminalisation commune du « Comorien » (8) : « Voleurs d’emplois, de terrains, d’époux et d’épouses, de convictions et même d’identité… Dès la fin des années 80, les Comoriens des autres îles étaient accusés de tous les maux à Maore [Mayotte]. Une manière de dissimuler les véritables enjeux auxquels était confrontée l’île. ‘Non à l’envahissement des travailleurs étrangers dans nos entreprises’, ‘Non au commerce ambulant étranger et illégal’, ‘Non au développement des bidonvilles étrangers’, ‘À bas les maris étrangers’… Brandies il y a près de vingt ans – le 16 novembre 1988 – par environ 300 manifestants dont une majorité de femmes, ces banderoles illustrent toute la diversité des tares dont se trouvaient déjà accusés les ressortissants des îles voisines. » (9)
Par ailleurs, ce Visa Balladur inflige aux « Comoriens » une condition migratoire de plus en plus difficile, quand elle n’est pas tragique : lourdeur dissuasive des process administratifs (85% des demandes d’asile rejetées) ; entre 300 et 500 euros pour franchir dans un kwassa (pirogue à moteur) souvent surchargé les 70 kms qui séparent Mayotte d’Anjouan ; plus de 20.000 naufragés morts en mer durant les 25 dernières années. Conjointement aux moyens mis en œuvre par l’État français contre l’entrée et le séjour de Comoriens devenus « illégaux » dans une île de leur archipel (radars, patrouilles nautiques, surveillance aérienne, rafles, rétention) (10), de véritables raids villageois sont menés à l’encontre d’habitations précaires abritant des « Anjouanais » ; le maire d’une commune peut ordonner à ses agents d’incendier des habitations de « sans-papiers » (Hamouro, octobre 2003), sans évoquer les émeutes anti-comoriennes de mars 2008. Macron déclare en 2017 : « Le kwassa-kwassa pêche peu, il amène du Comorien » – calembour de négrier. {{L’Opération, paradigme politico-militaire de la Métropole En 2019, l’opération Shikandra (11) constitue le banc d’essai de Wuambushu, avec une pratique déjà systématique du « décasage » dont l’euphémisme d’inspiration coloniale recouvre près de 1.800 habitations détruites, concernant plus de 8.500 personnes, pour les seules années 2020-2022.L’amplitude sémantique du verbe uwambushu (12) offre quelques nuances instructives : défaire pour refaire (si possible en mieux) ; le terme peut également désigner le fait d’initier une action incertaine, sans en mesurer vraiment les risques. À propos d’un tiers, il a valeur de reproche ; en référence à soi, il suggère les difficultés rencontrées dans l’action que l’on a engagée. Si Libération évoque « une opération ni faite ni à faire », il n’en demeure pas moins que l’État français et ses fidèles prétendent réagir par la brutalité aux effets mortifères du leurre procolonial qu’ils ont eux-mêmes produit :
• la cible : déporter en deux mois 10.000 personnes en situation « irrégulière » vers l’île comorienne d’Anjouan et démolir les bidonvilles. Le 21 avril, Darmanin déclare dans Le Figaro : « Nous allons détruire l’écosystème de ces bandes criminelles ». • les troupes : envoi de 510 [sic] membres des forces de l’ordre, ajoutés aux 750 policiers et 600 gendarmes déjà sur place : CRS8, GIGN, RAID. Dès le 23 avril, à Tsoundzou, le ton est donné : 650 grenades lacrymogènes, 85 grenades de désencerclement, 60 tirs de LBD, des tirs à balles réelles au pistolet automatique de la part des sinistres de la CRS8… • l’agenda, validé par Macron en Conseil de défense : « Il n’y a pas un moment où on la commence et un moment où on la termine » (Darmanin à propos de l’opération, Le Figaro, 20 avril) – caricature sordide de l’Opération Justice Infinie lancée par le Pentagone suite aux attentats du 11 septembre 2001. Plutôt indifférent aux manifestations (en métropole, à La Réunion (13)) d’une opposition sporadique à Wuambushu, en dehors de tribunes et autres appels à l’initiative d’associations de défense des droits humains, de syndicats et mouvements politiques français ainsi que d’organisations ou collectifs comoriens, le gouvernement doit néanmoins négocier certaines entraves et dissonances d’ordre éthique, juridique ou diplomatique qui ont pour effet, sinon d’enrayer le récit officiel de sa bataille de Mayotte, du moins d’en différer le double volet opérationnel (démolitions et expulsions) ; la droite et l’extrême-droite l’accusant de ne pas se donner les moyens d’un objectif qu’ils partagent par ailleurs, les élu.e.s et collectifs mahorais le pressant d’entreprendre la déportation de masse qu’ils réclament.
Contre la LDH / Contre la magistrature Les propos pernicieux que Borne, Darmanin et consorts ont tenu à propos de la Ligue des Droits de l’Homme, après que l’association a dénoncé la violence diluvienne de l’État ainsi que son entrave faite à l’intervention des secours lors de la manifestation du 25 mars à Sainte-Soline, ne sont pas sans lien avec les condamnations multiples par lesquelles la LDH et la CNCDH s’opposent à la politique migratoire de l’État français à Mayotte comme à l’indignité du traitement réservé aux habitants des quartiers pauvres (« Comoriens » ou pas), sous couvert de lutte contre l’insalubrité. Et c’est sans surprise que le député Mansour Kamardine ou le maire de Mamoudzou Ambdilwahedou Soumaïla, reprennent la rhétorique vindicative du régime à l’égard des « associations droitdelhommistes »…
Par ailleurs, dès les 24 et 25 avril, le Tribunal judiciaire de Mamoudzou suspend l’évacuation et la destruction d’habitations précaires en raison d’une absence de relogement (14). Le Préfet de Mayotte fait appel (15). Un affrontement juridique et politico-médiatique s’annonce, qui oppose en quelque sorte le droit de l’État à l’État de droit. Dans ce cadre, la présidente du Tribunal, Catherine Vannier, passe pour avoir outrageusement suspendu l’opération ; et la presse d’évoquer à charge l’ancienne vice-présidente du Syndicat de la Magistrature, « plutôt à gauche » (Europe 1, 27 avril) (16). En comparaison, le chef de la police de Mayotte bénéficie d’une mansuétude complice : Laurent Simonin fut en effet condamné dans l’affaire Benalla pour avoir transmis au barbouze la vidéo de la Contrescarpe : « violation du secret professionnel » et « détournement d’images issues d’un système de vidéoprotection »… Quant à Mansour Kamardine, il fantasme un « harcèlement judiciaire contre l’État à Mayotte » et délire sur le « caractère raciste et anti-français des associations d’aide aux immigrés clandestins », animées par des « humanistes hémiplégiques » (lefigaro.fr, 28 avril). Finalement, le 17 mai, la chambre d’appel de Mayotte autorise la destruction du quartier Talus 2 (Majicavo), démarrée avec fracas dès le 22 mai, dans l’incertitude d’un relogement pérenne pour les habitants.À noter toutefois que le 19 mai, un groupement d’associations, dont le Conseil Représentatif des Associations Noires (CRAN) et le Collectif comorien Stop Uwambushu à Mayotte (CSUM), formule une requête auprès de la Cour Pénale Internationale pour « crime contre l’humanité » commis par l’État français à l’encontre de Comoriens dans le cadre de l’opération Wuambushu. Il réclame conjointement l’émission d’un mandat d’arrêt international visant la députée Estelle Youssouffa ainsi que le 1er vice-président du Conseil départemental, Salime Mdéré, pour leurs propos d’inspiration génocidaire. La bataille juridique n’est pas close…
Contre (tout contre) l’État comorien… Depuis le début de l’opération, l’État comorien pratique un jeu délicat d’ouverture et de fermeture à l’égard de Wuambushu. Si le régime du colonel Azali annonce dès le 24 avril la fermeture des ports comoriens, celui de Mutsamudu (Anjouan) réouvre officiellement le 26 avril, augurant d’une reprise des expulsions. Mais le 27, c’est le gouverneur même d’Anjouan, Anissi Chamsidine, qui conditionne l’entrée des expulsés en provenance de Mayotte à la présentation d’une pièce d’identité (17) ainsi qu’à l’attestation d’une adresse de résidence dans l’île comorienne. Pour autant, la position de l’État comorien à l’égard de Paris n’en est pas moins ambiguë, comme en atteste l’accord-cadre signé en 2019 : le financement à hauteur de 150 millions d’euros par la France d’une aide au développement engage les Comores à accueillir les expulsés en provenance de Mayotte (18)… Cette ambivalence à l’égard de l’ancienne et si présente puissance coloniale (19) apparait dans l’entretien que le président Azali, promu depuis février à la tête de l’Union Africaine (20), accorde au Monde le 8 mai dans le cadre d’une visite officielle en France : « [Wuambushu] aurait pu être plus discret et efficace [sic]. Il y a un vol et un bateau entre Mayotte et Anjouan tous les jours » et, en même temps, « Je demande la levée du visa entre les Comores et Mayotte », tout en plaçant la France devant sa responsabilité historique à l’égard du département qu’elle a elle-même institué, avant que la langue de bois diplomatique ne reprenne le dessus dès le 9 mai dans un communiqué conjoint des gouvernements français et comoriens, manifestant leur volonté de « lutter contre les trafics et contre les passeurs » et de « coordonner leurs efforts communs pour la sauvegarde des vies humaines en mer »… Cynisme morbide.On comprend pourquoi le Comité Maore (dont le but est d’« œuvrer à la libération de l’île comorienne de Mayotte ») fut interdit de défiler à Moroni contre Wuambushu ; idem pour un rassemblement prévu le 14 mai devant le Palais du Peuple de la capitale comorienne, sans évoquer l’empêchement fait au gouverneur d’Anjouan de pénétrer dans l’enceinte du port de Mutsamudu, suite à sa création d’un Comité de vigilance « habilité à prendre toutes initiatives et entreprendre des actions non violentes pour éviter que la population d’Anjouan soit menacée dans sa sécurité et dans sa quiétude en raison du déplacement massif de la population par la France » (Mayotte la 1ère, 12 mai).Le 15 mai, le gouvernement comorien se déclare prêt à accueillir les expulsés volontaires (?), à l’exclusion des personnes ayant fait l’objet d’une condamnation. Dès le 17, une vingtaine de « Comoriens en situation irrégulière » (dont 4 « départs volontaires ») embarque à bord du Maria Galanta, sous la supervision menaçante de membres du Collectif des Citoyens de Mayotte dont Safina Soula déplore qu’ils ne soient « qu’une vingtaine à bord » (nouvelobs.com, 17 mai). Le soir même, le porte-parole du gouvernement comorien assure du débarquement effectif des expulsés dans le port anjouanais de Mutsamudu : « Il n’y a eu que des départs volontaires [sic] » (europe1.fr, 17 mai). Le 19, le Citadelle prend la mer à destination d’Anjouan avec 48 expulsé.e.s (de force) à son bord, tandis que les autorités comoriennes prétendent n’autoriser aucun accostage au-delà de 16h30… Encore et toujours, l’État comorien assume de jouer le jeu de Paris : un jeu de dupes, certes – et de massacre ?
Contre les « barbares » Outre un double processus de dépendance et de dépossession, qui révèle plus largement la colonialité des rapports qu’entretient l’État français avec les quatre îles de l’archipel, l’assimilation xénophobe de la délinquance juvénile à l’immigration « clandestine » (quand les mineurs en question, isolés ou non (21), sont souvent natifs de Mayotte et de nationalité française (22)), occulte les mutations sociales et culturelles que le département induit au sein de la jeunesse ; une jeunesse à la recherche d’elle-même entre les inerties d’une structure familiale traditionnelle en voie d’éclatement et la paupérisation d’une existence pliée aux lois iniques de la marchandise et de l’argent, soumise à la violence accrue d’un rapport social capitaliste dont les milliers d’enfants et adolescents (« comoriens » et « mahorais » confondus) actuellement non (ou peu) scolarisés à Mayotte, éprouvent la terreur et la désespérance, exposés qu’ils sont à la mendicité, à la chimik (mélange de cannabis et d’alcool), aux rafles policières, etc…À cet égard, la haine que le député LR Mansour Kamardine voue à la figure expiatoire du jeune « barbare » comorien (lefigaro.fr, 28 avril) ne fait que trahir l’ampleur d’un point aveugle : celui de « Mayotte française », de son impasse et de son échec (23). Quant aux opérations de blocage devant les établissements de soins supposés favoriser les « Comorien.ne.s » (24), ils n’apaiseront pas un refoulé aussi ravageur. La surcharge des infrastructures sanitaires, dispensaires et maternités, serait due aux « Anjouanaises » venues accoucher à Mayotte, avant de repartir sans leur progéniture, promise au droit du sol… L’accusation, au relent de préférence biologique, recoupe la théorie du grand remplacement dont le député LR Mansour Kamardine (25) est l’un des plus fervents adeptes : « La politique du grand remplacement doit cesser » (Mayottehebdo.com, 24 avril) ; tandis qu’Estelle Youssouffa (26) (LIOT) évoque un « enfer migratoire à Mayotte » sur Radio Courtoisie (24 avril). De toute évidence, le Rassemblement National (à Mayotte, 59% au second tour des présidentielles de 2022) dicte le vocabulaire du champ politique mahorais. En vérité, Mayotte dispose d’un système de soins lacunaire dont 170 membres du personnel de santé hospitalier et libéraux de l’île dressent le constat alarmant dans la lettre qu’ils envoient le 3 avril aux autorités afin d’exprimer leur inquiétude quant à la catastrophe sanitaire que l’opération Wuambushu ne manquerait pas de produire.Qu’importe ! Le 2 mai, le sénateur de Mayotte Thani Mohamed Soilihi appelle à un « Wuambushu de l’éducation, de la santé et du logement » – un programme de discriminations sanitaire et scolaire, assorti de pogroms, comme y incitent ces dernières semaines plusieurs tracts (sans parler des réseaux sociaux) appelant par exemple à chasser les « étrangers » de leurs habitations, ou commandant à ces derniers de quitter Mayotte : « N’oubliez pas d’emmener vos enfants avec vous. Ils font partie de vos bagages » (Bouéni, 13 mai). À Moinatrindri, dans la nuit du 14 au 15 mai, un commando encagoulé digne des soroda enlève un propriétaire (mahorais) dont il saccage le domicile, au motif qu’il louerait à des « Comoriens » jugés illégaux. Relais d’un récit officiel qui construit et impose la figure du jeune-délinquant-comorien-en-situation-irrégulière comme la cause unique de tous les malheurs mahorais, Mayotte la 1ère recouvre le silence complice qui règne dans le village d’un « nuit de violences » suffisamment vague pour maintenir par amalgame un imaginaire favorable à Wuambushu.« Clandestins », « voyous », « bandes criminelles », « jeunes armés de machettes » ? Du point de vue de l’appareil procolonial, de sa police, de sa Justice (27) et de ses médias, l’équation semble donc évidente : « On a d’abord vu un Comorien déguisé en femme enceinte », dixit un flic à propos d’affrontements à Doujani. En réalité, ce que dissimulent les combinaisons blanches de chantier portées par certains émeutiers (comme à Tsoundzou), ce sont toutes les misères françaises d’une île qui n’en sont pas moins les mieux partagées au monde ; ce monde hostile dans lequel ils vivent, s’y montrant hostiles à tout le monde, pour paraphraser Alèssi dell’Umbria. Néanmoins, le repli tactique qu’opèrent certains « délinquants » dans les collines n’est pas sans rappeler l’histoire marronne du m’toro fugitif, en rupture avec l’impôt colonial ou l’asservissement. Dans ce cadre, l’intervention menée le 12 mai par quelques jeunes en cagoules, blouses blanches et machettes (selon Mayotte la 1ère) contre le blocage du Centre médical de Dzoumogné, témoigne d’un acte de résistance face à la manifestation xénophobe d’un ordre social inique. De même, si le caillassage d’un bus de soignants du Centre Hospitalier de Mamoudzou (Mayotte la 1ère, 17 mai) relève assez du régime de l’agression, trop souvent propice à la confusion anomique des cibles, il n’en exprime pas moins un sentiment de révolte à l’égard d’une institution de soins identifiée (à tort ou à raison) au Collectif mahorais qui en occupe depuis des jours le parvis d’entrée, incarnant de fait la perspective infâme d’un apartheid sanitaire (28).
Épilogue provisoire À l’heure où démolitions et expulsions vers les Comores reprennent, après les revers essuyés par Darmanin ces dernières semaines, l’île aux parfums s’abîme dans les marécages nauséabonds de sa fiction identitaire, et suicidaire (29) – tandis qu’elle s’apprête à connaître les restrictions d’eau les plus importantes de son histoire. Au cours de sa prise de parole, à l’occasion du rassemblement tenu Place de la République à Paris le 15 avril dernier à l’appel du Collectif Stop Uwambushu à Mayotte (CSUM), l’écrivain et artiste comorien Soeuf Elbadawi déclare : « Je comprends que Darmanin ait envie d’expérimenter à Mayotte ce qu’il essaiera de faire plus tard, sur l’ensemble du territoire français, avec son projet de loi de l’immigration. Permettre à ce que des déplacements de population, pour ne pas dire des déportations de masse, aient lieu, est une limite que l’État français se doit de ne pas franchir (30)… Aujourd’hui, nous savons que ce sont les États qui s’allient contre les intérêts des habitants de cet espace… [Mais] la vérité, j’ai envie de dire, jamais ne se noie ».
