VERITE ET JUSTICE POUR CLAUDE JEAN PIERRE

Le 3 décembre 2022 de 20h30 à l’aube, à la STREET DREAM GALLERY, 53 rue Jules Vallès à 93400 Saint-Ouen aura lieu une soirée d’ hommage à Claude Jean pierre. Claude Jean-Pierre, 67 ans, est mort le 3 décembre 2020 au centre hospitalier universitaire (CHU) de Pointe-à-Pitre. Il y avait été admis en urgence douze jours plus tôt, le 21 novembre, à la suite d’un contrôle de gendarmerie à Deshaies, dans le nord-ouest de l’île. Depuis, Fatia ( sa fille) et Christophe ( son conjoint) se battent pour la vérité et la justice en s’investissant dans les luttes en Guadeloupe et dans l’Hexagone.

A l’occasion de cet évènement, nous avons réalisé avec eux un entretien le 28 novembre 2022, dans lequel nous revenons sur leur combat contre les violences d’état et la manière dont ils l’articulent avec les combats qui ont rythmé l’année 2020-2021 en Guadeloupe.

GUADELOUPE : l’affaire des « grands frères » Crise sociale, répression et criminalisation judiciaire

Communiqué de presse des familles

Depuis le 17 janvier 2022, nos familles se trouvent projetées dans une injustice
sans précédent. À la suite de l’explosion sociale dans l’île à l’automne 2021, la répression judiciaire a ciblé sept « grands frères ». Ce sont nos proches, travailleurs sociaux et responsables associatifs, qui sont aujourd’hui incarcérés comme boucs émissaires.

Pour les avocats de la défense, les dossiers sont vides face à des accusations très lourdes.Ils dénoncent une violation délibérée des droits humains, des conditions de détention indignes et une instrumentalisation de la justice à des fins politiques.
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En Guadeloupe, ce 17 janvier, à l’aube, Oneel, Lillow, Zébrist, Oneel, BB, Bwana, Samuel, et Didier ont été arrêtés par le Raid et le GIGN pour être placés en garde à vue quatre jours durant. Une spécificité que la justice réserve d’habitude aux affaires de terrorisme ou de grand banditisme. Le 21 janvier, le procureur de la République a annoncé leur incarcération lors d’une conférence de presse.

Les chefs d’accusation sont graves : « association de malfaiteurs en vue de commettre crimes et délits en bande organisée » et « extorsion de fonds », à l’encontre d’élus locaux et de responsables ou propriétaires de grandes enseignes commerciales. Mais le procureur a usé de nombreux conditionnels tout au long de sa prise de parole, pour mettre en cause la responsabilité présumée de nos maris, compagnons, pères, fils, frères dans l’organisation des émeutes en novembre et décembre dernier.

Ils sont à ce jour maintenus en détention provisoire et toute communication avec eux nous est interdite ; ni parloir, ni téléphone, ni courrier. Il est temps pour nous de rétablir la vérité !

Ces grands frères sont des hommes de 33 à 52 ans, investis dans le dialogue quotidien pour convertir la colère et le désespoir des jeunes en revendications légitimes. Ils sont impliqués dans des actions concrètes afin de permettre à celles et ceux qui sont victimes des inégalités sociales de retrouver dignité et pouvoir d’agir.

Leur engagement, c’est l’insertion ou la réinsertion socio-professionnelle, l’organisation d’événements culturels et d’opérations caritatives et de solidarité, l’aide à l’accès aux droits, des campagnes de prévention et des interventions de jour comme de nuit en cas de conflits, parfois armés, entre jeunes. Leur dévouement prend souvent le pas sur leur vie personnelle et familiale. Ils se battent pour que la Guadeloupe se pacifie et que les plus démunis ou délaissés soient pris en compte par notre société. Et les résultats de leur investissement sont connus de tous : habitants, politiques et relais institutionnels. Ils n’avaient donc aucun intérêt à répandre le désordre.

Pourquoi mettre en cause le travail avec les élus ? Les grands frères ne peuvent pas être à l’origine du mouvement social que connaît l’île depuis l’année dernière, ni de toutes les actions qui en ont suivi. La population s’est soulevée de son propre chef. Il est important de rappeler que, depuis des années, ce sont les élus politiques eux-mêmes qui font appel aux grands frères pour contrer la délinquance et garantir la tranquillité publique.