Gamal Oya,
24 mai 2023″
Notes (1) Grande Comore (Ngazidja), Mohéli (Mwali), Anjouan (Ndzuani) et Mayotte (Maore). (2) Unité administrative qui prend le nom de « Mayotte et dépendances » en 1892, avant d’être rattachée à la colonie française de Madagascar en 1912 et de constituer un Territoire d’Outre-Mer à part entière en 1946. (3) Ce vétéran du sarkozysme souhaite que « tout ressortissant comorien sollicitant un visa ou un titre de séjour pour la France reconnaisse, par écrit, l’appartenance de Mayotte à la France »… (Mayotte la 1ère, 29 avril). (4) « 80 % des élèves de Mayotte sont des Comoriens totalement illettrés, des bébés barbus [sic], des élèves inscrits au CP en pleine adolescence » ; « Il faut exterminer toutes ces vermines » (CNews, 24 avril). (5) « … ces délinquants, ces voyous, ces terroristes… à un moment donné, il faut peut-être en tuer, je pèse mes mots. Il faut peut-être en tuer » (JT de Mayotte la 1ère, 24 avril). Salime Mdéré se présentait pour LREM aux élections départementales de 2021 dans le canton de Bouéni. (6) La place des femmes est prépondérante dans le soutien public à Wuambushu. Parmi bien d’autres, Safina Soula, fondatrice du Collectif des Citoyens de Mayotte, est l’incarnation caricaturale de la chatouilleuse en quelque sorte radicalisée (à l’instar de la députée Estelle Youssouffa) : « Avec 80% de naissances d’enfants qui ne sont pas Français, Mayotte dans quinze ou vingt ans sera une île comorienne… Ce n’est rien du tout 1.000 cases. J’aurais préféré un plan global, raser toutes les cases en tôle existantes » (mayottehebdo.com, 24 avril). (7) Lors du nouveau référendum que la France organise à Mayotte en février 1976, 99% des voix s’expriment en faveur de « Mayotte française », laquelle obtient le statut de Collectivité territoriale. Le Conseil général demeurera sous la tutelle du préfet, qui fait office de gouverneur colonial, jusqu’à juillet 2001, date à laquelle Mayotte devient une Collectivité départementale, création hybride sur la voie de la départementalisation (mars 2011). (8) Mayotte est aussi la destination de personnes issues de l’Afrique des Grands Lacs, de Madagascar, voire du Sri Lanka. (9) Cité in L. Giachino & R. Carayol, « ‘Étrangers’ à Maore : le fantasme de la cinquième colonne », Kashkazi, n°73, 2008. (10) Une mise au point : les naufragés ne périssent pas en raison de la précarité qui les inciterait à rejoindre le mirage mahorais « au péril de leur vie » mais bien parce que la PAF française accule les embarcations qu’elle traque à emprunter des voies de navigation dangereuses : les eaux peu agitées des passes balisées (reliant le lagon au large) sont ainsi délaissées au profit des lames tourmentées au-dessus de la barrière de corail. De telles conditions demeurent étrangères aux mêmes embarcations qui circulent normalement entre les trois autres îles « comoriennes » de l’archipel. (11) Le terme emprunté à la langue comorienne (et retourné contre ses locuteurs) désigne un poisson redouté du lagon, habitué à défendre son territoire en mordant les baigneurs : les Comoriens, à la mer ? Une vidéo montre deux femmes mahoraises, participant à la manifestation du 29 avril en soutien à Wuambushu, intimer à une « Anjouanaise » de se « jeter à la mer »… (12) En effet, wuambushu procède d’une déformation morphologique du verbe uwambushu. (13) Presque impossibles à Mayotte, où les quelques syndicats (CGT, FSU, Solidaires) et associations (caritatives, humanitaires) qui tentent d’exprimer publiquement leur opposition à Wuambushu sont l’objet d’invectives, voire de menaces, de la part des collectifs comme de la plupart des élu.e.s mahorais en faveur de l’opération. (14) Il s’agit du quartier Talus 2 à Majicavo, sur la commune de Koungou, où vivent des familles (de nationalité française ou pas) engagées pour certaines depuis des années dans une procédure de titrisation des parcelles sur lesquelles elles se sont initialement installées avec l’aval des autorités. En fait de relogement, des lieux tels que la MJC de M’tsapéré sont réquisitionnés en guise de Locaux de Rétention Administrative, en complément du CRA (136 places) déjà saturé et sous tension (26000 retenu.e.s en 2022, triste record national). Quant à la prison de Mayotte, elle est à plus de 300% de sa capacité ! À quand les stades ?… (15) En poste à Mayotte depuis 2021, auparavant Préfet délégué pour la défense et la sécurité (Auvergne-Rhône-Alpes), Thierry Suquet est né en 1960 à Constantine (Algérie). (16) La même n’en préside pas moins les audiences en rapport avec des comparutions immédiates qui participent de la répression pénale en cours dans le cadre de Wuambushu. (17) Se débarrasser de ses papiers peut éviter le renvoi vers son pays d’origine. (18) Comble de l’ignominie, cet accord-cadre (se) raconte que « la jeunesse [comorienne] cherche un salut dans des contextes qui semblent plus accueillants et plus propices à [son] épanouissement comme Mayotte » ! Par ailleurs, le cynisme de ce « partenariat migratoire » rappelle l’accord que le Royaume-Uni a conclu avec le Rwanda, qui accepte en échange de 140 millions de livres sterling de recevoir les migrants que Londres serait dans l’incapacité d’expulser vers leur pays d’origine. (19) Ne parle-t-on pas de pétrole, quelque part entre le Mozambique et les Comores ? (20) Une présidence qui permettrait à Azali de réactiver le Comité Ad Hoc 7 de l’UA en rapport avec l’île comorienne de Mayotte, un comité en sommeil depuis les années 1990. Le fera-t-il ? (21) Le sociologue Nicolas Roinsard contextualise ainsi le phénomène des « bandes » à Mayotte : « Certains ont quitté le domicile familial à la suite d’un conflit ou de l’expulsion d’un parent, d’autres pour soulager leur mère isolée et paupérisée… » (lejdd.fr, 16 mai). (22) Certains sont nés de l’union « mixte » d’un Mahorais avec une Comorienne, mais restent perçus comme des « étrangers ». (23) À Mayotte, près de la moitié des 18-30 ans subit le chantage systémique au salariat depuis la condition reléguée du chômage, dans une île d’environ 280 000 habitants dont un sur deux a moins de 20 ans, quand 70 % de la population vit sous le seuil national de pauvreté (moins de 30€ par jour). (24) Depuis le 4 mai, avec le blocage puis la fermeture (sur décision du Centre Hospitalier de Mamoudzou, dont le directeur dépose plainte contre X) du Centre de consultation et de soins de Jacaranda, à l’appel du Collectif des citoyens de Mayotte, le mouvement se poursuit par l’entrave des accès au CHM ainsi qu’à la plupart des autres établissements de santé dans l’île, empêchant ainsi les « clandestins » d’accéder aux soins, dans le cadre d’une protestation coordonnée contre la suspension (levée depuis le 17 mai) des expulsions initialement prévues vers l’île comorienne d’Anjouan. (25) Outre une propriété en Grande Comore, il possède de la famille à Anjouan, où il a célébré son grand-mariage coutumier. (26) D’une mère d’origine belge et d’ascendance grand-comorienne du côté paternel. (27) Comparutions immédiates, convocations de mineurs, procès sommaires, condamnations à plusieurs années de prison ferme… Darmanin brandit ses trophées de guerre : « À Mayotte, la fermeté paie. Merci aux policiers et gendarmes qui ont mené plusieurs interpellations très importantes ces derniers jours, notamment des chefs de bandes » (un tweet). (28) Si les personnels de santé semblent désapprouver (plus ou moins ouvertement) l’entrave faite aux soins de la part des Collectifs mahorais, la Préfecture relativise les blocages qu’elle attribue à des « femmes inoffensives », complaisance manifestée le 19 mai au cours d’une audience du tribunal administratif de Mamoudzou, dans le cadre d’une requête formulée à l’encontre du préfet de Mayotte par une patiente s’étant vue refuser l’accès à l’hôpital malgré sa pathologie lourde. (29) Ironie tragique : le 22 mai, un ouvrier mahorais de l’entreprise Tetrama, engagée dans la destruction de Talus 2 (Majicavo), est victime d’un AVC devant son propre domicile promis à la démolition… (30) Une limite que le député LR Mansour Kamardine incite à franchir lorsqu’il propose de « réfléchir aux voies et moyens législatifs pour couper les pompes aspirantes que sont le droit du sol, l’accès au système de soins gratuits et illimités pour les étrangers… et l’obligation pour les collectivités de scolariser des enfants jetés par leurs parents sur nos plages » (lefigaro.fr, 28 avril). Le même déclare encore sur le site de Valeurs Actuelles, dont l’éditorial oblique du 5 mai s’intitule « Mayotte, laboratoire de catastrophe générale » : « L’opération de restauration de l’État de droit Wuambushu est une urgente nécessité pour Mayotte, dont il conviendra de tirer les leçons pour la métropole ».
Le 8 décembre 2020, la DGSI arrêtait neuf personnes, désignées par le Ministère de l’Intérieur comme « membres de la mouvance ultragauche ». Sept d’entre elles sont mises en examen, dont cinq placées en détention. Elles sont accusées d’« association de malfaiteurs terroristes », ce qu’elles nient catégoriquement. Après l’extrême violence de leurs arrestations (interventions du RAID, fourgons banalisés, sacs sur la tête, camisoles, GAV antiterroriste, fusils d’assaut chargés, humiliations…), après la violence des incarcérations (isolement carcéral, grève de la faim, statut DPS, fouilles à nu…), c’est aujourd’hui la violence de la Justice qui attend les inculpé·es, avec un procès qui se tiendra du 3 au 27 octobre 2023.
Afin que leur parole soit entendue, parce qu’ils et elle ont besoin de soutien, mais aussi pour se mobiliser contre l’extension sans précédent de l’arsenal antiterroriste. Dans l’émission de ce jour, nous revenons sur cette affaire. Nous débuterons avec l’entretien réalisé en compagnie d’une personne proche des inculpé.es.
Et en seconde partie d’émission, nous vous diffuserons un montage dans lequel alterneront les prises de parole de libre flot (orales ou écrites) avec les prises de parole du rassemblement organisé à Ménilmontant le 29 mars 2022
Cette affaire sera jugée du 3 au 27 octobre 2023.
L’AFFAIRE DU 8 DÉCEMBRE : C’EST QUOI ?
L’affaire du 8 décembre 2020 est une opération antiterroriste commanditée par le Ministère de l’Intérieur contre des militant·es désigné·es par ce dernier comme des « activistes d’ultragauche » et mis·es en examen pour « association de malfaiteurs terroristes ».
La DGSI, accompagnée d’unités de polices militarisées (GAO¹, RAID), a procédé à l’arrestation de neufs personnes – que nous réunissons sous la bannière « libertaires » – dont les engagements politiques étaient divers et dans des régions différentes: soutien aux familles réfugié·es, projets d’autonomie et de lieux collectifs à la campagne, soutien aux victimes de meurtres d’État, squat d’activités politiques et contre-culturelles, écologie et défense de la cause animale, implication dans des Zones A Défendre, activisme dans la scène punk, féminisme, etc.
Ces neuf personnes ne se connaissent pas toutes. Certaines ne s’étaient côtoyées qu’une fois dans leur vie (pendant le confinement). Mais toutes avaient comme point commun une personne, ciblée par la DGSI depuis son retour du Rojava en 2018 où il avait participé à la lutte contre DAECH.
FAITS REPROCHÉS
A l’heure de leur arrestation chacun·e menait sa vie dans des régions différentes, bien que la DGSI affirme avoir déjoué un « vague projet de s’en prendre à des forces de l’ordre » et que la médiatisation se fit l’écho sans nuance de ces suspicions pendant quelques jours.
Pourtant, les inculpé·es, leurs proches et leurs avocat·es démentent ces accusations, qui sont fondées sur des « extrapolations délirantes ».
Il est reproché aux inculpé·es plusieurs « éléments matériels » qui s’étalent sur à peine deux mois et concernent des personnes différentes : la détention d’armes, la confection d’explosifs, la pratique de l’AirSoft et l’usage d’outils de communication sécurisés.
Ces faits sont soit parfaitement légaux, soit des délits qui relèvent du droit commun, et les inculpé·es sont prêt·es à en assumer les conséquences. Mais la DGSI et la Justice tentent par tout les moyens de faire entrer cela dans un cadre « terroriste ».
Pour ce faire, tout le reste de leurs activités (projets professionnels, militants ou familiaux) qui démentent les accusations est mis sous le tapis pour ne retenir que des éléments « à charge » que les techniques d’intrusion dans leur vie ont pu extraire. D’après le témoignage d’une mise en examen, « le dossier repose sur un ensemble d’éléments disparates qui n’ont globalement rien à voir les uns avec les autres mais qui, décontextualisés et racolés, permettent de construire un décors ».
La détention d’armes.
Quelques armes ont été saisies dans cette enquête. Des armes de collection inutilisables et quelques carabines de chasse appartenant à quatre inculpé·es (ou à leur famille). Rien de comparable aux arsenaux de guerre saisis en juin 2022 en Alsace ou dans l’Eure en novembre 2021 chez des néo-nazis et militaires ; sans que le PNAT ne s’y intéresse.
Deux inculpés étaient inscrits dans un club de tir et avaient un permis de chasse dans une optique d’autosuffisance. Leur participation à ce sport n’était nullement cachée, ils en parlaient régulièrement au téléphone et le gérant du club était abasourdi quand il a appris ces arrestations. Les armes dont ils disposaient, mis à part un fusil de chasse, étaient réservées au club de tir car elle ne sont pas suffisamment létales pour la chasse. Un autre inculpé avait des carabines quasi inutilisées qui servaient de temps en temps à tourner des clips.
Quatre armes illégales étaient détenues (ce qui relève d’un délit de droit commun) : un fusil à canon scié et trois carabine. Le premier était stocké dans l’habitat de Libre Flot. Il l’avait acheté sur un vide grenier il y a des années pour s’entraîner au tir avant de partir au Rojava.
Les carabines, appartenant à un autre inculpé, avaient été récupérées il y a plusieurs années dans le but de chasser ou faire peur aux nuisibles sur un terrain. Et pour l’une d’entre elle, pour son esthétique « années 30 » pour le tournage d’un clip. Dans les deux cas, ils ne possédaient pas ou peu de munitions.
La confection d’explosifs.
Au cours de l’enquête, il y a eu deux moments de confection d’explosif. L’un s’est déroulé entre deux inculpés lors d’un week-end de retrouvailles après de nombreuses années. L’un d’eux étant artificier spécialisé dans les effets spéciaux. Une quantité infime a été réalisée et aucun stock n’a été gardé.
Le second moment est arrivé quelques semaines plus tard lorsqu’au hasard du confinement, plusieurs inculpé·es se sont retrouvé·es à cohabiter dans un grand lieu collectif à la campagne pendant trois semaines. Pour tuer le temps (et pas des gens!), un après-midi a été consacrée à tenter de fabriquer du TATP² avec une recette trouvée sur internet. Une quantité infime est finalement réalisée (c’était pas gagné!) et le pétard est allumé dans les bois. Pour la plupart des inculpé·es, c’était la première expérience avec une explosion et ça ne leur a pas spécialement plu. La curiosité passée, aucun autre essai du genre n’aura lieu jusqu’aux arrestations (8 mois plus tard!).
La détention, confection et transport de matières dangereuses est un délit condamnable dans le droit commun. Encore une fois, c’est le procès d’intention et d’opinion qui permet à la Justice de transformer cela en « terrorisme ».
La pratique de l’AirSoft.
Trois inculpé·es sur les sept pratiquaient occasionnellement de l’AirSoft, une pratique sportive de simulation de tir avec des « répliques », c’est à dire des pistolets à billes. C’est une pratique parfaitement légale, pourtant deux parties d’AirSoft sont reprochées aux inculpé·es et la DGSI les considère comme des entraînements paramilitaires. Là encore, la DGSI affirme que Libre Flot se servirait de ce jeu pour former à la guérilla ses ami·es. Cela pose la question : quelles pratiques légales deviennent illégales si vous avez une expérience de guerre ?
Les outils de communication sécurisés.
La Quadrature du Net a récemment démontré – provoquant un tollé international dans le monde de l’informatique libre – comment la DGSI transformait des pratiques banales d’autodéfense numérique en un « comportement clandestin » et une « culture du secret » qui démontreraient les intentions terroristes supposées des inculpé·es. C’est le même type d’extrapolations paranoïaques que l’on retrouve à tous les niveaux du dossier, atteignant des niveaux vertigineux dans la présomption de culpabilité.
L’usage de WhatsApp, Signal, Tails, Tor, eOS, Jitsi, Telegram, (etc.) sont assimilés à des comportements pré-terroristes. Trois inculpé·es sont également poursuivi·es pour « refus de communiquer ses conventions de déchiffrement », un nouveau délit instauré par la loi du 3 juin 2016 « renforçant la lutte contre le crime organisé, le terrorisme et leur financement ». Ce délit vient fragiliser le droit fondamental de ne pas s’auto-incriminer (le droit au silence).
DÉTENTION PRÉVENTIVE (ET TORTURE BLANCHE)
Ces arrestations préventives on conduit à cinq incarcérations préventives dans des conditions extrêmes. Les détentions sont allées de 4 mois et demi de détention sous régime DPS (détenu particulièrement signalé) à 16 mois d’isolement carcéral (se terminant grâce à une grève de la faim éprouvante).
Plusieurs mesures « antiterroristes » ont été illégalement administrées contre les inculpé·es, notamment un placement à l’isolement pendant 15 mois pour Libre Flot, et d’incessantes fouilles à nu pour Camille. L’État a récemment été condamné (timidement) pour une partie de ces violences aux effets dévastateurs.
Les comités de soutien, les proches et les avocat·es n’ont cessé de dénoncer l’usage de l’isolement carcéral à des fins de « torture blanche ». Pendant tout le temps de son incarcération, Libre Flot a pris soin d’alerter sur les effets de l’isolement sur sa santé. Alors qu’il témoignait de pertes graves de mémoire, d’incapacités à se concentrer, de migraines chroniques (etc.), le Juge d’Instruction continuait (en toute connaissance de cause) à mener des interrogatoires, exploitant sadiquement la situation. En avril 2022, il daignera le libérer (sous bracelet électronique) « pour raisons médicales », après 36 jours de grève de la faim, une journée internationale de mobilisation et une Tribune réclamant sa libération. Un an après l’isolement, le préjudice reste bien présent.
INSTRUCTION A CHARGE
Les juges d’instruction désignés ont fait de cette affaire une affaire personnelle dès le début. Dès leur première interaction avec les inculpé.es, leur haine est palpable. Elle s’illustre dans leur ton excédé, leurs commentaires méprisants, leur mépris de classe, témoignant d’autant de bas instincts et de leur subjectivité.
De la même façon que la DGSI lors des auditions de témoins, de nombreux propos abjects tenus par Jean-Marc Herbaut sont complètement passés sous silence et protégés par le sacro-saint Secret du Palais. Cette vieille loi du Secret est une pratique d’omerta qui est exercée au sein de l’appareil judiciaire: « ce qui se dit en off reste en off ». Les avocat·es se risquant à ne pas le respecter perdraient un certain nombre d’avantages au sein du Palais (perte de confiance des magistrats, rétention d’information, etc.). Les témoignages de Libre Flot sont importants en ce sens, lorsqu’il s’indigne que le juge l’assimile aux combattants de DAECH (« tes petits amis de daech ») alors qu’il a lui même combattu le djihadisme au Rojava.
La première obstruction à la Défense des inculpé·es a été (outre les placements en détention) le refus de leur donner accès à leur propre dossier. La première inculpé·e libérée a dû aller en Cour d’Appel pour enfin avoir le droit d’y accéder.
Cette première obstruction avait pour but d’empêcher que la Défense (qui a besoin du regard éclairé des inculpé·es) puisse poser des requêtes en nullités (c’est à dire, faire annuler des éléments si des irrégularités sont constatées). Les délais légaux pour poser ce type de requêtes sont : six mois après les arrestations. La première inculpée n’a eu que trois semaines avant la fin de ce délai pour aider les avocat·es à éplucher le dossier et contester la légalité de plusieurs éléments. Les requêtes seront finalement toutes rejetées en bloc par la Chambre d’Instruction.
Début septembre 2021, les juges d’instruction ont été interpellé·es par des « familles et ami·es et des inculpé·es » au travers d’une Lettre Ouverte dénonçant les pratiques de la DGSI et demandant la libération des derniers inculpés, en vain.
Libre Flot a également témoigné plusieurs fois du comportement outrancier de Jean-Marc Herbaut dans son bureau : accès de colère, insultes, etc. Il dénonce dans son communiqué de grève de la faim : « les mêmes techniques tortueuses que la DGSI : la manipulation, la décontextualisation, l’omission et l’invention de propos et de faits afin de tenter d’influencer les réponses. »
Malgré cet effort pour démontrer l’indémontrable, l’instruction a été forcée d’admettre à minima que « aucun passage à l’acte imminent ne semble avoir été envisagé ». Le soit disant projet de s’en prendre aux forces de l’ordre ou à des militaires initialement « vague », s’est finalement échoué sur des sables mouvants de l’accusation politique. L’affaire ouverte en « criminel » se dégonfle donc en « correctionnelle ». Il n’y a pas de projet ! Mais se refusant à couler définitivement, l’accusation s’accroche à la bouée des jurisprudences islamophobes de ces dernières années.
Sans une once de honte, Jean-Marc Herbaut écrit dans son ordonnance de renvoi :
« Est punissable la seule participation au groupement ou à l’entente, sans qu’il soit nécessaire de démontrer une participation aux crimes ou à leur préparation. De même, il est inutile de démontrer la connaissance précise et concrète du projet fomenté par le groupe. »
Pour résumer : pas de groupe constitué, pas de préparation à des actions (ni crime, ni sabotage), pas d’entente politique, pas de préparation à la clandestinité, mais quand même coupables ?! L’idéologie de certain·es magistrat·es a définitivement fait chavirer le Droit dans des eaux bien troubles…
Au même titre que la DGSI et le PNAT, qui n’hésitent pas à verser dans le conspirationnisme le plus malhonnête pour combler la vacuité de leur dossier (on vous garde les pépites pour plus tard!). Il faut dire que le tout jeune Parquet National Anti-Terroriste tient sa première affaire d’ultragauche et il n’entend pas en démordre. Il a d’ailleurs régulièrement fait fuiter des éléments totalement faux dans la presse de droite radicale et d’extrême-droite.
Un article dans le Figaro mélangeait Libre Flot avec autre militant internationaliste, il a été modifié sous peine de plainte. Puis, suite à la publication d’un dossier d’enquête par la Quadrature du Net sur l’assimilation du chiffrement à un comportement terroriste, des représentants du PNAT affirmaient dans un colloque sur le numérique : « il y aura une riposte médiatique ». La réponse est venues quelques semaines plus tard, avec un article sur France Info qui s’acharnait encore une fois sur Libre Flot, en lui ajoutant des armes et explosifs dans son camion qui n’ont jamais existé.
RETOUR EN DÉCEMBRE 2020
Encore aujourd’hui, les inculpé·es, leurs avocat.es et leurs soutiens se questionnent sur les raisons pour lesquelles les arrestations ont été déclenchées ce fameux 8 décembre. Les inculpé·es vivaient dans des régions différentes et menaient leurs projets de vie et engagements militants distincts. Huitmois après les gestesqu’on leur reproche, l’évidence était qu’il n’y avait aucun groupe et aucune organisation en vue de réaliser un quelconque projet d’action violente.
Alors pourquoi le déclenchement de cette affaire ?
Frapper la contestation contre les violences policières
Au travers de la communication politique et médiatique qui eût lieu après leurs arrestations, on peut comprendre l’opportunité qu’à saisie Darmanin (car la DGSI est sous les ordres du Ministère de l’Intérieur, il était donc au courant depuis de longs mois de cette affaire qui se montait). Nos camarades on servi d’avatars médiatiques au service d’un projet idéologique, nommons-le : la progression du fascisme.
En Juin 2020, à la sortie du confinement, le mouvement BlackLivesMatter était à son apogée en France, avec une mobilisation historique devant le Tribunal de Paris. La question des meurtres policiers et du racisme d’État était dans toutes les bouches. La Justice condamnait l’État pour « fautes lourdes » pour des affaires de violences policières, le Conseil de l’Europe épinglait la France suite aux violences policières envers les journalistes. La vidéo du lynchage raciste de Michel Zecler passait sur tous les écrans, deux semaines avant les arrestations du 8 décembre. Les Teknivals se faisaient violemment écraser par des interventions policières et la gestion sécuritaire de la crise sanitaire faisait sérieusement grincer des dents.
Le gouvernement répondait dans l’empressement par une surenchère sécuritaire en faisant passer deux lois particulièrement graves: la loi séparatisme et la loi sécurité globale. Et en réponse à la grogne qui montait à mesure que le gouvernement répétait « il n’y a pas de violences policières », « nous allons casser du casseur » ; il fallait trouver une sortie médiatique.
Quoi de mieux pour détourner l’attention que cette vieille fable, étayée par aucun fait, des manifestant·es qui pourraient tuer du flic et plus généralement de la police en danger de mort constant ? Quoi de mieux pour étouffer les critiques ?
Le pouvoir lançait donc cette arrestation que personne n’attendait. « Vague projet d’action violente » qui viserait des « policiers ou des militaires », des « activistes violents d’ultragauche préparaient un attentat », etc. De Darmanin, à Laurent Nunez, en passant par Eric Ciotti, la droite radicalisée applaudissait les arrestations du 8/12 en promouvant les équipes de police militarisées y ayant participé.
En illustration à ces fables anxiogènes, les médias mainstream diffusaient des images de « casseurs », alors même qu’aucun fait de manifestation n’était reproché aux inculpé·es. Et le PNAT (ou la DGSI) s’empressait de faire fuiter des éléments du dossier dans Le Point, avec les photos de trois des inculpé·es.
Lois liberticides et reconquête sécuritaire
L’affaire du 8 décembre 2020 prend place dans un contexte de criminalisation des luttes, d’usage de l’association de malfaiteurs comme outil de répression politique et de montée de l’extrême droite dans une ambiance préfasciste. Depuis 2015, et plus encore ces deux dernières années, les virages sécuritaires des gouvernements successifs ont été particulièrement inquiétants.
Plus la répression devient violente, plus la « violence » des opposant·es politiques est amplifiée et diabolisée, permettant de justifier les vagues répressives et lois sécuritaires suivantes. C’est un processus parfaitement observable qui, in fine, permet de justifier les futurs meurtres policiers. Les même mécanismes s’observent pour toutes les violences d’État (pénitentiaires, judiciaires, policières), dans ce que le théoricien du post-colonialisme Achille Mbembe appelle la nécropolitique.
Cela a commencé par la criminalisation des musulman·es et des étranger·ères, qui a conduit à la mise sous tutelle et à la répression tous azimuts de toute une communauté (avec des fermetures de mosquées et d’écoles, la dissolution du CCIF et de Baraka City, des milliers de perquisitions antiterroristes dans le vide, etc.), avant de s’étendre aujourd’hui à l’ensemble des mouvements de contestation sociale, organisations militantes et antifascistes.
On assiste en quelques mois à la dissolution de la GALE, du Bloc Lorrain, du Collectif Palestine Vaincra, Comité Action Palestine, les Soulèvements de la Terre ; et la tentative de dissolution de Nantes Révoltée et de la Defcol.
Les outils de répression administratifs (relevant de la sécurité intérieure, et donc directement du ministère) se déploient également sur des activistes. Des ITF et des placements en CRA, de la surveillance poussée, des assignations.
On observe aujourd’hui comment l’institution judiciaire (même dite « de droit commun ») s’est militarisée, fonctionnant aujourd’hui main dans la main avec l’intervention d’unité de polices antiterroristes pour écraser aveuglément des supposés émeutiers.
Retour sur les derniers outils législatifs mis en œuvre pour réprimer toute contestation de l’ordre établi.
Loi SILT (30 octobre 2017)
La loi renforçant la Sécurité Intérieure et la Lutte contre le Terrorisme (SILT) est votée dans le prolongement de l’État d’urgence décrété par Hollande au lendemain des attentats du Bataclan. Entrée en vigueur le 1er novembre 2017, elle a pour objet de faire entrer dans le droit commun un ensemble de mesures de police administrative, au nom de la « lutte contre le terrorisme ».
Les pouvoirs de l’État d’urgence deviennent permanents :
périmètres de protection dans l’espace public
fermetures administrative de lieux de culte
mesures individuelles de contrôle administratif et de surveillance dites « MICAS³ », facilitant les assignations à résidence et les interdictions de paraître et de déplacement.
les perquisitions administratives, dites « visites domiciliaires » (pas de mandat, police antiterroriste, saisies arbitraires, etc.)
Cette loi fait sauter un grand nombre de freins au pouvoir gouvernemental qui existaient pour justement protéger la population. Elle confère de façon durable au pouvoir administratif des prérogatives étendues et particulièrement liberticides, sans contrôle de l’autorité judiciaire. Un État policier.
Elle légalise la mise en œuvre de mesures de contrainte sans fondement autres que des présomptions policières, et permet le retour massif de l’usage des « notes blanches ». Une répression qui n’a plus besoin d’élément prouvant la participation effective à la commission d’une infraction pénale, ni de détailler les motifs invoqués.
La loi renforce également les pouvoirs des services de renseignement : banalisation de la surveillance de masse et nouveaux pouvoirs de contrôle aux frontières.
Loi du 30 juillet 2021
La loi « relative à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement » présentée par le gouvernement Castex pendant que les Français·es sont à la plage, prolonge à nouveau un ensemble de mesures sécuritaires temporaires prévues par la loi SILT.
Ni leur nécessité, ni leur efficacité et ni leur proportionnalité n’ont été démontrées. Mais l’entretien permanent de la « menace terroriste » dans les médias et les discours politiques fonctionne toujours.
Décrets Darmanin (4 décembre 2020)
Ces trois décrets du ministère de l’Intérieur visent à élargir les possibilités de fichage dans le cadre d’enquêtes menées par la police, la gendarmerie ou encore l’administration.
Initialement, les fichiers Prévention des Atteintes à la Sécurité Publique (PASP)et GIPASP visaient « les personnes susceptibles de prendre part à des activités terroristes ou d’être impliquées dans des actions de violences collectives ».
Cette définition déjà large permettait d’y intégrer, outre des individus présentant une « radicalisation du comportement », des personnes ayant pris part à « des manifestations illégales » ou à des « actes de violence ou de vandalisme lors de manifestations sportives ».
Suite à la parution de ces décrets, les catégories de données et les catégories de destinataires de ces fichiers sont considérablement élargies, puisqu’ils permettent désormais d’enregistrer des informations concernant des personnes morales ou des groupements, comme des associations, des collectifs militants ou des syndicats.
Ces décrets permettent également aux services de police et de renseignement de pouvoir recueillir « les opinions politiques, les convictions philosophiques, religieuses, l’appartenance syndicale, ainsi que des données de santé révélant une dangerosité particulière », ouvrant encore plus la voie à la purge politique en cours.
Ces décrets élargissent la surveillance aux atteintes « à la sûreté de l’État » et « à l’intégrité du territoire ou des institutions de la République ». Outre l’usage d’un terme totalement flou : « atteintes », ce n’est plus uniquement la prévention de crimes qui peut être la cible d’intrusions des services secrets, mais ce qui irait à l’encontre du respect des institutions.
On voit donc à l’œuvre unglissement sémantique qui permet au pouvoir administratif, donc à l’exécutif, d’élargir considérablement le champ d’application de ses mesures de fichage et de surveillance, dans le but de criminaliser et de neutraliser, toute opposition politique. En plus d’être une dérive autoritaire dangereuse, ces décrets permettent ainsi un redéploiement des services de renseignement sur des pans émergents de la contestation sociale.
Loi Sécurité Globale (avril 2021)
L’Assemblée Nationale examine précipitamment la proposition de la loi « Sécurité Globale » (LSG) dès novembre 2020. Déposée le 20 octobre 2020, elle passe de la Commission des Lois à un vote en première lecture en à peine un mois, alors que l’agenda parlementaire était déjà surchargé. Cette loi étend les possibilités d’une surveillance généralisée et indiscriminée de l’ensemble des personnes vivant en France.
Elle redéfinit aussi le maintien de l’ordre selon la conception militariste du « continuum de sécurité» : une manière d’englober tous les acteurs répressifs ou réactionnaires (de l’armée au voisins vigilants) dans une dynamique commune.
Ses principales dispositions prévoient :
Le transfert des compétences de police judiciaire à la police municipale (sous l’autorité du maire et pas de l’autorité judiciaire).
L’élargissement de la vidéosurveillance aux policiers municipaux, aux agents municipaux chargés d’un service de police, et à certains agents de la préfecture.
La transmission des images des caméras-piéton des policiers et gendarmes en flux continu vers le centre de commandement, avec usage potentiel de la reconnaissance faciale.
L’autorisation de la captation d’images par drones avec usage potentiel de la reconnaissance faciale.
L’article 24 sur l’interdiction de diffuser des images de policiers ou gendarmes en intervention. Article qui a suscité la plus grande levée de boucliers et a été retoquée par le Conseil Constitutionnel avant d’être rétabli partiellement dans la loi Séparatisme votée quelques semaines plus tard.
La suppression des réductions de peine pour les détenu·es condamné·es pour violence envers des personnes dépositaires de l’ordre public.
L’autorisation du port d’arme dans les lieux publics pour les personnes dépositaires de l’ordre public.
Un élargissement des pouvoirs des sociétés de surveillance et de sécurité privées.
De nombreuses manifestations ont eu lieu lors de l’examen de la loi, et de nombreuses condamnations de ce texte ont été émises, notamment par la CNCDH, le Conseil des droits de l’Homme de l’ONU, du Haut-Commissariat des Nations-Unies aux Droits de l’Homme, du Conseil de l’Europe, de la Défenseure des Droits, de la Commission Européenne, du Conseil des Barreaux, etc.
Seul l’article 24 sera supprimé. Il a d’ailleurs été réintroduit sous une forme légèrement modifiée par l’article 18 dans la loi Séparatisme quelques semaines plus tard.
Loi Séparatisme (août 2021)
Les grandes lignes de la loi Séparatisme confortant le respect des principes de la République ont commencé à être dévoilées début octobre 2020, à la même période que la LSG. Elle est présentée en Conseil des Ministres le 09 décembre 2020. Le gouvernement a engagé une procédure accélérée pour l’examen du texte à l’assemblée nationale.
C’est une loi raciste et islamophobe qui prévoit :
L’extension du fichage antiterroriste.
Le contrôle politique des associations via le contrat d’engagement républicain.
L’article 18 sur le délit de « mise en danger de la vie d’autrui par diffusion d’informations relatives à la vie privée, familiale ou professionnelle », instrumentalisant le meurtre de Samuel Paty pour permettre de criminaliser la diffusion d’images de violences policières et le CopWatching.
Le contrôle plus strict de l’instruction en famille, des écoles privées hors contrat et des fédérations sportives.
Le contrôle renforcé des lieux de culte.
L’extension du champ d’application du Fichier Judiciaire Automatisédes auteurs d’Infractions Terroristes(FIJAIT).
Depuis sa promulgation, ce texte à été utilisé d’abord pour dissoudre des organisations musulmanes, puis pour réprimer des organisations militant·es antifascistes, antiracistes et écologistes.
C’est notamment cette loi qui a justifié les dissolutions de la GALE, du Bloc Lorrain, du Collectif Palestine Vaincra, Comité Action Palestine, ainsi que la tentative de dissolution du media Nantes Révoltée.
ÉLÉMENTS DE CONTEXTE SUR LE ROJAVA
Pour comprendre l’opération antiterroriste du 8 décembre 2020, il faut remonter en janvier 2014 lorsque l’autonomie du Rojava est proclamée. Partie syrienne du kurdistan, le Rojava est un territoire revendiqué par le peuple apatride le plus grand du monde: les kurdes.
Le PYD (Parti de l’Union Démocratique) proche du PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan) prend le contrôle de la zone et annonce le 9 janvier 2014 l’instauration d’une administration autonome s’inspirant du socialisme libertaire et du confédéralisme démocratique. La constitution du Rojava est adoptée le 29 janvier 2014.
En 2015, la révolution du Rojava bénéficie d’une médiatisation sans pareille dans les pays occidentaux. De nombreuses tribunes internationales (signées par les personnalités de gauche les plus reconnues) appelaient à soutenir de tous leurs vœux cette utopie naissante. Une trentaine de français·es répondront à l’appel du Rojava pour « protéger la paix en participant à la guerre de légitime défense contre DAESH et l’armée turque », ce qui n’est pas du goût de l’État français qui entretient des liens étroits avec le dictateur turc Erdogan, notamment via l’OTAN.
L’importance du Rojava s’est très vite démontrée en France lorsque les attentats sont venus frapper Charlie en 2015. Les kurdes ont été en première ligne de la lutte contre DAESH, puisqu’ils étaient sur le terrain. La Coalition Internationale (et les médias occidentaux) les ont encensés pour leurs exploits.
Leur modèle démocratique rend caducs les tentatives autoritaires de DAESH. Leur modèle pluri-ethnique (kurdes, arabes, assyriens, etc.) déjoue les divisions et tentations identitaires violentes. Leur modèle écologiste basé sur la reforestation et l’autonomie alimentaire tend à réduire la précarité alimentaire et la dépendance au climat et aux marchés mondiaux. Leur héritage féministe et paritaire contrecarre les effets nauséabonds du patriarcat. En bref, étant aux premières loges du développement de DAESH, mais aussi d’autres régimes autoritaires et militaristes surfant sur l’islam (Iran, Turquie) leur modèle s’est construit en opposition radicale et ils se sont montrés d’une efficacité inégalée dans la lutte contre le terrorisme.
Malgré un contexte très très hostile (désertification planifiée par la Turquie, pauvreté, tremblements de terre, séquelles de la guerre, agressions armées constantes, terrorisme, etc.), ce modèle a représenté une source d’espoir et d’inspiration à des millions de communistes, socialistes, anarchistes, féministes et écologistes dans le monde entier.
LA CRIMINALISATION DES VOLONTAIRES INTERNATIONALISTES
C’est dans ce contexte que des centaines de personnes ont rejoint le Rojava, dont une trentaine de français·es. Certain·es, clairement d’extrême-droite, y sont allé·es pour « buter du musulman ». D’autres, anciens militaires notamment, se disaient apolitiques et uniquement intéressés par la lutte armée contre le terrorisme. Et enfin, des camarades de gauche y allaient également avec la fierté de participer une telle révolution sociale. Libre Flot fait partie d’elleux. Il a passé quelques mois là bas, et a eu une petite expérience sur le front : la libération de Raqqa.