Depuis 2013, l’État a initié la campagne citoyenne « Déposons les armes » pour la restitution des armes personnelles à la police ou à la gendarmerie. Sans le relais et l’appui des grands frères, cette politique d’apaisement et de désescalade serait restée une coquille vide. Cette coopération a été menée au grand jour, comme récemment avec la diffusion publique des séances de travail. Il est donc très surprenant que, pour justifier aujourd’hui la détention de sept hommes, l’enquête judiciaire incrimine cette concertation avec des élus qui ont réfuté toute thèse d’extorsion, de pression ou d’agression. Dossiers vides et violations des droits humains : le choix de la répression.

Pour l’ensemble des avocats, la fragilité des éléments retenus par l’accusation ne permet pas de justifier une détention provisoire. Quelques jours après les arrestations, les présumées victimes d’extorsion de fonds ont affirmé qu’aucun des mis en examen n’avait tenté de leur extorquer quoi que ce soit. De plus, les avocats précisent que les écoutes téléphoniques présentées comme déterminantes par l’accusation sont en réalité des extraits de conversations en créole, tirés de leur contexte et traduits à charge contre les grands frères.

Mais surtout, les avocats dénoncent des violations délibérées des droits de la défense et des droits humains, compte tenu de l’indignité des conditions de détention. Les mises à l’isolement, les blocages de la plupart des communications, les obstacles opposés à l’accès aux soins, les transferts en métropole, tout est fait pour écarter et briser des hommes que l’on considère comme déjà condamnés.

Aussi, en accusant nos proches d’être les meneurs d’émeutes, le procureur appuie la division parmi les habitants, renforce la méfiance à l’égard des élus et vise à délégitimer et criminaliser une protestation massive de la population et particulièrement l’irruption inédite de la jeunesse dans les enjeux politiques guadeloupéens. Une mobilisation à laquelle l’État ne sait répondre autrement que par la contrainte, la force et la répression violente.

Aujourd’hui, nos sept familles sont en grande souffrance et nous tentons de briser le silence médiatique sur nos réclamations et nos revendications.

À travers ce communiqué, nous, les familles de, Samuel, Lillow, Zébrist, Oneel, BB, Didier, et Bwana lançons un appel à toutes et tous pour relayer, soutenir et diffuser notre lutte à travers vos médias et réseaux sociaux. Nous vous appelons à nous rejoindre, toutes et tous ensemble, pour obtenir vérité et justice, pour les grands frères, pour notre jeunesse, pour la Guadeloupe.
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Dans le sens de cet appel, l’émission de ce jour est construite en collaboration avec l’Envolée et met en avant, à travers la répression que subissent les “grands frères”, comment la gestion de la crise sociale en Guadeloupe est exclusivement sécuritaire.

Pour cela, nous vous diffuserons deux reportages réalisés en Guadeloupe lors d’une journée de soutien pour les inculpés le 5 mars 2022, dans lequel vous pourrez entendre un membre de l’association JPMC crée par Frédéric Dumesnil ( un des grands frère incarcéré), puis son avocate Gladys Democrite qui revient sur l’ensemble de la procédure mais aussi sur la place du système carcéral.

Ensuite nous diffuserons l’interview de Ludovic Tolassy du collectif Moun Gwadloup avec qui nous discuterons à la fois de la répression qui s’est abattu sur l’ensemble des participants aux mobilisations et qui nous fera par de son constat sur la situation sociale actuelle.

ANTILLES : face à la répression la lutte continue

Depuis le mois de juillet, la mobilisation aux Antilles françaises ne faiblit pas. Au départ sur la question des mesures sanitaires et contre l’obligation vaccinal pour les soignants, cette mobilisation a pris de l’ampleur et revient sur l’ensemble des problématiques sociales qui ne sont qu’aggravées par la crise sanitaire : chômage, empoisonnement au chlordécone, accès aux soins vie chère, etc.

Ce mouvement réuni plusieurs formes de mobilisation avec des manifestations, des grèves, des actions et la mises en place de barrages en Guadeloupe. Il réunit aussi l’ensemble des acteurs sociaux avec un collectif de syndicats, divers collectifs, associations et des individus. Au mois de janvier 2022, cette mobilisation est aussi importante en termes de durée, de revendications et d’acteurs impliqués que la grève de 2009 qui avait durée 45 jours.