Le Collectif des Combattant·es Francophones du Rojava (CCFR) explique:
« Notre camarade était en Syrie pour combattre Daech. Il a pris part en 2017 à la libération de Raqqa, la capitale du groupe jihadiste. Raqqa est aussi la ville où les attentats de Paris ont été planifiés et où la plupart de ses auteurs ont été entraînés. Si la France n’a pas connu d’attentats de grande ampleur depuis des années, c’est grâce à la libération de Raqqa à laquelle notre camarade a participé au péril de sa vie. En combattant en Syrie ce dernier a donc directement contribué à la sécurité des Français, ce que le tribunal médiatique s’est bien gardé de mentionner. Comment en effet faire rentrer dans leur narration à charge que l’accusé ait donné bien plus à la lutte contre le terrorisme que les policiers, procureurs et journalistes qui l’accusent aujourd’hui d’être un « terroriste d’ultragauche » ? »
« La DGSI a immédiatement établi un tri entre les « mauvais » volontaires, se réclamant d’une idéologie révolutionnaire, et les « bons » volontaires, anciens militaires ou apolitiques, qui pour certains ne furent même pas auditionnésà leur retour en France. Ceux qui étaient identifiés comme de potentiels membres de « l’ultragauche » se retrouvèrent systématiquement « fichés S » et firent l’objet d’une surveillance active, tout en étant coupables de rien d’autre que d’un délit d’opinion. Arrestations à l’aéroport, menaces sous forme de conseils paternalistes, pressions sur nos familles, nous sommes nombreux à avoir fait l’objet de tentatives d’intimidation plus ou moins voilées de la part des services de sécurité. »
On observe partout en Europe une politique répressive envers l’internationalisme pro-kurde. En décembre 2021, Maria, militante espagnole, a été expulsée d’Allemagne et interdite de séjour pendant 20 ans au motif qu’elle utiliserait « sa présence en Allemagne pour la seule raison de pouvoir participer à des activités politiques liées au mouvement internationale de libération kurde » ; et que ses compétences (en technologies de la communication et en langue kurde) lui permettrait de « construire un réseau et donc à servir de lien entre la gauche radicale en Allemagne et le mouvement de libération kurde » d’après un communiqué du collectif Solidarité avec Maria !
Le 14 avril 2023 à Sion (Suisse) s’est tenu le procès d’un militant internationaliste accusé « d’atteinte à la puissance défensive du pays » et de « service militaire à l’étranger » pour avoir rejoint le Rojava. Le réseau Secours Rouge témoignait :
« À plusieurs reprises dans son dossier, les services de renseignement de la confédération mentionnent son appartenance à l’extrême gaucheainsi que son engagement politique. La bourgeoisie souhaite ainsi intimider et contraindre au silence les militant·es révolutionnaires.»
En Angleterre, des camarades se sont vu retirer leur passeport et ont reçu des interdictions d’entrer dans l’espace Schengen. En Italie, plusieurs militant·es sont passé·es par de longues procédures judiciaires à cause de leur voyage dans la région.
En 2016, alors qu’André Hébert se préparait à retourner au Rojava, il s’est vu retirer arbitrairement son passeport et sa carte d’identité par la DGSI, au motif qu’il pourrait être à l’origine « de graves troubles à l’ordre public » et était susceptible d’utiliser son expérience militaire « dans des attaques contre les intérêts français, en lien avec l’ultragauche révolutionnaire ». Cette diffamation et ce harcèlement est soutenu par certains médias de gauche, comme Médiapart.
Encore une fois le CCFR témoigne :
« Ces accusations complètement fantaisistes furent balayées par le tribunal administratifde Paris quelques mois plus tard. Le ministère de l’Intérieur fut ensuite contraint de lui rendre ses documents d’identité et de lui verser des dommages et intérêts. En dépit de cette victoire judiciaire, nous savions que la DGSI nous garderait dans son collimateur et était prête à tout, y compris à des accusations sans preuves, pour nous faire rentrer dans le moule qu’elle avait créée : celui de dangereux vétérans d’ultragauche cherchant à importer la violence du conflit syrien de retour chez eux. »
RÉPRESSION DE LA DIASPORA KURDE
La France a une très longue histoire de répression envers ce peuple. La diaspora kurde a été la cible incessante des lois antiterroristes depuis, notamment la fondation du PKK en 1978. Dissolutions d’associations culturelles kurdes, coups de filets de 200 personnes finissant en relaxe générale, complicité avec les services secrets turcs dans l’assassinat de kurdes à Paris (2013 et 2022), etc.
En 2013, deux officiers du renseignement turc ont assassiné à Paris trois militantes kurdes : Sakine Cansiz, Fidan Dogan et Leyla Saylemez. En mars 2020 en Grèce, sous couvert de « lutte antiterroriste », le Comité de solidarité pour les prisonniers politiques en Turquie et au Kurdistan et le Front anti-impérialiste avaient été la cible d’un raid policier: entre 26 et 35 personnes furent arrêtées.
Le 23 mars 2021 en France, il y a eu le plus grand coup de filet dans les réseaux militants kurdes de ces 10 dernières années : 13 personnes ont été interpellées par la DGSI, leurs domiciles ont été violemment perquisitionnés, ainsi que le siège de l’association kurde à Marseille. Au final, c’est plus de 800 membres de la communauté kurde qui seront interrogées par la DGSI, du jamais vu. Ce sont au final 11 membres présumés du Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK) qui seront lourdement condamnés, vendredi 14 avril 2023.
D’après le communiqué de camarades internationalistes de Marseille, Macron et Erdogan s’étaient entretenus quelques jours auparavant, et une rencontre avait eu lieu entre les deux ministres des affaires étrangères à l’occasion du Conseil Européen sur la géopolitique internationale.
Cette répression est permise par un rapport de force géopolitique entre la Turquie et l’Union Européenne qui considère la principale organisation d’autodéfense du peuple kurde (le PKK) comme une organisation terroriste. Malgré une campagne internationale « Justice For Kurds », qui demandait que le PKK soit supprimé de la liste des organisations terroristes, la Cour de Justice de l’Union Européenne a déclaré que le peuple kurde ne pouvait pas se défendre à l’aide d’armes, une décision on ne peut plus insupportable pour un peuple qui est encore aujourd’hui en première ligne contre les islamistes et qui n’a d’autre choix que les armes pour survivre à la colonisation perpétuelle de son territoire ancestral.
Cette décision converge dans le sens également de l’adhésion de la Finlande et de la Suède à l’OTAN, qui ont accepté la déportation de réfugié·s politiques kurdes comme condition imposée par Erdogan.
LE RÉGIME FASCISTE EN TURQUIE
La Turquie fait partie de l’OTAN. Elle en est un partenaire puissant, privilégié et indispensable. La Turquie est un État animé par une idéologie génocidaire en lien avec l’islam. La Turquie apporte un soutien avéré aux islamistes, en organisant leur évasion des prisons kurdes par exemple, qui se font ensuite le relai de la répression contre les kurdes.
Son projet politique est de purifier son territoire sur des critères religieux et ethniques. Elle a procédé au génocide des arméniens et à de nombreux massacres de masses contre les kurdes et les yézidis. Le peuple kurde a été forcé de prendre les armes pour survivre.
Depuis, la législation antiterroriste turque a minutieusement étendu ses pouvoirs : d’abord contre les guérillas kurdes, puis contre le peuples kurde en général, et enfin contre tout parti d’opposition de gauche. Elle a effectué des purges politiques massives et arbitraires, jusqu’à interdire le principal parti de gauche du pays et d’emprisonner des milliers de ses membres (le HDP). La réponse de la gauche européenne a été très en deçà de ce qu’on aurait pu attendre.
Les exemples de terreur d’État en Turquie sont abondamment documentés mais trop nombreux pour être relatés ici. L’Occident est parfaitement complice dans le génocide kurde, principalement permis par l’instauration du Traité de Lausanne il y a 100 ans et la collaboration militaire au travers de l’OTAN.
POURQUOI ÇA VOUS CONCERNE AUSSI ?
« Plus les gouvernements seront discrédités, plus l’adhésion à la politique menée s’effondrera – et elle ne cesse de s’effriter d’année en année -, plus les gouvernements auront recours à l’état d’urgence et à la soi-disant « lutte contre le terrorisme » pour maintenir l’ordre et étouffer dans l’œuf des révoltes toujours plus logiques. »
Ce que tout révolutionnaire devrait savoir sur l’antiterrorisme – Les inculpé·es de Tarnac –
Avec l’affaire du 8 décembre 2020, un cap a été franchi dans la militarisation de la répression. Des personnes ont été emprisonnées pour leurs affiliations – supposées – à une idéologie dite « d’ultragauche » ou de mouvances internationales. L’absence d’une solidarité d’ampleur a laissé les mains libres à Darmanin pour continuer sur cette voie de l’assimilation des opposant·es politiques à du terrorisme. Les expérimentations liberticides se font toujours sur le dos de minorités ou de figures du coupable. La perfection des outils répressifs sur les un·es, permet toujours la répression des autres. La loi de 1936 sur la dissolution des ligues d’extrême droite en est l’exemple le plus clair aujourd’hui. Cette loi créée pour lutter contre le fascisme a été retournée en quelques années contre les mouvements décoloniaux. Autre exemple: le développement du fichage ADN a utilisé l’argument de la lutte contre la pédocriminalité pour l’élargir ensuite à l’ensemble des manifestant.es. Le même argument est aujourd’hui brandi pour surveiller les téléphones des citoyen·nes européen·nes.
En matière d’antiterrorisme, la séquence post-2015 a permis un recul des libertés fondamentales inouïe, d’une rapidité sans précédent. Les jurisprudences en matière d’ « association de malfaiteurs terroristes » ont été délirantes. Elles permettent tout et n’importe quoi et sont décriées depuis des années par les défenseur·euses de l’État de Droit. Inversement de la charge de la preuve (ce n’est plus à l’accusation de prouver ce qu’on vous reproche, mais à vous de prouver que c’est faux), répression préventive (arrêté·s avant d’avoir commis quoi que ce soit), présomption de culpabilité (vous êtes puni·es avant même d’avoir été jugé·es), etc.
Personne n’a intérêt, à gauche, à laisser ancrer dans le Droit et l’opinion publique que des militant·es partenaires des mouvements sociaux et des luttes écologistes sont des terroristes. Les opinions politiques des camarades inculpé·es sont criminalisées dans le but bien précis d’assimiler à une menace terroriste l’idée même de Révolution. Les inculpé·es de Tarnac analysaient déjà à leur époque que la définition légale du terrorisme étant très vague, elle permet d’y faire entrer ce qui constitue inévitablement… une révolution.
La stratégie sécuritaire tend à criminaliser le militantisme. Celleux qui transgressent les lois sont traités comme des criminels afin de dépolitiser leurs actes. C’est un phénomène récent, alors que les délits politiques étaient considérés comme tels il y a quelques décennies encore. L’antiterrorisme est l’étape supérieure à cette dynamique, elle fait rentrer l’activisme radical dans le panel des « menaces à la sécurité intérieure » qui tendrait au terrorisme si rien ne l’arrête.Cela permet le déploiement de moyens militaires contre de simples sabotages matériels (comme on vient de le voir avec les Soulèvements de la Terre, mais la SDAT avait déjà mené des opérations contre d’autres camarades : Ivan, Inculpé.es du 15 juin Limousin, etc.).
Le développement de la répression administrative (dont politique et expéditive) est très dangereux. On assiste à un usage sans précédent de mesures administratives : interdictions de territoire, assignations à résidence, OQTF, MICAS, etc. Des militants de pays voisins ont été jetés en CRA ces derniers mois. Ces mesures permettent de réprimer des activistes sur de simples « notes » du Ministère de l’Intérieur.
Il y a quelques années encore, réprimer des militants parce qu’ils auraient peut-être envisagé de s’organiser un jourpour mener des actions était de l’ordre de la dystopie. Même les actions violentes étaient traitées de manière moins virulente dans les médias il y a 40 ans. Baser des accusations sur les simples notes des services de renseignement est très grave. Ces services sont protégés par le Secret-Défense, ils peuvent allègrement mentir, ça a toujours fait partie des techniques utilisées par les services secrets. Que la Justice ne prenne aucun recul ni précaution envers des accusations secrètes ; alors que les inculpé·es dénoncent avec force et minutie les mensonges, manipulations et inventions pures de la DGSI ; est très inquiétant pour l’avenir des luttes sociales en France.
Une idée fausse existe au sein des milieux militants aujourd’hui, qui consiste à penser que les mesures d’exception telles que l’antiterrorisme ne viseraient que des personnes réellement dangereuses. Cette idée témoigne d’une incompréhension de la dynamique à l’œuvre : la militarisation de l’État. La mise au pas de la population est indispensable au bon fonctionnement d’un régime militaire. Dans ce régime, il n’y a pas de place à l’opposition (qu’elle soit politique ou religieuse). Le moindre grain de sable dans les rouages devient une menace.
Les cibles de la DGSI sont aussi des journalistes ou des syndicalistes. Des membres de la CGT EDF ont été arrêtés par la DGSI et traités en criminels. Dans le cadre d’un mouvement de grève ils ont été mis en examen pour cybercriminalité. La DGSI cible également des journalistes, lorsque des révélations sont faites sur des enjeux géopolitiques par exemple. En 2018, les révélations sur l’usage des armes vendues par la France dans le guerre au Yémen avait mené à des intimidations dénoncées par de nombreux journalistes commes des « atteintes à la liberté d’informer ».
Aujourd’hui, en brandissant la menace de complots imaginaires, procédé tristement connu, la France s’enfonce davantage dans le camp des régimes illibéraux.
Plus que jamais nous devons faire front, pour lutter contre la judiciarisation des idées politiques d’émancipation et la criminalisation de l’action politique.
Ils veulent nous terroriser, on se laissera pas antiterroriser !
Solidarité avec toutes les cibles de la répression !
CHRONOLOGIE DE L’AFFAIRE
ESPIONNAGE DE LIBRE FLOT PAR LA DGSI 2018 – 2020
Une surveillance a été mise en place contre notre ami Libre Flot dès son retour du Rojava, comme pour beaucoup de volontaires internationalistes. « Un camarade parti en vacances en Amérique du Sud se retrouvait accusé d’avoir essayé de nouer des contacts avec une guérilla colombienne, un autre fréquentant la ZAD aurait prétendument tiré une fusée éclairante sur un hélicoptère de la gendarmerie, des dégradations d’antennes téléphoniques, de bornes Vélib ou de fourgons de police nous étaient également associées. Ces fables anxiogènes, parfaitement déconnectées de toute réalité, venaient confirmer ce que nous savions déjà : jusqu’à ce qu’il ait trouvé le coupable idéal, le ministère de l’Intérieur ne renoncerait pas à l’entreprise de diabolisation dont nous faisions l’objet. »
Il y a de fortes raisons de penser que Libre Flot était déjà sous le coup de plusieurs techniques de renseignement : à minima la géolocalisation et sonorisation de son véhicule d’habitation.
ENQUÊTE PRÉLIMINAIRE 7 février – 20 avril 2020
Le 7 février 2020, la DGSI déballe sa mélasse d’accusations « secret défense » dans un « rapport de judiciarisation » qu’elle transmet au PNAT. Ce dernier, qui adore les notes blanches, saute à pied-joint dedans. Le jour même, Benjamin CHAMBRE (1er vice procureur) se saisit de l’affaire et requière auprès d’un JLD l’usage des moyens de surveillance les plus intrusifs. Ils seront accordés immédiatement par la JLD Anne-Clémence COSTA.
Des micros dans un camion habité, des interceptions téléphoniques, géolocalisations en temps réel, IMSI catching, filatures, etc.
Ces deux mois permettent à la DGSI d’obtenir suffisamment d’éléments pour qu’une information judiciaire soit ouverte.
INFORMATION JUDICIAIRE avril – décembre 2020
Il se passe pas grand-chose, des techniques sont mises en œuvre mais les inculpé·es font leur vie chacun·e de leur côté.
ARRESTATIONS & INCARCÉRATION 8 décembre 2020 – 7 avril 2022
8 décembre 2020
À 6h du matin, différentes unités d’élite sous la houlette de la DGSI (GAO, RAID) interpellent simultanément neuf personnes aux quatre coins de la France : Toulouse, Rennes, Vitry-sur-Seine, Cubjac (Dordogne), Plestin-les-grèves (Finistère). Les portes sont enfoncées, des dizaines de robocops sur-armés et cagoulés s’engouffrent dans chaque domicile. Les démineurs et la brigade canine sont aussi présents.
Des perquisitions ont lieu toute la journée, jusqu’à 12 heures d’affilée pour certaine.s inculpé.es. Humiliations, violences, les perquisitions s’étendent aux familles des personnes arrêtées.
Les neuf personnes interpellées sont emmenées dans les cellules de la DGSI à Levallois-Perret de différentes manières : entravé·es dans une camisole et cagoule sur la tête, embarqué.es en voiture pour certain.es ; menottée et masque de ski opaque sur les yeux, transportée en train pour l’une ; menottés avec trajet en avion pour d’autres. Tous les moyens sont déployés dans cette opération d’envergure.
S’en suivent alors 4 jours de garde à vue avec de nombreuses auditions. Menaces, insinuations, manipulations, privation de sommeil, de nourriture, transformation et omission dans les procès-verbaux des déclarations des auditionné·es de tout ce qui décrédibilisait le scénario de la DGSI. Des mensonges sont proférés en « off » pour certain·es, afin d’influencer leurs réponses et donner matière à l’accusation.
Deux personnes sont libéré·es sans charge à l’issue de la garde à vue, les sept autres sont inculpé·es et déferré·es devant un juge d’instruction antiterroriste, Jean-Marc Herbaut.
Le contrôle judiciaire est prononcé pour deux d’entre elleux et les cinq autres sont incarcéré·es le 11 décembre 2020 dans cinq prisons différentes d’Île-de-France, sous le statut DPS (détenu·e particulièrement signalé). L’un d’entre-elleux est placé en isolement total.
8 février 2021
Nouvelles interpellations à 6h du matin chez deux personnes à Ustaritz (Euskal Herri) et Festalemps (Dordogne) par le RAID, sur ordre de la DGSI. Pour l’une d’entre-elles, la porte de son studio est pulvérisée. Elle est braquée par des flingues, menottée dans son lit puis emmenée pour 3 jours de GAV. A l’issue de leur garde à vue, elles seront toutes deux libérées sans charges retenues contre elles.
Mars 2021
Le placement à l’isolement de Libre Flot est reconduit pour 3 mois.
Le juge d’instruction, Jean-Marc Herbaut, ordonne une dérogation qui donne à la DGSI carte blanche pour auditionner tout l’entourage des inculpé.es (famille, amie.s, collègues…). Cette dérogation ne prendra fin qu’en novembre 2022, au moment de la clôture de l’instruction.
23 avril 2021
Après un nouveau passage devant le juge d’instruction, la demande de mise en liberté (DML) est acceptée pour deux inculpé·es, alors emprisonné.es à la maison d’arrêt des femmes de Fleury-Mérogis et à la maison d’arrêt d’Osny.
Iels sont libéré.es sous contrôle judiciaire strict. Iels auront passés plus de 4 mois derrière les barreaux, sous le statut DPS, avec une période d’isolement total (pas de contact avec d’autres détenues) pendant plusieurs semaines pour l’une d’entre elleux.
Les demandes de liberté des autres inculpés toujours incarcérés sont refusées. L’appel auprès de la cour d’appel de Paris est refusé éga lement. Ils sont encore trois en prison.
Juin 2021
Le placement à l’isolement de Libre Flot est reconduit pour 3 mois, malgré les séquelles psychiques et physiques qui ne font que s’accentuer.
Septembre 2021
Le placement à l’isolement de Libre Flot est de nouveau reconduit pour 3 mois.
Une nouvelle arrestation a lieu, une personne est interpellée à son arrivée sur le territoire français après plusieurs mois passés à l’étranger. Bien qu’elle ai attesté plusieurs fois sa volonté d’être auditionnée auprès de la DGSI et du juge d’instruction, elle sera arrêtée à l’aéroport dès son arrivée et passera 2 jours en garde à vue à la DGSI, puis sera relâchée sans charges.
15 octobre 2021
La DML d’un inculpé encore derrière les barreaux est acceptée. Il est libéré sous contrôle judiciaire strict (obligation de travailler, limité
à un seul département pour se déplacer, pointage deux fois par semaine au commissariat). Plus que deux au trou !
Décembre 2021
Eric Dupont-Moretti, ministre de la Justice, reconduit la mise à l’isolement du dernier inculpé (Libre Flot) derrière les barreaux. Après 12 mois d’isolement, il revient au ministre de la Justice de prendre la décision de reconduction. La situation de Libre Flot est de plus en plus critique.
Retour du dossier des nullités déposé par les avocat.es quelques mois plus tôt. Toutes les nullités (reposant sur la non-proportionnalité dans l’emploi des techniques de surveillance, sur des erreurs de procès verbaux et autres magouilles) sont catégoriquement refusées.
27 octobre 2021
Le parquet national anti-terroriste (PNAT) a fait appel de la décision du juge pour la libération de l’inculpé sorti de prison 5 jours plus tôt. Rendez-vous est fixé au 27 octobre 2021, devant la Cour d’Appel de Paris, pour savoir si la libération est maintenue ou si il devra retourner en taule. La Cour d’Appel confirme la décision du juge des libertés, il reste « libre » !
05 novembre 2021
L’inculpé emprisonné à Fleury-Mérogis est libéré sous contrôle judiciaire strict (pointage une fois par semaine, rdv SPIP et psy obligatoires une fois par mois, limite de déplacements à trois départements de la région parisienne). Le PNAT ne fait pas appel, ce coup-ci…
27 février 2022
La DML de Libre Flot est refusée, malgré un dossier de faisabilité de bracelet électronique validé par les SPIP (services pénitentiaires d’insertion et de probation) dans deux départements différents.
Il entame une grève de la faim et explique ses revendications qu’il publie dans un texte. Il envoie quotidiennement des demandes de remises en liberté.
Mars 2022
Dupont-Moretti reconduit l‘isolement alors que Libre Flot est en grève de la faim.
24 mars 2022
Après 25 jours de grève de la faim, Libre Flot est hospitalisé et transféré à l’hôpital pénitentiaire de Fresnes. Il attendait cette hospitalisation médicale pour avoir accès directement à des médecins et aux soins nécessaires.
Ses avocats apprendront quelques jours plus tard que la levée de son régime d’isolement s’est faite le jour du transfert à l’hôpital. Néanmoins malgré la levée de son isolement il n’a pas le droit d’aller à la promenade car il est trop faible. Il obtient également le droit de communiquer avec l’une de ses coaccusé·es.
Cela ne met pas fin à sa grève de la faim puisque son unique revendication est bel et bien la fin de son incarcération. Son état de santé devient critique : il a perdu 16 kilos et est désormais sous perfusion.
04 avril 2022
Une journée internationale de soutien à Libre Flot est organisée : de nombreux rassemblements ont lieu en France (Lille, Albi, Paris, Toulouse, Limoges, Strasbourg, Rennes et d’autres villes encore), mais aussi dans de nombreux pays d’Europe (Grèce, Suisse, Allemagne, Angleterre, Ukraine, Portugal, Danemark, Finlande…) et au Rojava.
Il décide ce même jour à 18h de stopper sa grève de la faim.
07 avril 2022
C’est avec un grand soulagement que les proches et soutiens apprennent le transfert de Libre Flot dans un hôpital civil de la région parisienne, car il risquait sa vie à tout instant.
Ses médecins s’inquiétant de ne pouvoir assurer son suivi médical ont demandé son transfert dans un autre hôpital. Pour cela il fallait négocier avec la justice pour lui permettre de quitter les services pénitentiaires. Le juge d’instruction accepte après négociation avec les avocat.es sa libération pour raison médicale.
Il est libéré sous bracelet électronique avec une période de réadaptation dans un hôpital spécialisé dans la nutrition.
CLÔTURE INSTRUCTION août – novembre 2022
26 août 2022
Jean Marc Herbaut, juge d’instruction, met fin à l’information judiciaire du dossier 8 décembre 2020. Cela met fin à la commission rogatoire qui permettait à la DGSI d’user « de tous les moyens à leur disposition » pour harceler les inculpé·es et leurs proches.
Cela signifie aussi que le dossier se clôt, laissant un délai de 3 mois aux inculpé·es et à leur Défense d’apporter les derniers éléments (demande d’actes, etc.). Passé ce délai, ce sera au PNAT de faire ses réquisitions.
28 septembre 2022
Le juge accepte le retrait du bracelet électronique pour Libre Flot. Il reste néanmoins en contrôle judiciaire strict, comme les autres inculpé.es (obligation de travail, limité dans ses déplacements à un département, pointage une fois par semaine).
Novembre 2022
De nombreux allègements de CJ ont été faits, surtout en ce qui concerne l’élargissement des zones de déplacement. Une nouvelle demande de communiquer entre deux inculpés a été accepté.
Le PNAT requiert le tribunal correctionnel et non les assisses pour le procès.
PRÉPARATION DU PROCÈS jusqu’à octobre 2023
04 avril 2023
Pendant son incarcération, Libre Flot a fait de nombreux recours contre son isolement carcéral. L’audience devant le tribunal administratif de Versailles se déroule le 4 avril. L’isolement est reconnu illégal et l’État condamné à 3000€ de dommages et intérêts.
En espérant que cela fasse jurisprudence, bien qu’on doute de l’impact réel sur l’administration pénitentiaire quand on voit la volonté à faire traîner ce genre de procédure.
04 juillet 2023
Audience de fixation. C’est la première fois depuis presque trois ans que les inculpé·es se voient. C’est aussi la première fois qu’iels rencontrent le PNAT et la Juge qui présidera le procès. Iels demandent que l’interdiction de communiquer soit levée et que les CJ soient élargis. Tout est refusé en bloc par la Juge.
Le “Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale” promet un nouveau tour de vis, doublement des franchises médicales, participation forfaitaire d’un euro sur les consultations, quatrième jour de carence sur les arrêts de maladie, transfert des dépenses vers les complémentaires santé dont les prix vont encore exploser.une mobilisation populaire s’impose.
Un appel est lancé pour développer des mobilisations autour de la santé, du social, du médico-social et de la Sécurité Sociale, et à les faire converger pour arracher enfin un budget à la hauteur des besoins des usager·ères et des personnels.
Dans ce contexte, se tenait le lundi 11 septembre 2023 à la bourse du travail de Paris, la soirée de lancement du tour de France pour la santé. Dans l’émission de ce jour, nous proposons l’écoute de plusieurs interventions qui ont rythmé cette soirée.
Nous entendrons les interventions de : Rosine Leverrier, secrétaire de la coordination nationale des comités de défense des hôpitaux et maternités de proximité,
Céline Le Negaret Sage-femme à la maternité des Lilas, menacée une nouvelle fois de fermeture et sur la situation des maternités et du droit à l’avortement en Seine-Saint-Denis.
Olivier Milleron cardiologue à l’hôpital Bichat sur les fermetures de lits hospitaliers et la lutte engagée autour du projet de l’hôpital grand paris nord.
Christophe Prudhomme, médecin urgentiste en Seine-Saint-Denis sur la situation des Urgences.
Nicolas Da Silva auteur du livre “La bataille de la Sécu” sur le rôle des complémentaires santé.
Dans l’émission de ce jour, nous entendrons la présentation du livre de Nedjib Sidi Moussa « Histoire algérienne de la France » cette présentation se tenait dans le cadre des Rencontres libertaires du Quercy se tenait du 18 au 23 juillet 2023
Docteur en science politique et enseignant, Nedjib Sidi Moussa est l’auteur de plusieurs ouvrages dont Algérie, une autre histoire de l’indépendance (PUF, 2019) et la Fabrique du Musulman (Libertalia, 2017). Nous menons avec lui une longue discussion en trois parties à l’occasion de la parution de son nouveau livre, « Histoire algérienne de la France », aux Presses universitaires de France.
Reporters : La guerre civile algérienne, nommée pudiquement « La décennie noire », a divisé et les Algériens et aussi les Français. Vous expliquez dans le chapitre V de votre livre que le débat en France autour de ce sujet fut pratiquement impossible, particulièrement à cause du clivage entre les partisans des « réconciliateurs » et des « éradicateurs ». Pouvez-vous revenir sur l’identité politique de ces deux groupes ? Nedjib Sidi Moussa : Les « réconciliateurs » ont soutenu le contrat de Rome en 1995, comme le FFS, le PT et des partis islamistes, tandis que les « éradicateurs » l’ont rejeté, comme le RCD, Ettahadi ou l’ANR. Cet antagonisme, qui ne se réduit pas au clivage droite-gauche, mobilise des registres distincts, car il s’agit pour les premiers de faire respecter une certaine conception de la démocratie et, pour les seconds, de défendre une certaine idée de la république, en s’affrontant sur la façon d’appréhender l’islamisme. En raison des prolongements de la guerre civile algérienne sur le territoire français (attentats, réfugiés, etc.) mais aussi des liens de solidarité entre courants politiques des deux rives, cette polarisation se répercute dans le champ politico-médiatique hexagonal. Ainsi, cette séquence est incontournable pour comprendre la virulence des controverses françaises sur la question musulmane, dans la mesure où l’opposition entre « réconciliateurs » et « éradicateurs » se redéploie sur fond de « guerre contre la terreur » ou d’affaires du voile.
La fascination de certains intellectuels français pour les islamistes les a empêchés de voir en eux des hommes d’extrême droite musulmane. Un certain François Burgat parlait même d’une volonté d’achever la lutte de décolonisation dont les islamistes seraient les nouveaux hérauts. Comment expliquez-vous, d’un côté, cette fascination pour des intégristes musulmans et, de l’autre, la stigmatisation, voire l’incrimination, des dits éradicateurs, souvent qualifiés de « laïques » et jugés très peu « authentiques » sur le plan identitaire et religieux ? Nous avons là affaire à plusieurs phénomènes. Il y a d’abord quelque chose qui relève de ce que Maxime Rodinson a appelé la « fascination de l’islam » et qui nous avertissait, en 1980, « contre les soumissions des orientalistes aux idéologies dominantes de la société bourgeoise libérale, le remède n’est pas, si tentant qu’il soit, le recours aveugle aux idéologies qui les contestent. » Ce propos rejoint celui de Sadek Jalal Al-Azm qui a critiqué, en 1981, «l’ orientalisme à rebours » dans la revue Khamsin. Plus fondamentalement, les affrontements du champ politico-médiatique français au cours de la guerre civile algérienne ont illustré ce que Pierre Bourdieu désignait en 1979 à travers la loi des « cécités croisées » dans La Distinction. Enfin, le malaise des intellectuels ou militants de la gauche française repose sur une forme d’occidentalocentrisme car ils n’ont pas pris au sérieux leurs homologues issus du monde arabo-musulman qui, sans s’aligner sur les régimes autoritaires, ont caractérisé l’islamisme comme relevant de l’extrême droite, voire du « fascisme », même si le terme fait débat.
L’essor de la marche pour l’égalité en 1983 est suivi par des réactions racistes et xénophobes agitant les peurs autour d’une imminente « invasion migratoire » et la prétendue métamorphose inéluctable de la France en République « multiraciale ». Ces expressions du venin d’extrême droite, en quoi sont-elles liées à la centralité refoulée de la question algérienne en France ? Pourquoi le signifiant « Algérie » est toujours synonyme d’immigration, d’islam, de terrorisme, de guerre civile, etc. ? La marche pour l’égalité et contre le racisme, partie de Marseille le 15 octobre 1983, s’inscrit dans un contexte de violences, voire de crimes racistes qui ciblent tout particulièrement de jeunes hommes originaires d’Algérie et issus de familles ouvrières. D’ailleurs, un drame survient au cours de la marche et émeut l’opinion publique française, il s’agit du meurtre du jeune Habib Grimzi, défenestré le 14 novembre par des candidats à la Légion étrangère. L’hostilité provoquée par la visibilité des enfants de travailleurs immigrés renvoie au rejet d’une « France algérienne » par les partisans de l’« Algérie française ». En effet, pour l’extrême droite, la question de l’immigration est indissociable de la question algérienne. C’est explicite dans les déclarations des dirigeants du Front national comme Jean-Marie Le Pen mais cela se retrouve également dans Le Camp des saints, un roman de Jean Raspail paru en 1973 – ponctué de références à l’Algérie – et imaginant la « submersion migratoire » de la France, bien avant le triste succès de la théorie du « grand remplacement » de Renaud Camus.
A votre avis, la marche pour l’égalité permet-elle d’interroger la place des enfants de l’immigration algérienne en France et, par extension, la question des binationaux ? De quelle façon la France pourrait-elle accepter sa part algérienne ? Si, pour l’extrême droite, la visibilité des descendants d’ouvriers algériens apparaît comme étant problématique, il n’en est pas de même du point de vue de la gauche radicale, héritière de la lutte pour l’indépendance et engagée dans le combat contre le racisme ciblant les immigrés. La marche de 1983 est perçue favorablement par la gauche extraparlementaire car elle apporte un vent d’espoir dans une conjoncture marquée par la percée électorale du Front national lors des élections municipales, mais aussi par le « tournant de la rigueur » amorcé par le président socialiste François Mitterrand.
À l’heure des débats sur le « droit à la différence », mais aussi de la remise en cause du tiers-mondisme, cette nouvelle génération d’enfants d’immigrés interroge, d’une part, l’exclusivisme de nationalismes antagonistes qui prennent en tenaille cette population – notamment au regard du droit à la nationalité ou du service militaire – et d’autre part, tout en ayant l’Algérie au cœur, n’envisage son avenir qu’en France.
Le quatrième chapitre de votre livre est consacré à Klaus Barbie : qui était-il, ce client de Jacques Vergès ? Klaus Barbie est né à Godesberg en 1913. Il adhère aux Jeunesses hitlériennes à 20 ans, rejoint les SS en 1935 et devient membre du parti nazi deux ans plus tard. Durant la Seconde Guerre mondiale, il se distingue par son rôle dans la persécution des Juifs et la traque des opposants au nazisme. En 1942, il est nommé à la tête de la section IV de la Gestapo pour la région de Lyon. L’année suivante, il est responsable de l’arrestation du résistant français Jean Moulin qu’il torture en personne. Le « boucher de Lyon » poursuit sa sale besogne jusqu’à la fin du conflit en ordonnant, entre autres, la rafle de 44 enfants juifs réfugiés à Izieu. Dans le contexte de la guerre froide, ce criminel de guerre parvient à échapper à la justice en étant recruté par le contre-espionnage de l’armée américaine pour laquelle il met à disposition son expérience et fait valoir son anticommunisme. Il se réfugie en 1951 en Bolivie où il conseille les dictatures d’Amérique latine jusqu’à son extradition en France en 1983.
En défendant Klaus Barbie, Jacques Vergès a-t-il nié les principes de son anticolonialisme au nom d’une certaine surenchère qui, au nom de l’antisionisme, est allé jusqu’à l’adoption de thèses négationnistes – je pense notamment à Robert Faurisson et Roger Garaudy ? Il faut distinguer plusieurs niveaux pour comprendre ce qui se joue dans la défense de Klaus Barbie par Jacques Vergès, connu du public algérien pour sa défense de militants du FLN – dont Djamila Bouhired qu’il épouse –, en usant de la « stratégie de la rupture » qui n’a jamais fait l’unanimité chez les anticolonialistes. Cependant, il ne faut pas oublier qu’il a été le défenseur des islamistes durant la guerre civile. Il l’a expliqué dans sa « Lettre ouverte à des amis algériens devenus tortionnaires », parue en 1993, qui a suscité une réponse de Jean-Louis Hurst alias Maurienne – auteur du « Déserteur » en 1960 –, publiée dans « Courant alternatif » en 1994. De plus, « l’avocat de la terreur » était lié à François Genoud, milliardaire suisse nazi qui a géré à Genève les fonds du FLN pendant la révolution anticoloniale et qui a créé à l’indépendance la Banque arabe suisse d’Alger.
La plaidoirie de Jacques Vergès a été particulièrement perverse et traduisait la dérive la plus grave d’un certain anti-impérialisme perméable aux thèses négationnistes, en jouant sur un ressort aussi malsain que puissant, celui de la dénonciation du « deux poids, deux mesures ».
Quelle était la réception dans la presse algérienne du procès de Klaus Barbie ? A-t-elle accordé un soutien inconditionnel à Jacques Vergès ? Dans un contexte d’absence de liberté de la presse – nous sommes à l’époque du parti unique –, on assiste tout de même au naufrage d’une corporation, voire d’une génération, puisque les intellectuels et journalistes algériens qui s’expriment dans les médias autorisés expriment leur soutien à la rhétorique développée par Jacques Vergès et versent même, pour certains, dans l’antisémitisme le plus répugnant. Néanmoins, il faut souligner la déclaration courageuse de Hocine Aït Ahmed et Mohammed Harbi qui, dans la revue « Sou’al » publiée à Paris, ont sauvé l’honneur de la conscience algérienne en rappelant qu’en tant qu’anciens colonisés, leur place n’était pas du côté du bourreau nazi Klaus Barbie, mais de ses victimes juives, en invoquant un principe universel, celui des droits humains.