Pourtant, les institutions locales et hexagonales ne font que se renvoyer la balle quant à leur responsabilité face à la crise actuelle et encore aucunes négociations n’a pu être mise en place.

La seule réponse de l’État a été l’envoi de troupe du GIGN(groupe d’intervention de la gendarmerie nationale) et du RAID(Recherche Assistance Intervention Dissuasion) accompagné d’une campagne médiatique qui ne revient que sur des faits de violences qui s’ils existent ne sont pas au cœur de la question.

Et pourtant, face au refus de dialogue social de la part de l’État et les conditions de vies que ce même état maintient lui-même par la violence comment ne pas s’expliquer que les tensions augmentent ?

La semaine dernière, alors que des barrages tentaient de se mettre en place suite à leur destruction en décembre par la police et l’armée, et et que les manifestations du samedis perdraient, les médias nous diffusaient  l’information selon laquelle 8 personnes responsables de certaines des “violences urbaines” ayant eu lieu lors du mois de décembre et de novembre en Guadeloupe.

Ils ont tous été mis en examen pour un ou plusieurs chefs d’association de malfaiteurs en vue de commettre crimes et délits en bande organisée. Quatre d’entre eux ont été placés en détention provisoire. Et au moment où nous avons réalisé cette émission, les débats se poursuivent devant le juge de la liberté et de la détention pour les trois autres.

Rien sur la mobilisation, et surtout pas sur la participation active de ces personnes a la mobilisation en tant que tel. Rien non plus sur leur rôle en tant qu’acteurs sociaux dans l’île avant même le début de cette lutte. Nous avons nous décidé ” de ne pas nous tromper de combat” et de continuer à diffuser la parole des acteurs de cette lutte, afin de réfléchir ensemble aux véritables raisons sociales qui animent cette mobilisation.

Ainsi, nous vous diffuserons dans cette émission plusieurs interventions. Tout d’abord vous pourrez entendre le montage de la prise de parole du collectif Moun gwadeloup (que nous avons interrogé au mois de décembre) suite à la manifestation de soutien qui avait lieu devant le commissariat où se trouvaient les personnes interpellées le  samedi 22 janvier 2022.

Ensuite vous pourrez entendre l’interview de Christophe Sinnan, gendre de Claude jean pierre, mort le 3 décembre 2021 des suites de ses blessures lors d’un contrôle de gendarmerie, sur le traitement médiatique de cette affaire.

Enfin nous vous diffuserons l’interview de Léandre Emrick, créateur et journaliste sur le média indépendant the link fwi, autour de son expérience les six derniers mois sur le terrain de la mobilisation et sur les éléments de contexte au plus long terme qui nourrissent et explique la détermination du peuple guadeloupéen.

Pour plus d’infos : 
http://www.thelinkfwi.com
https://m.facebook.com/MounGwadloup971GAM/

RÉVOLTE AUX ANTILLES

Ce dimanche 28 avait lieu une manifestation à Paris en solidarité avec la révolte qui gronde dans les Antilles françaises depuis plusieurs mois. Depuis le 17 de juillet dernier, des manifestations avaient lieu tous les samedis contre les mesures sanitaires et la crise de la covid dans les Antilles françaises. Le 2 septembre une liste de revendications avait été communiquée au gouvernement français, que le Préfet a rejeté dans son ensemble le 29 septembre.

Avec l’obligation vaccinale des personnels soignants et des sapeurs-pompiers c’est l’ensemble de l’archipel qui se met en révolte à la mi-novembre avec la mise en places de barrages et un appel à la gréve général de 17 organisations syndicales en Martinique le 22 novembre.

Face à cela l’état a mis en place un couvre-feu de 18 h à 5 h du matin le jeudi 19 novembre qui perdure encore aujourd’hui. Un envoi 200 policiers et gendarmes et 50 membres du GIGN et du RAID a été effectué le 22 novembre et un autre a été annoncé ce lundi 29 novembre de 70 gendarmes et 10 membres du GIGN.

Cette révolte qui est partie de la gestion de la crise sanitaire met en avant de nombreuses revendications sociales qui touchent à l’ensemble des conditions de vies des peuples d’outre-mer. Pour toutes ces raisons le mouvement ne faiblit pas, les barrages sont maintenus et les organisations syndicales se refusent à condamner les actes de violences et a appelé à levé les barrages.