Propos recueillis par Faris LOUNIS, journaliste indépendant
Le 20 juillet 2023 dernier avait lieu une projection-débat autour du film “Du QR code dans les Calanques” (au café associatif La Trockette). Sa réalisatrice, NG, avec le concours d’un autre membre du blog d’Art debout, se proposait ainsi avec le documentaire de mettre en discussion l’utilisation de la technologie du QR code. Mais plus globalement, d’interroger la gouvernance et fréquentation des espaces naturels, leur privatisation, soulevant au passage les contradictions existant entre la finalité affichée et la réalité. Le documentaire que vous pourrez entendre en première partie d’émission (légèrement édité pour s’adapter à un format audio), s’inscrit en outre à la suite d’un travail réalisé par un collectif marseillais, nommé Le Platane, et qui a étudié tant les tenants et aboutissants de l’instauration du QR code, que la gestion du Parc National des Calanques.
La seconde partie d’émission quant à elle, donnera à entendre des morceaux choisis des discussions qui ont suivi la projection. Bonne écoute !
Résumé d’introduction au documentaire Du QR code dans les calanques :
Après 9 mois d’enquête et de réalisation de la vidéo dont je ne montre que le début ici (5mn) je dois dire que le Parc national des Calanques m’écœure ! Je vomis sa politique de gestion et d’exploitation de ‘la nature’ – de labellisation des Posidonies à des fins d’intégrer le marché des points carbone avec des partenaires comme Interxion qui construit des Data Center, Schneider electric France ou le groupe Atos leader de la Cyber surveillance Numérique. Placarder leurs pancartes partout dans la forêt : ‘Réserver c’est Préserver’ quelle Arnaque ! Les ravages écologiques du numérique sont très bien identifiés ! Traçabilité et Numérisation de tout – Privatisation et Police : des agents privés contrôlent vos QR codes: 200.000 € ont été dépensés pour le seul été 2022 ! Culpabilisation omniprésente : ‘Vous êtes trop nombreux et nombreuses’ ‘Vous érodez la Calanque …’ Alors que le parc a permis récemment la construction de Kedge École privée de commerce qui a doublé le campus de Luminy et a dit OUI aux ‘Boues Rouges’ en 2014 ! Je souhaite en conséquence m’éloigner du numérique et regarder cette vidéo avec quelques personnes ‘en live’ pour en parler et penser ensemble.
En appel à la mobilisation contre les violences policières, le racisme systématique et les libertés publiques qui se déroulera le samedi 23 septembre 2023 au départ de gare du nord a 14h, nous décidons aujourd’hui de vous diffuser une partie des prises de paroles que nous avons enregistré lors de la soirée du 13 septembre 2023, à la Flèche d’or, organisé par le comité Vérité et justice pour Safyatou, Salif et Ilan.
Dans la nuit du 13 avril, le scooter de ces enfants du 20ème arrondissement de Paris a été percuté volontairement par une voiture de police, provoquant leur chute. Dès le départ, les policiers ont menti et tenté de camoufler cet acte délibéré en accident de la route, contredit pourtant par plusieurs témoins qu’ils ont essayés de faire taire par la menace et l’intimidation. Après révélation des faits et publication des témoignages dans la presse, le conducteur du véhicule a été mis en examen pour « violences avec arme par personne dépositaire de l’autorité publique » et « faux en écriture publique » par un juge d’instruction. Il a alors été placé sous contrôle judiciaire avec l’interdiction d’exercer son métier, ainsi que d’entrer en contact avec les victimes et les témoins. Mais quid des trois autres membres de l’équipage ? L’acte criminel des policiers a des conséquences gravissimes sur les enfants, sur leur santé physique et morale, leurs possibilité d’étudier, de faire du sport, etc. Un comité de soutien s’est organisé pour aider Safyatou, Salif et Ilan, leurs familles et leur entourage à obtenir vérité et justice. Cela passe par une solidarité active au quotidien et aussi par une cagnotte afin de faire face à des dépenses (frais avocats et justice, dépenses santé, psychologues…). Mais aussi, pour mener des campagnes de communication pour obtenir vérité et justice.
Le 27 juin 2023, Nahel 17 ans, est tué par la police au cours d’un contrôle routier. Le soir même, les quartiers populaires de plusieurs villes de France se soulèvent. Plus de 40 000 membres des forces de l’ordre sont déployés, dont des unités d’élite (BRI, RAID, GIGN). Le rouleau compresseur de la justice de classe s’abat contre la jeunesse des quartiers populaire.
Dans cette émission, nous allons revenir sur ses questions. En fin d’émission, nous serons avec Jamel, habitant de longue date de Nanterre, qui a suivi les comparutions immédiates suite aux révoltes après la mort de Nahel.
En seconde partie d’émission, nous entendrons l’entretien réalisé avec deux membres du blog la Sellette et qui ont suivi des audiences de comparution immédiates.
Et nous débutons avec la conférence de presse, donné le mardi 5 septembre 2023 par le collectif justice pour adama, suite au non-lieu prononcé pour les trois gendarmes impliqués dans l’interpellation mortelle d’Adama Traoré en juillet 2016
Marche unitaire contre les violences policières, le racisme systémique et pour les libertés publiques aura lieu le samedi 23 septembre 2023 à Paris 14 h 30 départ Gare du Nord Place Napoléon III
Pour réprimer les mouvements sociaux, le gouvernement dispose d’un outil judiciaire particulièrement efficace : la comparution immédiate (CI). Cette procédure rapide permet aux procureur⋅es de faire juger une personne tout de suite après sa garde à vue. D’abord prévue pour être utilisée exceptionnellement parce qu’elle porte gravement atteinte aux droits de la défense, elle se généralise à la fin du XXe siècle (sur cette généralisation, lire notre histoire des comparutions immédiates, partie 1 et partie 2). La justice y recourt habituellement pour les prévenu⋅es qu’elle juge inquiétants, celles et ceux qui ont un casier judiciaire, ou bien qui, selon elle, risquent de partir en cavale faute d’être retenu⋅es par un travail, une famille ou un logement fixe (c’est-à-dire faute de « garanties de représentation », selon l’expression de l’institution). Mais dans les contextes de mouvements sociaux, la CI peut être utilisée bien plus largement. À cet égard, la répression judiciaire des soulèvements de 2005 constitue un précédent important.
Le 27 octobre 2005, Zyed Benna et Bouna Traoré trouvent la mort à Clichy-sous-Bois en voulant échapper à la police. C’est le début d’un véritable soulèvement des quartiers populaires en France. S’ensuivent vingt-deux jours de révolte, qui font l’objet d’une surenchère politique et médiatique célébrant la réactivité de l’appareil répressif. Le ministre de la Justice Pascal Clément communique tous les jours sur le traitement judiciaire des émeutiers. Le 9 novembre, en visite au tribunal d’Évry, il demande aux magistrat⋅es de recourir à la comparution immédiate, mais surtout d’avoir une « politique de communication dynamique » :« Je souhaite que les décisions les plus emblématiques, soit parce qu’elles sont sévères, soit parce qu’elles concernent des faits qui ont marqué nos concitoyens, soient systématiquement portées à la connaissance des médias et des élus. »
Le 14 novembre, il se vante dans une conférence de presse : 622 personnes ont été jugées en comparution immédiate ou le seront prochainement. En quinze jours, le tribunal de Bobigny en juge 115 à lui seul. Contrairement à ce qui est assené par le gouvernement depuis le début du mouvement, la plupart des prévenu.es n’ont aucun antécédent judiciaire, ils disposent d’un logement, parfois d’un travail, ils ont une famille — autant d’éléments censés normalement leur épargner la comparution immédiate, et à plus forte raison l’incarcération. Pourtant, le 23 novembre, sur l’ensemble du territoire, 422 personnes ont été condamnées à des peines de prison ferme, généralement entre six mois et un an.
En novembre 2005, la procédure de comparution immédiate démontre ainsi sa capacité à réprimer massivement, en temps réel, un mouvement social, tout en permettant au gouvernement de communiquer sur sa fermeté. Et une fois cette capacité bien établie, il s’agira par la suite de la mettre en œuvre dans de nouveaux contextes : luttes contre le « contrat première embauche » (CPE) dès l’année suivante, contre la « loi travail » en 2016, mouvement d’occupation des places Nuit debout la même année, à chaque mouvement social, le ministre transmet des consignes aux procureur⋅es, qui sont ses subordonné⋅es. Par le biais de circulaires, il leur demande d’utiliser la comparution immédiate pour une répression ferme. Le traitement judiciaire du mouvement des « gilets jaunes », entre novembre 2018 et fin 2019, en est un exemple marquant. Selon le bilan de la chancellerie, 3 100 « gilets jaunes » ont été condamné⋅es, dont un millier à des peines de quelques mois à trois ans de prison ferme. La procédure de comparution immédiate y a pris une bonne part.
En 2023, deux importants mouvements sociaux ont agité le pays : la lutte contre la réforme des retraites et les soulèvements des quartiers populaires après la mort de Nahel Merzouk. Si, dans les deux cas, la procédure de comparution immédiate a été mobilisée, le nombre de personnes à y avoir été envoyées et le taux d’incarcération sont très différents.
Le 16 mars, après deux mois d’importantes mobilisations contre le report de l’âge légal de départ à la retraite, le gouvernement décide de le faire passer en force en activant l’article 49.3 de la Constitution. Deux jours plus tard, le ministre de la Justice adresse une dépêche à ses procureur⋅es, les appelant à la fermeté. En un mois, plus d’une centaine de manifestant⋅es sont poursuivi⋅es devant les chambres de comparution immédiate. Si le recours à cette procédure expéditive est en soi une violence judiciaire, la plupart de ces manifestant⋅es échappent à l’incarcération. Certain⋅es magistrat⋅es ont tenu à s’en expliquer : à Toulouse par exemple, après le procès de cinq manifestant⋅es, la présidente a justifié les peines avec sursis par « le très bon profil » des prévenu⋅es : logement, insertion professionnelle ou études… (Lire Les manifestant⋅es contre la réforme des retraites en comparution immédiate, sur LaSellette.org.)
Le 27 juin 2023, Nahel Merzouk, 17 ans, est tué par la police au cours d’un contrôle routier. Le soir même, les quartiers populaires de plusieurs villes de France se soulèvent. Plus de 40 000 membres des forces de l’ordre sont déployés, dont des unités d’élite (BRI, RAID, GIGN).
Trois jours plus tard, Éric Dupond-Moretti, ministre de la Justice, diffuse une circulaire aux services du parquet demandant classiquement une réponse pénale rapide, ferme et systématique à l’encontre des révolté.es. Comme en 2005, il demande aux procureur⋅es de communiquer sur la répression : « Il est en effet important que soit connue la réponse de la Justice à des faits que nos concitoyens considèrent comme des atteintes graves à leur sécurité et qui leur causent parfois des dommages très lourds dans leur cadre de vie quotidien. » Plusieurs procureur⋅es vantent donc l’efficacité de leurs services sur les réseaux sociaux et l’ensemble de la presse diffuse tous les jours les chiffres d’arrestations et d’incarcérations fournis par les ministères de l’Intérieur et de la Justice.
La circulaire demande aussi aux tribunaux d’ouvrir de nouvelles salles d’audience pour pouvoir juger — y compris le week-end — les très nombreuses personnes arrêtées depuis la mort du jeune homme. Le message est passé. À Grenoble, par exemple, deux audiences de comparutions immédiates sont ouvertes le dimanche 2 juillet pour juger une trentaine de personnes jusqu’après minuit.
Quelques jours après l’envoi de cette circulaire, Dupond-Moretti se félicite devant l’Assemblée nationale de l’obéissance des procureur⋅es : « Je dois dire que l’encre de la circulaire était à peine sèche que déjà les procureurs la mettaient en œuvre et je veux ici de manière solennelle leur rendre hommage parce qu’ils ont été au rendez-vous de la justice. »
Il tient aussi à féliciter les juges, qui, pourtant, ne sont pas sous son autorité hiérarchique, contrairement aux procureur.es : « De la même façon, je veux rendre hommage aux magistrats du siège et aux greffiers qui pendant des heures et des heures ont répondu à ces exactions insupportables. […] Bien naturellement, la justice a été au rendez-vous de la fermeté que j’appelais de mes vœux. »
De fait, le 5 juillet, le ministère de la Justice annonçait avoir fait incarcérer 448 personnes sur les 585 passées en CI.
Pourtant — comme en 2005 —, la plupart des personnes jugées avaient un casier vierge et des garanties de représentation, ainsi que l’ont rapporté de nombreux témoins de ces audiences (par exemple Salle 5, à Grenoble, Rafik Chekkat, à Marseille, dans ce fil Twitter, ou Mediapart).
Autrement dit, leur profil judiciaire n’est pas si éloigné de celui des manifestant⋅es contre la réforme des retraites. Mais la distance sociale qui les sépare des gens de justice est bien plus grande :
Au-delà des propos tenus à l’audience, l’ignorance et le mépris des magistrat⋅es se mesure à la sévérité des peines prononcées, également influencées par la volonté de faire des exemples dans un contexte perçu comme critique :
La brutalité de de la répression judiciaire est au diapason de la réprobation quasi unanime que suscite ce soulèvement. Une large part de la classe politique a exprimé son dégoût, et bien souvent son racisme en parlant des « émeutiers ». Le président des Républicains, Éric Ciotti, demande une « réponse pénale implacable » : « Il faut des incarcérations quasi systématiques, des comparutions immédiates, que ces barbares soient mis hors d’état de nuire. » (Éric Ciotti estime qu’un « cap a été passé » dans un climat de « guérilla urbaine », Les Échos). Très à l’aise dans cette ambiance, le président du groupe LR au Sénat, Bruno Retailleau, déclare sur France info le 5 juillet : « Certes, ce sont des Français, mais ce sont des Français par leur identité. Malheureusement, pour la deuxième, la troisième génération, il y a comme une sorte de régression vers les origines ethniques. » (Après les émeutes urbaines, l’inquiétante dérive de la droite républicaine, Le Monde)
La pression policière sur l’institution judiciaire a elle aussi été considérable : Alliance Police nationale, syndicat majoritaire, produit une série de tracts exigeant le respect de la présomption d’innocence pour le meurtrier de Nahel Merzouk et une « réponse pénale à la hauteur de la situation insurrectionnelle » pour les « nuisibles » et les « hordes sauvages ». La rhétorique martiale est assumée : « Aujourd’hui, les policiers sont au combat, car nous sommes en guerre. »
Le personnel judiciaire a enchaîné les heures supplémentaires pour faire face « à cette charge temporairement accrue d’activité » — pour reprendre l’expression pudique du garde des Sceaux. Certain⋅es se sont d’ailleurs félicité⋅es dans la presse de cette grande souplesse, à l’instar du procureur de Créteil : « Tout le monde s’est très vite porté volontaire, on a mis en place un système de brigades. En une heure, treize magistrats, soit un tiers du parquet, répondaient présent » (Face aux émeutes, la justice a dû s’adapter dans l’urgence pour répondre à l’afflux des dossiers à traiter, Le Monde).
D’autres sont allés encore plus loin : adhérant à l’idée d’une république en péril, FO Justice a proposé de suspendre la grève des greffiers « dans le but de faire respecter le droit et la démocratie » :
Le pays a besoin aujourd’hui d’apaisement et d’un retour à l’ordre républicain qui ne peut se faire sans la mobilisation de l’ensemble des personnels du ministère de la Justice sur le terrain. (Communiqué Contexte actuel et responsabilité.)
Une fois de plus, la comparution immédiate a montré sa capacité à juger et incarcérer des centaines de personnes en quelques jours lorsque le gouvernement l’estime nécessaire. Les magistrats se tournent déjà vers l’avenir. Le procureur de Bobigny voit cet épisode comme un galop d’essai réussi : « Ces jours de violences ont, en tout cas, été une sorte de test grandeur nature à un an des Jeux olympiques qui auront lieu à Paris à l’été 2024. »
Contre-rendu des comparutions immédiates suite aux révoltes après la mort de Nahel
⚫️ chef d’accusation : Vol par effraction
Circonstance aggravante : en association
Peine maximale encourue : 7 ans d’emprisonnement.
🟡 Les faits : pas évoqués en détails, les prévenus demandent un délai, l’audience est renvoyée.
🕑 Renvoi du jugement au :
8 août 2023, 14h
5ème chambre
Tribunal judiciaire de Versailles
Tous maintenus en détention provisoire à la Maison d’arrêt de Bois d’Arcy
📍 Affaire Darty de Vélizy-Villacoublay, révolte du 1/7/2023
👤 5 prévenus
H, ?, en apprentissage
H, 19 ans, en intérim
H, 19 ans, à la mission locale
H, 19 ans, en recherche d’emploi, inscrit à la mission locale
H, 21 ans, brancardier
🔘 chef d’accusation : vol par effraction
Circonstance aggravante : ?
Peine maximale encourue 10 ans d’emprisonnement
🟡 Les faits : pas évoqués en détails, les prévenus demandent un délai, l’audience est renvoyée.
🕑 Renvoi du jugement au :
10 août 2023, 14h
5ème chambre
Tribunal judiciaire de Versailles
Tous maintenus en détention provisoire à la Maison d’arrêt de Bois d’Arcy
RENVOIS
Versailles
08/08 – 14h Chambre 5
10 août – 14:00
Bobigny
03/04 – 13 h 30 ?
04/08 – 13h30 ?
Paris
19/07 – 13h ?
04/08 – 13h ?
10 août 2023 a 13h30 23e chambre section 2
Créteil
Évry
19/07 – 13h30
11/01/24 (pour dommages et intérêts)
Pontoise
Audience relai 26/07/2023
Renvoi 08/01/2024
Déjà 350 personnes en taule (chiffre du gouvernement)
Audiences Pontoise 4/07
CI salle 2 ou 3 à partir de 13h30
9 personnes jugées pour des affaires liées aux émeutes (dont 7 dans la même affaire)
Sept personnes jugées pour vol aggravé en réunion et dégradation (+2 mineurs). Carrefour et opticien de Deuil la Barre (les procédures pour le carrefour et l’opticien sont rejointes pour certains). 6 en Détention Provisoire et 1 en contrôle judiciaire
Interpellations dans le magasin et exploitation des vidéos du magasin et des téléphones (messages snap)
1) aucune mention au casier, dossier vide (on ne le reconnait pas sur les vidéos.) Il reconnait être sur place mais pas le vol
Réquisition : 18 mois fermes dont 4 mois en sursis probatoire avec obligation de travail et interdiction de la place du carrefour
Rendu : 12 mois avec bracelet, obligation de travail et interdiction de la place du carrefour
2) accusé de vol aggravé et dégradation.
: 18 mois fermes dont 4 mois en sursis probatoire
Rendu: 12 mois avec bracelet, obligation de travail et interdiction de la place du carrefour
3) accusé d’avoir dégradé la vitrine pour rentrer et vol
Réquisition : 2 ans fermes
Rendu : 12 mois ferme
4)accusé de vol mais pas dégradation. Il a 15 mentions au casier dont vol aggravé
Requis: 30 mois fermes
Rendu: 18 mois fermes dont 8 avec sursis probatoire
5)le plus âgé, 27 mentions au casier et une obligation de soin
Réquisition : 24 mois fermes
Rendu: 12 mois fermes
6) réquisition : 10 mois fermes
Rendu: 12 mois avec bracelet, obligation de travail et interdiction de la place de la nation
7) il a 18 ans et un mois, le seul sous contrôle judiciaire. Pas de mention au casier
Réquisition : 6 mois avec bracelet
Rendu : 6 mois avec bracelet
CR DE DEUX COMPAS D’HIER APRÈM
(mardi 4 juillet) À BOBIGNY, salle 4
🛑 1e comparution, vers 16 h : jeune homme. Casier vierge.
➡️ Ce qui lui est reproché : dégradation en réunion par moyens dangereux.
➡️ Contexte : Dégradation, incendie, invasion du commissariat de Villepinte.
Vidéo où on voit la personne interpellée en train de dégrader une poubelle.
Juge humiliante, méprisante. Répète tout le temps que la personne a des “problèmes intellectuels”, l’humilie sur son travail (en ESAT), fait une leçon de morale à la salle sur ce qu’est un métier utile à la société (médecin, policier ou magistrat par exemple, la salle rit), sur le fait que ses parents (présents) doivent avoir honte, sur le fait qu’il habite encore chez ses parents.
Question à la personne : pourquoi vous avez fait ça ? Par rapport à Nahel ?
-Sa réponse : oui
-c’est quoi le rapport ?
-le venger
-je comprends pas en quoi ça le venge
-Ce qu’il s’est passé, c’est une injustice. Le seul moyen de se faire entendre, c’est la violence.
➡️ Réquisition de la procureure : 12 mois : six mois ferme et six mois sursis simple. Interdiction de détenir et de porter une arme pendant trois ans.
Nouvelles leçons de morales avec phrases du genre, je cite : ces révoltes “ça touche les bases fondamentales de l’état”, les décisions de la justice dans ce contexte se doivent de “faire régner l’ordre dans la société”.
Dit que la personne ne comprend pas “ce que pourrait comprendre un élève de 6e”
➡️ Son avocate, commise d’office, ne sert à rien. Elle l’enfonce juste (“mon client a des problèmes intellectuels”, on comprend vaguement qu’il a peut-être des problèmes psy) et survole la question de la raison politique de l’action de la personne. Regarde son tel pendant les réquisitions de la procureure. Demande un sursis probatoire, un suivi psychiatrique (“vu la manière dont il exprime sa colère”) et un stage de citoyenneté “parce que tout le monde n’a pas le même parcours”.
➡️ Décision de la juge : 6 mois de ferme avec mandat de dépôt et interdiction de port/détention d’arme pendant 3 ans (elle dit “vu votre faiblesse intellectuelle, je vous donne une peine claire, facile à comprendre”)
Peu de keufs à l’audience, groupe de 4/5 qui passe de temps en temps
🛑2ᵉ comparution, vers 17 h : 2 jeunes hommes
➡️ Ce qu’on leur reproche :
1e : violences sur PDAP (2 keufs) avec usage d’arme (en l’occurrence mortier) en réunion. À un casier
2e : participation a un attroupement en vue de. Pas de casier
➡️ Violence qu’ils ont subi de la part des keufs :
1e : a reçu un tir de LBD
2e : 2 dents cassées
➡️ Contexte : manif à Pierrefitte sur Seine, 20 personnes. Tirs de mortiers contre les keufs pendant leur patrouille.
➡️ Réquisition procureur :
1e : 10 mois ferme + interdiction de port et détention d’arme pendant trois ans. Interdiction du 93 pendant 2 ans (habite dans un département limitrophe)
➡️ Avocat des keufs demande 500€ + 588€ par keuf (donc x2). Dit juste que les mortiers c dangereux
➡️ Avocat très ironique, dans la représentation. Démonte en règle le dossier : plein de vices de procédure (2 PV d’interpellation dont 1 rédigé après l’interpellation, avec bcp plus de détails sur la description physique des personnes ou la couleur du briquet prétendument utilisé, alors que la description des personnes dans le 1e PV c’est juste “des individus cagoulés vêtus de sombre”, pas de mention du briquet. Pas de PV de fouille alors qu’on dit qu’un briquet rouge a été utilisé pour allumer le mortier. Aucune trace du mortier).
Le récit ne tient pas non plus : au moment où ils sont interpellés, ils étaient prétendument en train d’allumer un mortier avec un briquet rouge. Mais il faisait nuit,il y avait plein de gens qui couraient dans tous les sens, les keufs qui les ont interpellés étaient en voiture, de loin : comment ont-ils pu voir que c’étaient eux deux parmi les 20 qui ont allumé le mortier, comment ils peuvent savoir que c’était avec un briquet rouge ?
L’avocat insiste sur le côté absurde de ce qui leur est reproché : oh la la, ils ont une cagoule, oh la la, ils ont des gants, oh la la, ils avaient des vidéos des émeutes sur leur tel (sur les réseaux sociaux, mais ils n’envoient aucun msg pendant les faits) mais lui l’avocat, il habite dans le 17ᵉ, et personne ne lui reprocherait des violences parce qu’il a des gants de scooter / une tenue trop chaude pour l’été / qu’il regarde Twitter où il y a des vidéos d’émeutes. Dit comme ça fait un peu con, mais il le tourne de manière efficace. Aussi, on leur reproche de courir alors que ça tire au LBD. Bref, à part ces éléments qui ne sont pas probants, rien d’autre ne leur est reproché. Rien ne prouve que ce sont eux qui ont allumé le mortier, ils ont été arrêtés au pif dans la mêlée alors qu’ils passaient par là.
➡️ Décision de la juge :
1e (avec casier) : 10 mois ferme avec mandat de dépôt. Maison d’arrêt de Meaux. 500€ + 300€ par keuf (donc x2 pour les 2 sommes).
Interdiction de port et détention d’arme pendant trois ans. Interdiction du 93 durant 2 ans
Aujourd’hui, dans cette émission, nous vous proposons l’écoute de la présentation du livre de Nadia Menenger : La liberté ne se mendie pas. Cette présentation se tenait en juin 2022 à Paris. Nous entendrons également l’intervention de Abdelhamid Hakkar, présent lors de cette rencontre.
Préface de « La liberté ne se mendie pas »
Ce livre est un hommage à Olivier Cueto, cofondateur du journal anticarcéral L’Envolée. Il compile principalement ses articles écrits entre 2001 et 2008 et quelques textes rédigés par des prisonniers qui participaient à la rédaction du journal. Ce livre est un moyen, dans une société numérique qui redécouvre en permanence l’instant, de revisiter la naissance de ce nouveau siècle qui s’est faite sous le signe du tout-sécuritaire dans un consensus largement partagé.
À l’annonce de la mort d’Olivier j’ai relu un à un les premiers numéros de L’Envolée, cherchant en moi-même les réminiscences de moments passés, submergée par le souvenir d’instants hors du commun. Vingt ans déjà, et pourtant j’y ai trouvé des textes d’une actualité criante, des analyses qui parlent à notre époque et qui permettent de mieux la saisir. J’ai pu y mesurer la banalisation d’une répression qui colonise toujours plus notre quotidien et nos pensées. Tout relire fiévreusement. Relire tous les Envolées, les éditos qu’Olivier rédigeait le plus souvent seul. Relire les dossiers, les témoignages, les articles de fond que nous écrivions tous les deux pour chaque numéro du journal. Me remémorer les heures à échanger, les jours à lire, à se documenter avant de se mettre à l’ouvrage. L’urgence de laisser une trace. Parler de lui, de sa force, de sa pensée. Nourrir la mémoire contemporaine des luttes contre les prisons par ceux et celles qui les ont menées. Revenir sur la filiation de L’Envolée avec le GIP, groupe d’information sur les prison et le CAP, comité d’action des prisonniers : son lien direct avec les prisonniers en lutte, ce va-et-vient intellectuel et pratique incontournable pour comprendre, analyser, combattre les institutions mortifères de l’État. Faire connaître la parole des enfermé-e-s. Chercher les raisons de la colère. Interroger les évidences. Soutenir les insurgés.
En partant des expériences passées, nous voulions poursuivre la critique de la prison et de la société qui la produit. Elle implique un travail d’enquête avec ceux et celles qui dénoncent leurs conditions d’enfermement et qui ont pour objectif de les transformer. Cette approche tranche avec les écrits universitaires ; la radicalité s’élabore rarement dans les salons ou les bibliothèques ; il faut éprouver, vivre, partager les lieux, les situations, les luttes. S’il existe des ouvrages de sociologues tout à fait passionnants sur le constat et la description théorique des phénomènes carcéraux, ceux-ci semblent incapables d’aborder leurs dépassements. La langue y est souvent empreinte d’un mélange entre un verbiage universitaire incompréhensible et des concepts qui restent hermétiques au plus grand nombre. Quant aux propositions, quand il y en a, elles sont souvent cantonnées au domaine de l’aménagement et se cramponnent au giron de l’État.
Les quatre personnes qui ont créé L’Envolée ont traversé les décennies sans renier leurs engagements, chacun à sa manière. Notre rencontre nous a donné la force et l’envie de continuer d’agir sur un sujet aussi peu consensuel que la suppression de la prison. J’ai quitté L’Envolée aux alentours de 2008, mais l’émission comme le journal continuent avec d’autres ; une belle longévité pour un journal fonctionnant sans aucune subvention, publiant des textes de prisonniers et de prisonnières, traitant de sujets qui remettent en question aussi radicalement les fondements moraux, économiques et politiques de nos sociétés.
Ce livre retrace les sept premières années d’existence de L’Envolée à travers un choix de textes forcément subjectif. J’espère qu’ils permettront aux lecteurs de s’approprier le travail que nous avons entrepris et de comprendre que, si nous voulons détruire ce monde qui ressemble de plus en plus à une prison, il faut impérativement inscrire au programme de la révolution la fin des lieux d’enfermement. Un monde sans prison semble impensable, un objectif inatteignable. La fin des années 1970 a sonné la défaite des courants révolutionnaires à travers le monde. Le capitalisme a triomphé. En France, la gauche au pouvoir en 1981 et la chute du mur de Berlin en 1989 sonnent la fin de l’histoire, l’avènement du meilleur des mondes possible, désormais indépassable et uniquement aménageable à la marge. Pour s’en sortir, il ne reste plus que la course à la réussite individuelle et que le plus pourri gagne !
Dès la fin des années 1990, les États pour construire et consolider le libéralisme mondialisé ont imposé sur l’ensemble de la planète son ordre destructeur des biens communs, le pillage des richesses planétaires et, parallèlement, ont mis en place des outils répressifs pour maintenir et développer une exploitation maximale et gérer une misère grandissante qui va s’abattre sur des franges de plus en plus importantes des populations.
Ceux et celles qui ne voulaient pas se résigner ont tenté de poursuivre leur combat mais de manière éclatée ; ici le logement, là les prisonniers, là encore les sans-papiers, les salariés, les précaires, les féministes… Mais rien pour les relier, rien pour trouver les points communs à toutes ces tentatives de résistance, pour construire ensemble… Il en va de la lutte comme des sciences et de toutes productions ; tout morceler, émietter, décomposer aboutit à ce que plus personne n’ait la compréhension du tout, qu’aucun projet politique n’émerge. Chacun, s’il détient désormais une part de la question – et donc du problème –, ne peut à lui seul le résoudre et se trouve renvoyé à son formidable isolement, à son impuissance. En lieu et place de la lutte des classes se déclinent alors les groupes infinitaires, les comités de soutien, les collectifs informels, les communautés… Ne voulant ou ne pouvant plus changer les structures, chacun essaie de changer (un peu) son quotidien. Dans un monde qui s’uniformise et s’individualise l’identité, les modes de vie deviennent centraux. Les attentats du 11 septembre 2001 avaient déjà servi de prétexte au renforcement d’une offensive tous azimuts contre tout ce qui pourrait mettre en danger un système d’exploitation qui se veut toujours plus totalitaire et performant. Nous sommes tous des ennemis potentiels du nouvel ordre économique mondial.
À partir des années 2000, l’État s’est ingénié à greffer dans le cerveau de chaque citoyen, les textes de loi comme un univers indépassable, et ce, dès le plus jeune âge. Il lui a fallu piétiner les principes constitutionnels, inverser le sens des valeurs, détruire le langage, séparer les êtres, effacer l’histoire de la lutte des classes, détruire un à un les conquis sociaux. Se plonger à nouveau dans les textes publiés dans L’Envolée permet de retracer ce virage sécuritaire. Comprendre comment, petit à petit, le discours dominant repris par les esprits simplistes a assimilé la « délinquance » à une maladie qu’il convient de dépister et de traiter : évaluation, punition, rémission. La délinquance est devenu un problème individuel ou familial qui n’a plus rien de politique, qui n’a pas à interroger la société tout entière et son fonctionnement profondément inégalitaire. Inutile de se pencher sur les causes sociales, économiques, politiques, morales pour les résoudre. Les responsabilités sont à chercher dans la psychologie des individus ou de leurs proches ; les « inadaptés » n’ont qu’à bien se tenir et arrêter de s’attrouper.
Depuis des décennies, les prisons et les quartiers populaires (réservoirs d’ouvriers, de précaires et de chômeurs) où vivent les populations les plus vulnérables et exploitées sont les lieux d’expérimentation des techniques de maintien de l’ordre et d’enfermement. C’est de ces laboratoires sécuritaires que sont sorties les techniques de contrôle et de répression qui se sont généralisées pour être élargies aux classes moyennes. L’abandon d’une critique radicale des thématiques du droit, de la justice et de la prison par les mouvements sociaux depuis les années 1980 a permis aux différents gouvernements d’avancer sans limite, en nous faisant croire que la sécurité était synonyme de liberté.
Il faut toujours rappeler que le droit garantit l’ordre social et la propriété privée, plutôt que le bien commun et l’intérêt général et qu’avant tout ce sont les dépossédés qui se retrouvent derrière les barreaux. Il y a un ordre à faire respecter, la société à protéger et les réponses sont avant tout punitives, car comme disait Valls « expliquer, c’est déjà vouloir un peu excuser ». Pour s’en sortir, il faut faire siennes les valeurs de l’entreprise ; compter sur soi-même, quitte à marcher sur les autres au passage : c’est ainsi qu’on apprend à être le gestionnaire de son « capital-vie ».
Les aménagements des conditions de vie ou de détention se calculent au mérite, au degré d’adaptabilité ou de soumission : maître-mot de la logique entrepreneuriale adaptée à l’individu, incarcéré ou pas. Se battre collectivement pour réformer ou révolutionner les rapports d’exploitation serait vain : « désormais, quand il y a une grève en France, personne ne s’en aperçoit » déclarait Sarkozy en 2007. Même les trois millions de manifestants contre la contre-réforme des retraites de 2010 n’ont pas fait plier le gouvernement Fillon de l’époque… ou bien faut-il identifier l’échec des mobilisations passées dans le corporatisme, la bureaucratie syndicale, les grèves perlées incarnées par des « journées d’action » absurdes, la délégation de pouvoir et plus encore, à notre enfermement dans un cadre légal de plus en plus étriqué qui nous conduit à l’impuissance.
Le consensus des classes moyennes et petites-bourgeoises avec le pouvoir a permis dans les années 2000 au gouvernement d’instaurer un arsenal répressif conséquent sans que cela ne suscite beaucoup l’indignation. Persuadées de maintenir leurs intérêts grâce à leur collaboration, elles avalisent et participent aux contrôles, aux fichages, aux signalements, au respect des « valeurs de la République » et deviennent de véritables adjoints à la sécurité. Mais depuis des décennies, les salaires baissent, les statuts se détériorent, dégradant les conditions de vie et barrant l’avenir pour une partie croissante de la population. Ceux et celles qui pensaient être préservés après avoir fourni tant de gages d’honnêteté et de docilité se retrouvent déclassés. Face à l’accélération des mesures gouvernementales privatisant les services publics, saccageant l’environnement, bétonnant à tout-va, sécurisant les libertés, le nombre des contestataires a gonflé.
Les mobilisations sociales ont subi un traitement jusque-là réservé aux révoltes de banlieue (occupations militaires, violences policières, justice d’abattage). L’expérience de la répression est vécue par des franges de plus en plus larges de la population et est largement documentée, filmée, dénoncée ; contrairement aux années 2000 durant lesquelles le consensus citoyenniste isolait les manifestants, protégeait les fonctionnaires du maintien de l’ordre de toute critique et confinait l’expression politique dans le cadre étouffant et paralysant du code pénal.
Après les ZAD, depuis 2015, les mobilisations cherchent à s’émanciper des cadres et structures institutionnelles sans toutefois les dépasser ; loi travail, «gilets jaunes», mobilisation contre la réforme des retraites ; des centaines de milliers de personnes se sont confrontées au pouvoir et se sont considérablement politisées. Les familles de victimes de violences policières et les mutilés pour l’exemple s’organisent, se coordonnent et tentent d’élaborer une critique systémique des violences policières et des violences d’État, mais celles-ci ne se limitent pas aux exactions des forces de l’ordre, elles commencent dès la naissance jusqu’à la mort en passant par l’école, le logement, l’urbanisme, le travail… Et touchent tous les dépossédés.
Les «gilets jaunes» sont venus apporter une bouffée d’oxygène dans le marécage stérile des contestations dûment encadrées par les partis, syndicats, associations… et les rituels mimant le spectacle de la violence. Ce mouvement a su remettre à l’ordre du jour la lutte des classes, refouler les spécialistes qu’ils soient de l’information, de la politique ou de l’économie pour critiquer en acte leur propagande qui colonise nos cerveaux à la sauce néolibérale. Ils ont dénoncé le racket et les détournements d’argent public, exiger que le pouvoir politique et les richesses soient partagés entre tous et toutes ; le pouvoir par le peuple, pour le peuple…
À chaque mouvement d’ampleur, la répression est de plus en plus militarisée, et le nombre de ceux et celles qui n’aiment pas la police de leur pays croît. La police se révèle de plus en plus clairement ce qu’elle est : une milices d’hommes en armes qui défendent les intérêts des puissants, du capitalisme. Le déferrement de milliers d’interpellés devant les tribunaux a ouvert des brèches mais n’a pas encore permis de prendre conscience du fonctionnement et de la fonction de l’institution judiciaire. Qui fait les lois ? Pour protéger qui ? Quoi ? Malgré les 72 000 prisonniers et le millier de personnes incarcérées à la suite des révoltes des «gilets jaunes», la question carcérale a du mal à émerger, laissant souvent les détenus seuls face à la violence de l’institution pénitentiaire. Les comités se limitent au soutien d’une personne ou à une catégorie de prisonniers laissant indemne la critique de la prison elle-même. Mais ces oubliettes modernes sont bien là ! Elles servent avant tout à imposer un ordre social, à gérer la misère grandissante et à faire taire les révoltes. Et il faudra bien les mettre à l’ordre du jour si l’on prétend vouloir changer ce monde ! La situation actuelle n’est pas une dérive, mais bien une continuité.