Dans cette émission, vous pourrez entendre les reportages et interviews réalisés lors de la manifestation du 28 novembre à Paris. L’interview d’une syndicaliste de Guadeloupe de Combat ouvrier, et deux interventions glanées sur internet : Eli Domota ( syndicaliste du LKP) à la sortie d’une réunion de travail avec le préfet le 26 novembre et un militant martiniquais réalisé par Combat ouvrier et datant du 24 novembre.

Plateforme des revendications :

Revendications sociales :

  • La résolution de tous les conflits en cours ;
  • Le respect de tous les accords signés, y compris celui du SDIS-971, toujours pas appliqué ;
  • L’augmentation généralisée des salaires, des minima sociaux, des allocations chômage et des pensions de retraite en même temps que l’augmentation des prix ;
  • Le remplacement de tous les départs à la retraite ;
  • L’arrêt des licenciements, dans le privé et des suppressions de postes, dans le public ;
  • L’embauche massive de titulaires, dans toutes les fonctions publiques, à la poste, dans les écoles, à l’université… ;
  • L’arrêt de la répression judiciaire et patronale, contre les militants, les travailleurs et les organisations syndicales ;
  • L’abrogation des règles d’indemnisation du chômage ;
  • Le maintien de toutes les primes de vie chère ;
  • L’ouverture de négociations collectives, dans toutes les branches professionnelles, sur les salaires, l’emploi, la formation, la durée du travail, la protection sociale, la priorité d’emploi des jeunes, des chômeurs et des salariés de Guadeloupe, le fait syndical guadeloupéen.
  • La résorption de tous les emplois précaires et des embauches massives, dans le privé ;

Quant à la gestion de la crise Covid et la situation sanitaire locale : 

  • L’abrogation de la loi du 5 août 2021, relative à la gestion de la crise sanitaire ; 
  • La suppression de l’obligation vaccinale ;
  • La suppression du pass sanitaire ;
  • Le maintien de la gratuité des tests ;
  • Des protocoles sanitaires stricts, adaptés aux établissements publics et privés ;
  • Des recrutements de soignants et de personnel, dans les hôpitaux et cliniques privées, ainsi que dans le secteur social et médico-social ;
  • La mise en place d’un plan d’urgence pour l’embauche et la formation des jeunes ;
  • Des moyens matériels pour la santé, le secteur social et médico-social ;
  • La mise en place d’un système de santé de qualité pour accueillir et soigner les usagers, dignement et efficacement ;
  • Des mesures immédiates pour approvisionner les établissements en oxygène ;

Exigences très spécifiques concernant les pompiers : 

  • Le recrutement de 15 sapeurs-pompiers volontaires (SPV), sur dossier, dans l’immédiat ;
  • Le recrutement de personnel administratif technique et spécialisé (PATS), pour la filière administrative et technique ;
  • La réparation, l’entretien et le renouvellement des engins véhicules de secours et d’assistance aux victimes (VSAV) et fourgon pompe tonne (FPT) ; 
  • L’organisation de concours pour les sapeurs-pompiers professionnels, au grade de caporal ;
  • La mise en place d’une nouvelle organisation : 12h00 de travail jour et 24h00 de repos, 12h00 de travail nuit et 72h00 de repos, pour le sapeur-pompier ;

Revendications sociétales et dans le secteur de l’éducation :

  • Des moyens supplémentaires et des recrutements de personnels techniques et encadrant, pour le dédoublement des classes et le respect des mesures sanitaires dans les écoles ;
  • Un bâti scolaire et des équipements sportifs et culturels, rénové au plus vite, conforme aux normes parasismiques et débarrassé des rats ;
  • Un plan d’urgence pour l’eau, pour un accès permanent de tous à une eau potable, buvable, sans pesticide, sans chlordécone, à un prix bas et unique, dans le cadre d’un véritable service public ;
  • Le nettoyage de toutes les citernes dans tous les établissements publics ;
  • La condamnation des empoisonneurs au chlordécone et la dépollution des sols ;
  • La mise en place d’un véritable service public de transport permettant aux usagers de se déplacer à toute heure sur l’ensemble du territoire.