Dans la lignée de ces prédécesseurs, toutes couleurs confondues et en l’absence de rapport de force conséquent, Macron poursuit l’adaptation de l’appareil répressif à l’évolution du capitalisme. Des « sauvageons » de Chevènement à l’« ensauvagement » de Darmanin, c’est toujours la même volonté de stigmatiser une catégorie de la population, de désigner des boucs émissaires, de créer du séparatisme, pour diviser les dépossédés et détourner leur attention des véritables enjeux politiques. Les nouvelles réformes du code du travail, de l’Assurance-chômage, de la retraite, la destruction des logements sociaux… entraîneront inévitablement le développement de la délinquance et de la révolte, que le gouvernement gère de l’école à l’entreprise en passant par la cité, en construisant de nouvelles prisons, en renforçant le contrôle, la précarité, l’isolement et la répression à l’aide des nouveaux outils numériques.
Le capitalisme élimine impitoyablement tous ceux et toutes celles qui sont éjecté-e-s du monde du travail ou qui ne s’y conforment pas et pulvérise chaque année son record d’incarcérations dans et hors les murs. Ce livre s’adresse à ceux et celles qui croient que la démocratie est en péril depuis Macron, ceux et celles qui se raccrochent aux branches des droits de l’homme à chaque promulgation de nouvelles lois liberticides, déclarations d’état d’urgence ou d’exception, qui s’agrippent aux valeurs républicaines sans les définir.
Mais surtout, cette lecture a pour ambition de donner force et détermination à ceux et celles qui continuent de se battre, malgré tout, et qui cherchent dans l’obscurité de notre époque des perspectives qui relient les dépossédé-e-s, les exploité-e-s pour construire un monde débarrassé de ses aliénations. Je continue le décryptage de notre époque en participant à la fabrication d’une émission quotidienne d’information sur les luttes sociales sur une radio libre ; L’actualité des luttes sur Fréquence Paris Plurielle 106.3 fm. Partout ou la résistance existe, nous essayons d’être là pour enregistrer et diffuser la parole de ceux et celles qui ne renoncent pas. Nous ne croyons pas en une avant-garde particulière, mais en une alliance des opprimés, des travailleurs précaires ou garantis, des chômeurs, des voleurs, des prisonniers, des fous, des paysans, des habitants des cités populaires ou des campagnes…
Nadia M
Appel des perpétuités de Clairvaux
Pour un rétablissement effectif de la peine de mort pour nous
A ceux de l’extérieur osant affirmer que la peine de mort est abolie Silence ! On achève bien les chevaux !…
Nous, les emmurés vivants à perpétuité du Centre pénitentiaire le plus sécuritaire de France (dont aucun de nous ne vaut un Papon) nous en appelons au rétablissement effectif de la peine de mort pour nous.
Assez d’hypocrisie ! Dès lors qu’on nous voue en réalité à une perpétuité réelle, sans aucune perspective effective de libération à l’issue de notre peine de sûreté, nous préférons encore en finir une bonne fois pour toute que de nous voir crever à petit feu, sans espoir d’aucun lendemain après bien plus de 20 années de misères absolues. A l’inverse des autres pays européens, derrière les murs gris de ses prisons indignes « la République des Lumières et des libertés » de 2006 nous torture et nous anéantit tranquillement en toute apparente légalité, « au nom du peuple Français », en nous assénant en fonction du climat social ou à la faveur d’un fait divers ou encore d’échéances électorales, mesures répressives sur mesures répressives sur le fondement du dogme en vogue du « tout sécuritaire. »..érigé en principe premier supplantant tous les autres.
Qu’on se rassure : de nos jours, ici, même « les mauvaises herbes ne repoussent plus. » I1 n’y a que le noir et le désespoir De surenchères en surenchères : la machine à broyer l’homme a pris impitoyablement le pas.
A quoi servent les peines de sûreté qu’on nous inflige quand une fois leur durée dûment purgée on n’a aucun espoir de recouvrer la liberté ? (depuis l’année 2000 à la Loi Perben II de 2005- on a fait mine de s’appliquer à légiférer en instituant de nouvelles « juridictions de libération conditionnelle », seulement, comme hier le ministre de la justice, les juges d’aujourd’hui à l’oreille de l’administration nous opposent… refus sur refus, nous vouant à des durées de détention à la Lucien Léger).
Pourtant, sur « la finalité de la peine » l’État français, admettant que nous avons vocation de sortir un jour, et s’inscrivant dans le cadre des recommandations du Conseil de l’Europe, a posé pour principe s’étendant aux longues peines et aux (700) condamnés à perpétuité que : « L’exécution des peines privatives de liberté (…) a été conçue non seulement pour protéger la société et assurer la punition du condamné, mais aussi pour favoriser l’amendement de celui-ci et préparer sa réinsertion » ? En réalité : tout est au châtiment.
Combien d’entre nous – du moins pour ceux qui ne sont pas décédés depuis – ont déjà purgé plusieurs années au-delà même de leur peine de sûreté de 18 ans sans se voir présenter à ce jour une réelle perspective de libération ? Après de telles durées de prison tout rescapé ne peut que sortir au mieux sénile et totalement brisé. En pareil cas, qui peut vraiment se réinsérer socialement ? En fait, pour toute alternative, comme avant 1981, ne nous reste-t-il pas mieux à trouver plus rapidement dans la mort notre liberté ?
De surcroît, pour nous amener à nous plier à ce sort d’enterré vif, on nous a ces dernières années rajouté murs, miradors, grilles en acier et maintes autres contraintes. Le tout, pour faire taire toute velléité. assorti de « commandos » de surveillants casqués, armés et cagoulés, à l’impunité et aux dérives vainement dénoncées çà et là, dans l’indifférence générale (…n’en croyez rien : il y a ici une place pour vous et pour vos fils. C’est encore plus vrai que jamais à l’heure où l’on préfère supprimer à tour de bras dans les écoles du pays bien des postes d’instituteurs et d’éducateurs pour en lieu et place miser sur l’embauche de toujours plus de nouveaux policiers et surveillants de prison et en érigeant de nouvelles prisons et autant de QHS).
Aussi, parce qu’une société dite « démocratique » ne devrait pas se permettre de jouer ainsi avec la politique pénale visant à l’allongement indéfini des peines, selon la conjoncture, l’individu ou les besoins particuliers : À choisir à notre mort lente programmée, nous demandons à l’État français, chantre des droits de l’homme et des libertés, de rétablir instamment pour nous tous la peine de mort effective.
Clairvaux, le 16 janvier 2006
Soussignés, les susnommés ci-après du mouroir de Clairvaux : Abdelhamid Hakkar, André Gennera, Bernard Lasselin, Patrick Perrochon, Milivoj Miloslavjevic, Daniel Aerts, Farid Tahir, Christian Rivière, Jean-Marie Dubois et Tadeusz Tutkaj
Ce 1ᵉʳ septembre 2023, rentre en vigueur la nouvelle reforme des retraites et le début des rencontres entre le patronat et les syndicats sur l’avenir des retraites complémentaires (AGIRC-ARRCO).
Suite à plusieurs mois de luttes contre cette réforme et de mobilisations, quelle suite donnée à ce mouvement ou les directions syndicales ont mis des freins ?
Après ce mouvement en demi-teinte, le collectif : ne tournons pas la page entend continuer à porter cette lutte
Ainsi pour faire le point sur la campagne mené par le collectif et préparé la suite, une réunion publique se tenait ce 1ᵉʳ septembre 2023 dans les locaux de EDMP a Paris.
C’est une partie de cette rencontre que nous vous proposons dans l’émission de ce jour.
Bonne écoute !
Adresse aux directions de la CGT, FO, SOLIDAIRES, FSU, CFDT, CFTC, UNSA, CFE-CGC : NE TOURNONS PAS LA PAGE !
« Mesdames, Messieurs,
Nous sommes mobilisés depuis plusieurs mois contre la loi Borne. En effet, le système des retraites par répartition étant à l’équilibre, et l’heure de travail en France étant parmi les plus productives au monde, il n’y a aucune raison acceptable de repousser de 2 ans l’âge de départ à la retraite. Comme vous aujourd’hui nous exigeons l’abrogation de la loi Borne.
Emmanuel Macron, ses ministres, ses députés, ses sénateurs, et de larges pans du patronat sont heureux que la loi ait enfin pu être promulguée. Ils veulent passer à autre chose, passer à d’autres “réformes”, c’est-à-dire d’autres attaques contre les services publics, les travailleuses et travailleurs (en emploi ou non), et la jeunesse.
Par ailleurs, les candidats à la présidence du Medef réclament déjà « d’introduire une dose de capitalisation ». C’est bien la mise à mort du système par répartition qui est programmée. À l’instar des millions de manifestantes et manifestants le 1ᵉʳ mai, de ceux qui depuis font grève dans leur entreprise, et de tous ceux qui casserolent chaque jour les représentants de Macron, nous, nous ne tournons pas la page.
Nous sommes pour la plupart syndiqués dans vos fédérations. Nous avons pour la plupart repris le travail. Nous entendons nos collègues nous dire que «faire grève ne sert à rien». Nous pouvons les comprendre. Qui a envie de perdre du salaire “pour rien”? Nous faisons aussi le constat que 14 journées de grève réparties sur 6 mois, de janvier à juin, est une tactique qui est loin d’avoir porté ses fruits. Le pouvoir était beaucoup plus chancelant courant mars, lors de la grève reconductible de plusieurs secteurs (cheminots, raffineurs, énergéticiens, secteur des déchets…).
Nous avons conscience, comme des millions de travailleuses et travailleurs en France, que nous devons arrêter le travail tous en même temps, pour véritablement bloquer le pays et avoir le rapport de force nécessaire pour obtenir l’abrogation de la loi Borne.
En tant que directions syndicales, vous avez le pouvoir d’appeler à la grève générale, de l’organiser et de la financer. Pas de fausse modestie entre nous. Il est insupportable d’entendre dire qu’il n’y a pas de bouton pour déclencher la grève générale, quand on voit avec quelle aisance on appuie sur le frein pour empêcher le déferlement. Vous ne pouvez pas vous défausser de vos responsabilités sur le reste de la direction de votre confédération, ou sur vos fédérations.
Si nous perdons ce combat de civilisation, celui du travail contre le capital, celui du temps libre sur le temps contraint, vous serez les coupables tout désignés de cette défaite. Vos dizaines de milliers de nouveaux syndiqués ne seront bientôt plus qu’un lointain souvenir.
Nous vous demandons donc de prendre toutes vos responsabilités, et de vous engager par écrit à :
: Cesser toute rencontre avec Macron ou ses ministres. Ne pas “négocier” d’autres contre-réformes. Assumer la politique de la chaise vide. Arrêter d’être des “interlocuteurs responsables”. Vous gagnerez en crédibilité auprès des seules personnes qui comptent : les travailleuses et les travailleurs.
: Appeler à la grève générale, l’organiser, et la financer.
Dans le cas contraire, nous en tirerons toutes les conséquences.»
Pour devenir signataire de ce texte : Envoyez vos NOM, Prénom, Syndicat (Responsabilités syndicales éventuelles) à netournonspaslapage@proton.me
NTI, est une entreprise opérant dans les secteurs du bâtiment, de la propreté et du traitement de déchets.
Cette société sous-traitante de grands groupes qui gèrent, au titre de délégations de service public, des sites de traitement et de tri des déchets, notamment pour : Veolia, Suez, Paprec, Urbaser, etc.
Le lundi 28 août, 11 salarié-e-s de la société NTI , ont décidé de se mettre en gréve pour exiger leurs droits et soutenue par la CGT VEOLIA. Le mercredi 30 aout 2023, un rassemblement de soutien se tenait devant le centre de tri de collecte sélective du 15ᵉ arrondissement de Paris.
Dans ce reportage, nous entendrons le témoignage de deux salariés qui nous parlent de leurs situations et un point sur les négociations avec VEOLIA.
Le 7 juillet 2023, la marche pour la vérité et la justice et la justice organisée depuis 7 ans à Persan Beaumont par le comité Adama était interdite par la préfecture suite aux révoltes qui ont eu lieu après la mort de Nahel lors d’un contrôle routier à Nanterre. En réponse à cette interdiction, le comité Adama a appelé à se réunir le 8 juillet 2023 sur la place de la République, rassemblement qui a lui même était interdit et maintenu par le comité. Vous entendrez donc dans la première partie de cette émission le reportage que nous avons réalisé lors de ce rassemblement avec les prises de parole du Comité et un interview de Mahamadou Camara, frére de Gaye Camara, tué par la police en janvier 2018 d’une balle dans la tête alors qu’il était au volant de sa voiture.
Ensuite, dans une deuxième partie d’émission nous reviendrons avec Emilie du collectif stop violence policières de St Denis, sur la lutte contre les violences d’état, l’article l435-1 qui accorde le permis de tuer à la police et sur les activités du collectif au quotidien mais aussi lors des nuits de révoltes qui se sont déroulés à St Denis.
Depuis la mort de Nahel, tué par la police à Nanterre, la répression s’abat fermement sur celles et ceux qui sont sorti.e.s dans les quartiers pour mettre en actes leur colère. Les chiffres sont clairs : 3500 interpellé-es, 1000 déferré-es dont 250 mineurs et 400 interpellé-es.
Face à cette offensive judiciaire, La solidarité s’organise. Un appel à soutien a été fait pour se rendre dans les Tribunaux d’IDF assister aux comparutions immédiates et un appel à rassemblement devant la prison de Fresne le dimanche 9 juillet 2023 est diffusé.
Dans cette émission et en soutien à ces initiatives, nous vous diffusons un interview réalisé avec une des personnes qui s’est rendue au tribunal cette semaine. Afin d’illustrer la différence de traitement judiciaire entre les affaires de violences policières et celle des révoltes qui en découlent, nous avons ponctué cet interview d’ une partie des prises de paroles réalisées lors de la marche contre les brutalité policières organisée par le réseau entraide vérité et justice du 18 mars 2023 dernier.
Liberté pour les prisonnier.es.s du mouvement, liberté pour tou.te.s !
RDV à la gare du Parc de Sceaux (RER B) à 15h dimanche pour aller à la Maison d’arrêt de Fresnes !
Dans la matinée du mardi 27 juin 2023, Nahel, 17 ans, est tué par la police, lors d’un contrôle routier à Nanterre. Depuis, tous les soirs, des révoltes ont lieux dans les quartiers populaires de France.
Le 14 juin, c’était Alhoussein Camara, un jeune de 19 ans, qui était tué par un policier lors d’un contrôle routier à Saint-Yrieix-sur-Charente dans la banlieue d’Angoulême. La nuit du 3 au 4 juin, Mozomba, un jeune homme de 28 ans, en moto, décède des suites de ses blessures après avoir été pris en chasse par la police. En 18 mois, ce sont quinze personnes qui ont été tuées par la police pour refus d’obtempérer. Systématiquement, la police invoque la légitime défense. Dans l’affaire de Nahel, une vidéo de l’interpellation a été diffusée sur les réseaux sociaux et le doute n’est pas permis : il y a intention de donner la mort sans qu’aucun danger ne soit immédiat.
Deux jours après, le 29 juin, la marche blanche qui était organisée pour Nahel à Nanterre réunissait des milliers de personnes. Au fil de celle-ci, nous avons pu rencontrer des habitants et habitantes de Nanterre, d’anciens et d’actuels militants pour l’égalité des droits et contre les violences policières, mais aussi de nombreux jeunes présents en manifestation pour la première fois. Nous avons ouvert nos micros et recueillis leur parole.
Dans un monde gouverné par l’argent et la force, ces révoltes ne surprennent personne et les problématiques qu’elles soulèvent ne sont pas inédites. Elles ponctuent l’histoire des luttes depuis 60 ans : du massacre du 17 octobre 1961, à la marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983, jusqu’aux révoltes de 2005. Elles sont une réponse non seulement à la violence de la police mais aussi à celle de l’ordre social qu’elle garantie.
Les chaines d’information en continu et la répression ne doivent pas nous faire oublier l’élan de solidarité qui s’est exprimé la semaine dernière à Nanterre.
Depuis le 27 juin, une colère s’exprime et des voix s’élèvent.
En première partie d’émission, nous entendrons un entretien réaliser le 24 juin dernier avec un membre de la défense collective de Toulouse, qui nous parlera de la nécessité du collectif et de son histoire. Puis, nous reviendrons sur la décision du gouvernement de dissoudre les soulèvements de la terre
La dissolution des Soulèvements de la Terre a été annoncée ce mercredi 21 juin. Ce dangereux précédent est une attaque inouïe contre la démocratie, contre le vivant, et contre celles et ceux qui les défendent. À Paris, le mercredi 28 juin, se tenait grand rassemblement en soutien aux Soulèvements de la Terre, Place de la République. Nous entendrons dans cette seconde partie d’émission, le reportage réalisé ce mercredi 28 juin 2023
La défense collective émane du mouvement gilet jaune, et s’est constituée en tant que commission du mouvement. Articulée à la commission action, les réunions qui se tenaient chaque lundi étaient ouvertes à toutes les personnes participant au mouvement gilet jaune. Elle s’est créée en réponse à une forte répression.
En plus de la nécessité évidente de soutenir moralement et matériellement les personnes incarcérées et jugées, la défense collective avait pour but de diffuser des pratiques d’autodéfense face à la répression. Toujours en partant du principe qu’en s’attaquant à des individus, la justice s’attaquait au mouvement dans son ensemble. Cet espace d’échange permettait d’analyser les stratégies policières, pour que les expériences de chacun/chacune puissent servir à tout le monde.
Cette commission, ouverte, a tendu à se resserrer autour d’un groupe qui variait de moins en moins chaque semaine. Or, nous ne voulons pas devenir un groupe de spécialistes, les pratiques que l’on a encouragées ne nous ont jamais appartenu et elles continueront à se diffuser partout et tout le temps.
Le matériel que nous avons pu produire est bien sûr réutilisable par tous les gens/les mouvements de lutte qui partagent les positions, les pratiques et les idées qui ont fait la force du mouvement GJ et que nous avons pu porter à la défense collective : solidarité, refus de la dissociation, autonomie politique, refus des représentants, ne pas parler avec la police en général – au commissariat comme dans la rue – ne pas déclarer les manifs, ne rien déclarer en garde à vue…
Les espaces de réunion et de permanence sont de moins en moins utilisés. Notamment parce que le mouvement gilet jaune est fortement affaibli, les manifs ont du mal à se tenir, la commission action n’a plus lieu, et moins de mandats sont à envoyer car moins de GJ sont en prison.
Nous avons donc décidé de diminuer la fréquence des réunions, deux réunions/permanences auront lieu cet été : le 12 juillet et le 23 août, à la Chapelle. Si pendant cette période des personnes souhaitent appeler à des réunions en plus, permanence ou autre, les créneaux sont disponibles et nous diffuserons les RDV.
En cas de besoin (préparation de procès, interpellation, garde à vue et pour tous contacts et plus d’info : defcotoulouse@riseup.net